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Lutèce Cup

Le Blood Bowl à la sauvage !!!

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#1 26-07-2018 21:34:44

Duda
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ANNONCE

https://image.noelshack.com/fichiers/2018/30/4/1532633629-lutececup-halfsareback.jpg


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

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#2 26-07-2018 21:56:51

Azzroag
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CheeseHead

Re: ANNONCE

Omg il.est de retour. Et avec des halfing

Tremblez messieurs. Tremblez

(Surtout nicap )

smile


"Ecoute gamin, quand tu auras fait la teflon tu pourra revenir me causer de bloodbowl, retourne donc teter les seins de ta mere et va au lit, c'est bientot 20h.
Eddie : "Si Aredhel et le Sgt sont devant moi au classement à la date du LB, non seulement je joue en String mais avec en plus "Mamar Forever" écrit sur le boule..."

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#3 26-07-2018 22:20:29

cosius
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Creepy Cryptes

Re: ANNONCE

Avec tous ces retours, les multiplex de l'année prochaine vont ressembler à des réunions de vieux cons... Hâte d'y participer mrgreen


Dernière modification par cosius (Aujourd'hui 23:62:17)

------------------------------------------------------------------
NAF 12130 - 9 tournois / Blood Bowl III - pseudo : cosius75

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#4 26-07-2018 22:23:15

Drah
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Re: ANNONCE

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Si l'adage "Malheureux au jeu heureux en amour" est vrai, prépare toi à te faire aimer très fort.
-Faites un don-

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#5 26-07-2018 23:09:48

Budmilka
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Dans la peau de Jérôme

Re: ANNONCE

C'est qui Duda ???


"L'important, c'est de passer l'armure." Pierre de Coubertin (sur une aggro à 7 soutiens)

"Je ne perd jamais : soit je gagne, soit je chatte." Nelson Mandela (joueur sylvain/skaven)

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#6 27-07-2018 01:10:52

melphios
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Re: ANNONCE

OMG,
Yesss

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#7 27-07-2018 10:45:53

Duda
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Re: ANNONCE

https://image.noelshack.com/fichiers/2018/30/5/1532681078-poster-rb.jpg

Heureux d'être de retour ! wink


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
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#8 27-07-2018 10:53:48

lepropre
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Re: ANNONCE

Classe !
Minus POWER !!!


Je n'ai jamais vraiment perdu un match dans ma carrière, j'ai juste manqué de temps certaines fois.
NAF : 26062

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#9 27-07-2018 11:17:32

Azzroag
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CheeseHead

Re: ANNONCE

vay avoir combat sur les CR de matchs entre lepropre et duda smile


"Ecoute gamin, quand tu auras fait la teflon tu pourra revenir me causer de bloodbowl, retourne donc teter les seins de ta mere et va au lit, c'est bientot 20h.
Eddie : "Si Aredhel et le Sgt sont devant moi au classement à la date du LB, non seulement je joue en String mais avec en plus "Mamar Forever" écrit sur le boule..."

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#10 27-07-2018 11:21:01

Skarlan
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Re: ANNONCE

j'espère qu'ils auront l'occasion de se rencontrer durant la prochaine saison, en fin de saison même
ça fera un match épique avec double CR smile


"La chance c'est pour les débutants"
on n’a jamais que l’âge auquel on a commencé à jouer aux échecs, car après on cesse de vieillir" Raoul Capablanca

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#11 27-07-2018 11:39:09

lepropre
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Re: ANNONCE

Arrêtez de faire croire que vous avez envie de voir des Minus s'affronter.
Vous rêver tous de nous tomber dessus pour pexer comme des porcs.
Soit en début de saison afin de lancer l'équipe
Soit en milieu de saison pour rattraper le retard
Soit en fin de saison pour finaliser vos xp pour les Play-off

Mais sachez qu'un Minus averti en vaut 2 et que les matchs seront joués dans le sang, la douleur et la bière !!!


Je n'ai jamais vraiment perdu un match dans ma carrière, j'ai juste manqué de temps certaines fois.
NAF : 26062

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#12 27-07-2018 15:55:36

Duda
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Re: ANNONCE

Le soleil couchant se reflétait dans les eaux paisibles de la lagune, ondulantes lascivement sous l’effet d’une légère brise chaude venue de l’océan. Au loin à l’horizon, des oiseaux marins s’ébattaient dans les airs. Seuls l’écho de leurs cris lointains et le doux bruit de la houle venaient briser la quiétude ambiante de cette fin d’après-midi.

Assis sur le sable chaud, adossés à une barque de pêcheur fatiguée, aux couleurs criardes et à la peinture écaillée, leurs pieds velus baignés par les vaguelettes s’échouant sur la plage, deux halflings bourrus contemplaient ce paysage marin de carte postale. Ils s’abreuvaient goulument de bière fraiche tout en picorant quelques fricassées exotiques dispersées sur un énorme tranchoir posé à même le sable.

-    « Aaaah, ma parole d’ancien, ça c’est d’la boisson des dieux où j’m’y connais pas ! » - s’extasia un des deux compères au visage ridé et barré de cicatrices. – « T’en penses quoi, Eggon ? »

Son compagnon lui répondit, un sourire béat sur ses lèvres, couvertes par un épais tapis de poils qui recouvraient son visage rondouillard :

-    « T’as raison Tholot. On dirait vraiment l’paradis dans la gueule. On n’est pas bien là ? »
-    « Ouais » - répondit son partenaire – « On est bien. »
-    « Clair. On est bien, trop bien ».
-    « Putain, on est bien oué ».
-    « Et on s’fait chier… »

Le silence s’installa entre les deux halflings après cet échange d’une intensité philosophique inouïe. Le calme revint, les oiseaux se turent, la brise cessa et les deux amis retournèrent à leur contemplation muette de l’horizon.

Cela faisait plusieurs mois que les deux semi-hommes séjournaient dans ce beach-resort estalien pour nantis – riches marchands, mages et soldats fortunés ou bien vedettes à la retraite – un très joli endroit de la cote ouest, niché au creux d’une lagune aux eaux chatoyantes et protégé des vents par des collines bondées de cocotiers et de plantes exotiques. On y passait d’agréables journées à sa prélasser au soleil, à jouer aux cartes, et à barboter dans les eaux chaudes des bassins spécialement aménagés pour les convives. On dinait en se gavant de mets délicats et en sirotant des vins sirupeux, et on finissait les soirées un cigare au bec, en se faisant à masser le dos et parfois même le chibre, par des hôtesses avenantes et peu farouches. Le paradis. 

Après quelques instants, le dénommé Tholot reprit la parole :

-    « Arrête, Eggon. Je sais ce que t’as dans ton crâne d’½uf. Tu ressasses trop le passé. Tu remets ça. On est retirés maintenant. J’avoue, on a passé du bon temps avec les gars, mais c’est fini. Regarde-nous ! Deux vieux croûtons, bons à rien. »
-    « N’empêche » - objecta l’autre semi-homme d’une voix empreinte de nostalgie. – « Qu’est ce que c’était bien à l’époque. Tu te rappelles ? L’odeur du terrain, la baston, les cris de la foule, les vivats, les titres de la presse, on se sentait…. vivants, non ? »
-    « Putain, tu te fais du mal Eggon » - renchérit son ami. – « Oui, c’était bien, mais c’est fini. Combien de fois faut que je te le répète ? A chaque fois, tu me refais le même rôle du vétéran désabusé. Ce n’est pas toi qui parle mec, ce sont tes regrets ».

Le halfling barbu tourna lentement la tête vers Tholot et riposta :

-    « Tsss, et toi, tu me rejoues constamment la même rengaine, avec ta philo à deux liards. Trop vieux, trop fourbus, bons à rien. »
-    « Mais parce que c’est vrai. » - commenta le dénommé Tholot. – « C’est super de se souvenir du bon vieux temps, mais là, tu te fais du mal et tu me les brises. C’est plus de la nostalgie là, c’est de la frustration. Les rêves inassouvis d’un vieux joueur fatigué, qui estime mériter les honneurs qu’il n’a jamais reçus ».
-    « Arrête tes conneries » - Eggon voulut couper la tirade de son ami, mais ce dernier ne lui laissa pas le temps.
-    « Ce ne sont pas des conneries. On a eu notre moment de gloire, on a profité autant qu’on pouvait, on s’est fait plein de fric, et maintenant faut juste se la couler douce mon pote ! Et on en profite ! On l’a amplement mérité, ces vacances de rêve ! » - s’extasia Tholot.
-    « Ouais, c’est ça » - objecta l’halfling grassouillet – « Tu parles de vacances. Huit ans de vacances mec. Ça commence à en faire, à la longue. Parle plutôt de prison, à mon sens. Une prison dorée, mais une prison quand même ».
-    « Tu racontes que des conneries » - commenta Tholot. – « Quelle prison ? Personne ne te retient ici, non ? »
-    « N’empêche » - reprit ave gravité Eggon – « Je me fais chier. Grave chier. ».

Le silence retomba de nouveau entre les deux amis. Tholot se leva :

-    « Files moi ta chope. J’vais pisser, je t’en ramène une autre ».
-    « Merci vieux, mais dis à la serveuse que j’veux encore cette ale d’chez nous qu’on vient de boire, pas cette vieille pisse qu’elle nous a servi la dernière fois » - dit en ricanant Eggon.
-    « Ah toi et ta foutue nostalgie. Même la bière locale, t’aimes pas. T’es incorrigible ».
-    « Non, je n’aime pas » - répondit posément pour lui-même le semi-homme lorsque son compagnon partit. – « M’est d’avis que tu ne vas pas non plus aimer ce que j’ai fait… »

Un sourire naquit alors sur le visage poilu d’Eggon et il se mit à rire doucement, rire qui se transforma en cris hilares puis en une véritable crise de nerfs au retour de son ami. Il ne pouvait plus s’arrêter, il riait.

Et il pleurait.

***

- « Et si on le refaisait ? » - le halfling dénommé Eggon interrogea innocemment son vieil ami sans lever les yeux de son assiette.

Ils étaient attablés sur la terrasse du restaurant-club situé en bordure de mer. Le soir était tombé et les deux compères décidèrent de finir la journée par une bon repas dans leur endroit favori – un cabaret tranquille servant une cuisine raffinée, fréquenté par les riches marchands locaux et des rentiers venus se détendre avant d’entamer les festivités qui s’annonçaient comme chaque soir. Ils soupaient de palourdes au citron et à la coriandre et de moules marinées à l’ail, arrosant le tout d’un blanc estalien de premier choix, lorsque Eggon posa la question qu’il ne fallait visiblement pas.

Tholot soupira bruyamment, posa calmement sa fourchette au bord de l’assiette, s’essuya les doigts et se massa les tempes.

-    « Eggon. On ne peut pas. On est trop vieux, trop cassés, oubliés. Et puis on est bien là, la belle vie, la bonne bouffe, le soleil, les filles. Te faut quoi de plus ? »

Le halfling rondouillard regarda son ami en répondant :

-    « Trop vieux mon cul. Je pète la forme, tout comme toi. Me raconte pas de conneries. Je t’ai surpris à de nombreuses reprises à te bouger le derch’ le matin, t’entretiens ton gros bide tout comme moi. A d’autres Tholot, à d’autres. »
-    « Ca ne veut rien dire… »
-    « Oh que si » - le coupa Eggon – « T’en rêves de remettre ça. T’en rêves tout comme moi. Mais avec cette différence que t’as peur, voilà tout ! »
-    « Conneries… »
-    « Non, je sais ce que je dis. On n’est pas trop vieux. Ça fait quoi, huit ans qu’on a arrêté ? En pleine forme qu’on était. Et on l’est encore aujourd’hui. Me faut quoi de plus ? J’ai tout ici, oué, et je me fais chier ! Je veux d’la baston, de la vraie, avec du sang. J’veux tâter du terrain, j’veux entendre l’effervescence de la foule, j’veux sentir l’adrénaline, la vraie, celle qui te bouffe les nerfs et qui te fait chier dans le froc, j’veux voir les adversaires dans le blanc des yeux, j’veux faire suer les connards d’en face, les faire rager, les entendre grincer des dents… »
-    « Les dents, c’est toi qui vas les perdre mon vieux si tu retournes sur le terrain. C’est ce que tu veux ? » - objecta son ami. – « Ok, je l’avoue, ça me manque aussi tout ça. Mais que veux-tu faire ? C’est trop tard maintenant. On est deux croûtons, deux vieux schnocks esseulés. Et on est des halflings. Des half-lings. Des putains de mi-portions qui ont, à un moment donné, eu un gros bol de tomber sur une bonne team et un coach qui en voulait. Mais y’a plus d’équipe. Y’a plus d’hommes-arbres, y’a plus de coach, y’a plus personne… »

Eggon leva alors les yeux vers son comparse, et un sourire béat apparut sur ses lèvres grassouillettes :

-    « Y’a plus personne… ? Tholot, mon pote. M’en veux pas trop. J’crois que j’ai fait une connerie. Regarde plutôt par-là » - dit-il en désignant le comptoir et en pointant son doigt boursouflé vers un homme trapu, vêtu d’une houppelande grise, qui leur tournait le dos.

***

-    « T’as pas fait ça ?! » - s’étrangla l’halfling ridé. – « Ne me dis pas que t’as osé faire ça ! Sans m’en parler ! Comment ? Comment t’as réussi à le retrouver ! ».

Visiblement choqué, Tholot criait presque, brisant la quiétude des lieux et faisant se retourner de nombreuses têtes des clients du restaurant, visiblement agacés par le ton soutenu de la conversation des deux amis.

-    « Bonsoir Tholot. Salut Eggon » - une voix familière et quelque peu plus enrouée que dans leurs souvenirs résonna dans le dos de Tholot. Ce dernier essaya de calmer ses mains tremblantes et les posant à plat sur la table. Il ferma les yeux et répondit d’une manière grave :
-    « Bonsoir coach. »
-    « Hey coach » - répondit jovialement Eggon. – « Ça fait un bail ! »
-    « Putain ouais » - accentua l’humain sur un ton sarcastique. – « Elles m’ont manqué, vos gueules d’bouzeux. »
-    « Et que nous vaut le plaisir de votre visite ? » - l’interrogea d’une manière faussement désinvolte Tholot. Le nouveau venu plissa le front : « Ça alors, il ne t’a rien dit Eggon ? Hein, mon vieux, tu ne lui as pas parlé. Tu ne lui as rien dit du plan ? Putain, j’en étais sûr. Alors là, c’est l’pied. Il ne sait vraiment que dalle l’Ancien ?! »

Tholot baissa les yeux et répondit gêné :
-    « Vous savez comment il est. J’ai pas trouvé le bon moment. J’voulais pas brusquer les choses… »
-    « Ça suffit ! » - gronda Tholot les lèvres plissées. – « Dites-moi de quoi en en retourne, merde, avant que j’pète un câble ».
-    « Calmes toi Tholot » - lui répondit posément l’autre semi-homme. – « L’coach, il va tout te dire. Calme-toi ».
-    « Ouais, j’vais tout te dire p’tit bonhomme » - répondit le dénommé Duda – « On revient dans la partie ! »

Sur ce, il se mit à rire, d’un rire jovial, d’un rire profond et franc, ce rire qui emporte tout sur son passage, qui entraine les foules et fait tomber les barrières. Et alors, les deux compagnons surent qu’ils étaient pris, piégés, volontairement ou non, et qu’il n’y avait pas de retour en arrière possible.

***

Revenus dans leur suite, les deux halflings se remettaient de leurs émotions en sirotant un cognac bretonnien adipeux à souhait, affalés dans des fauteuils en vieux cuir capitonné. En vérité, la discussion avec leur ancien coach avait tourné court. Si, au début, Tholot refusait catégoriquement toute évocation, ne serait-ce que minime, d’un retour aux affaires, il se fit rapidement à l’idée qu’il n’avait pas véritablement de choix. Il sentait que, quelque part, dans son petit cerveau tortueux, abimé par des années de coups à la tête, de cabosses, de châtaignes, d’alcool et de tabac, l’idée de refouler les pelouses germait calmement, attendant son heure pour surgir. Il lui fallait simplement un coup de pouce, un signe du destin, un élément externe qui la ferait jaillir telle la lance vengeresse de Kurnous (ou le chibre à Eddie face à un puceau), et cet élément s’était justement présenté ce soir, sous l’apparence d’un vieil humain desséché et dégarni, à la voix enrouée et au regard de glace, dont l’apparition pétrifia Tholot autant qu’elle le ravit.

Les dés étaient jetés. Le Reik avait été franchi. Oui, il le sentait maintenant, cette démangeaison sourde et insistante dans ses os et sous sa peau, cette onde de picotements qui lui descendait parfois l’échine, se fit bien plus forte et bien plus perceptible ce soir. Et, le pire, elle ne cessait depuis qu’il avait revu l’ancien coach. Il fallait qu’il se rende à l’idée – oui, il avait envie, très envie de revenir dans la partie. Il avait peur aussi. N’était-il pas, après tout, qu’un vieil halfling rabougri, qui a risqué sa peau (et plus encore) à chaque match, qui a eu bien de la chance d’en sortir vivant et intact d’une saison plus qu’éreintante ? Tout cela était vrai, plus que vrai. D’autres n’ont pas eu cette chance. Certes, le Real Boitar fut l’équipe en vogue du championnat, certes ils attiraient les foules, les sponsors et les journaleux. Certes, l’argent coulait à flots et les nanas se couchaient à leurs pieds. Mais ça avait duré combien de temps en vrai ? Une demi-saison à peine ? Et ça remontait à un bail – personne ne se souvenait plus d’eux. Et le pire dans tout ça, c’était qu’ils en avaient chié, vraiment chié.

C’est que le coach, ce n’était pas Bozo le Rigolo. Il leur en a fait baver durant les entrainements. Il leur a rentré d’la tactique dans le crâne, et à coups d’poings la plupart du temps. C’était un bon coach, mais sévère et dur avec ses joueurs, et colérique de surcroit. Alors, fallait-il retenter le diable ? Fallait-il de nouveau trimer tous les jours, à s’arracher les tripes sur la pelouse ? Risquer à nouveau sa peau et bien plus – son honneur – pour ressentir ce frisson d’adrénaline que ne pouvait procurer qu’un match de Blood Bowl ? Il n’en était pas certain, mais pardi ! Eggon avait raison ! Depuis qu’ils avaient raccroché les crampons, ils avaient profité de plaisirs que leur apportait le magot qu’ils avaient emmagasiné, mais ils s’emmerdaient dans ce lieu de retraite pour dandys arrogants, cet havre ou tout n’était qu’artifice et faux-semblants, rempli de pédants, de faux-culs et d’idiots vaniteux. En quelques phrases, le coach a su lui redonner le goût du combat, la soif du terrain, l’envie d’en découdre ! Par quel tour de magie cet acariâtre humain a pu, si rapidement, réveiller le joueur de Blood Bowl qui se terrait au fond des tripes de Tholot, restait un mystère. Mais il avait réussi !

Lâchant quelques ronds de fumée de cigare, Tholot sortit de ses réflexions en demandant à son ami :

-    « Comment qu’on fait alors ? »
-    « Comment qu’on fait quoi ? » - lui répondit ce dernier.
-    « Quoi, quoi ? Comment on rentre dans la danse, merde. On parlait de quoi à l’instant ? D’installer un atelier de découpe de volaille ? De monter un bar à putes ? Merde Eggon. »
-    « Bah, t’as écouté Duda, non ? On remonte la team ! »  - s’extasia ce dernier.
-    « Et par quels moyens, tu peux me le dire ? Nous ne savons pas où sont les autres gars, ni ce qu’ils font, comment va-t-on faire ? Se faire chier à recruter des bleus, les motiver, les former, non merci. Nous n’aurons jamais le temps avant le début de la nouvelle saison. Sans parler des hommes-arbres. » - répliqua avec dépit Tholot.
-    « Pas besoin » - Eggon lui fit un clin d’½il avant de se lever de son fauteuil. Il s’approcha d’une commode stylisée posée dans un coin du salon, ouvrit un tiroir et en sortit une boite en bois sombre, somme toute assez volumineuse, dont le couvercle était recouvert de dorures à motifs complexes.
-    « Vois-tu » - continua l’halfling poilu – « Moi aussi, j’ai mes secrets. » - Sur ce, il sortit de la boîte une pile de parchemins reliés avec un épais ruban rouge et les tendit à Tholot. – « Les gars, nous savons où ils sont… » - conclut-il avec un large sourire.

***

- « Et t’avais tout ça sans jamais m’en parler, sans, ne serait-ce qu’une seconde, évoquer la question avec moi ? » - Tholot faisait les cent pas dans leur salon, en fulminant dans son double menton, les mains tremblantes de rage.

Il avait parcouru avec attention et fébrilité les missives que lui avait passées son compère et il ne pouvait croire ce qu’il découvrait. Il s’avérait qu’en réalité, Eggon n’avait jamais coupé les ponts avec le coach, et qu’ils correspondaient régulièrement. Leur plan de remonter l’équipe ne datait pas d’hier, si l’on peut dire ainsi, dans la mesure où Duda avait suivi discrètement (les démons savent par quels moyens impies il s’y était pris !) tous ses anciens joueurs du Real Boitar et disposait d’un dossier personnel sur chacun d’eux. Et Eggon le savait ! Et Eggon n’avait rien dit ! L’enculé d’bâtard !

Cependant, heureusement qu’il était là, l’enfoiré. Heureusement il n’avait rien dit à Tholot, parce que, ce dernier aurait tout fait pour l’empêcher de correspondre avec le coach, il aurait exigé de tout jeter au feu, d’écrire à ce dernier qu’il pouvait aller pomper le dard à Slaanesh (ou au Doc’, au choix), et qu’il n’était pas question d’une quelconque idée même de remettre un crampon sur leurs pieds velus d’halflings, et ce même pour un match d’exhibition grassement payé.

-    « Putain Eggon » - rouspéta l’ancien – « T’es qu’un salopard de première, mais j’peux pas t’en vouloir. Cacher tout ça pendant tant d’années. Putain, vous l’avez sacrément bien préparé le plan, avec le coach, dis-moi. C’est quoi la suite alors ? »

Hilare, Eggon se grattait le nez en répondant – « On part demain mon pote. A la première heure. Hé oué. Tout est prêt. Les gars ne le savent naturellement pas, mais nous allons les chercher, tous les trois ! ».
-    « Tout est prêt, sans déconner ?! » - Tholot n’en revenait pas de ce qu’il découvrait. – « Comment ça ? Nos affaires ? Comment on voyage ? Quel planning ? Faut encore trouver un terrain, non ? Les sponsors ? Le staff ? Et les formalités d’inscription à la ligue ? Putain, mais Eggon, réveilles-toi ! Y’a un travail monstre à faire encore ! »

Soudain, la porte d’entrée de leur suite s’ouvrit à la volée et leur ex-ex-entraineur apparut sur le seuil. – « Calmes toi l’Ancien. Ne t’inquiète pas pour ça. J’ai tout arrangé. Tu crois vraiment que je serais venu vous chercher sans rien préparer à l’avance ? Tu crois que je me suis juste astiqué le gland pendant tout ce temps-là sans rien faire ? Quand Eggon te dit que tout est prêt c’est que tout est prêt. J’y ai veillé. Arrête donc de claquer d’la vulve pour rien. Vous n’avez plus qu’une mission, c’est de remonter la team, c’est d’aller chercher les gars là où ils sont et leur sortir les doigts de leurs gros culs ! Pour le reste, vous me laissez faire. » - Il s’avança dans la pièce et se servit une grande rasade de cognac posé sur la table-basse du salon. Il but le verre d’un trait et annonça d’une voix empreinte de gravité, le dos tourné aux deux-semi hommes, regardant par la baie-vitrée la nuit qui tombait dehors, éclairée faiblement par les lampions qui brillaient au loin dans le club-house où la fête battait son plein :

– « Je sais à quoi vous pensez les gars, surtout toi Tholot. Je sais ce qui trotte dans vos deux vieilles caboches torturées. Et ce qu’on ne fait pas une grosse connerie ? A quoi ça rime tout ça ? Courir après un ballon à la con tout en risquant de se faire fracasser à tout instant par ces connards de la Lutèce ? Quel intérêt, non ? Mais, je crois que je n’ai pas vraiment besoin de répondre à cette question. Ne vous inquiétez pas les rase-mottes. Ça va se passer différemment, cette fois-ci. Je vous donne ma parole. » - Il se tourna alors vers eux et les regarda droit dans les yeux, chacun leur tour.

– « J’ai un plan. Un putain d’plan. »

***

Ils furent réveillés à l’aube par des cris irascibles venant de sous leurs fenêtres, lesquelles donnaient sur un petit jardin botanique aménagé, où s’écoulait – d’habitude paisiblement – un minuscule ruisseau, formant ça et là des bassins d’eau remplis de nénuphars et de poissons exotiques. Mais en cette heure matinale, le bruit du cours d’eau était couvert par les hurlements de putois d’une voix qu’ils ne connaissaient que trop bien :

-    « Tholot ! Eggon ! Debout tout de suite tas de fouille-merdes ! A moins que vous ne vouliez que j’vienne vous tirer du lit par ce qu’il vous reste de bourses ! »

Assoupi, Tholot renâcla dans son lit en se redressant, tout en se frottant les yeux :

-    « Putain, ça fait à peine quelques heures qu’on l’a revu, et il nous fait chier déjà… J’sens qu’on fait une connerie là… »
-    « Oh putain. Dur. » - répondit son ami en se levant difficilement de son lit – « On a juste plus l’habitude. Tu sais comment il est. On a de la route à faire aujourd’hui. » - sur ce, il ouvrit la fenêtre et fit signe à l’agitateur pour lui signifier qu’ils étaient bien réveillés.
-    « Magnez-vous le derch’ les gars ! » - hurlait ce dernier comme si de rien était – « Et ne pensez pas que je vais vous laisser bouffer à votre guise. On monte en selle et on y va ! Vous mangerez en route, bande de goinfres ! »
-    « J’te jure » - persifla Tholot – « J’continue de croire que c’est une connerie… »

Ils firent rapidement leur toilette, empaquetèrent leurs derniers bagages et se hâtèrent de descendre, jetant, avec un certain pincement au c½ur, un dernier coup d’½il à l’entrée du salon de thé où ils avaient l’habitude prendre leurs petits-déjeuners. Une fois dehors, ils firent face à leur nouveau compère dont le visage s’éclaira d’un sourire vorace :

-    « Ça, c’est des bons gars, gentils, serviables et tout. Mais c’est qu’ils m’ont écouté, merde ! Je n’y crois pas ! »

Tholot en resta bouche-bée :

-    « Vous voulez dire qu’on s’est magné pour rien ? C’était un test, c’est ça ? Merde, coach, vous faites chier là, vraiment chier ! »
-    « Ouais, c’est dur » - enchérit son ami halfling – « Vous auriez pu au moins nous laisser manger un peu coach… Du coup… on peut retourner à la cafet’ ? »

L’humain sourit à pleines dents :

-    « Non, puisque vous êtes là, on y va ! Y’a de la bonne galette d’avoine dans les sacoches, vous allez vous régaler les mecs ! » - sur ce, il poussa un rugissement hilare, leur tourna le dos et s’en alla en direction des écuries.

Arrivés sur place, les deux halfings virent leurs montures déjà sellées et préparées pour le voyage. Deux mulets gris attendaient paisiblement près des box, et un troisième, portant tout un tas de paquetages, broutait un bout de pelouse non loin. Pour sa part, le coach grattait l’encolure d’une vieille et très moche jument à la robe alezane visiblement sale, et à la crinière hirsute, qui émettait des bruits somme toute étranges, entre le hennissement d’un cheval asthmatique et le rire d’une hyène alcoolique.

-    « Ah, ils sont là, ma belle. T’es prête ? » - il sauta avec agilité sur le dos de la jument, laquelle piaffa de manière encore une fois très singulière, en répandant de la morve et de la bave gluantes tout autour d’elle, visiblement impatiente à l’idée du trajet qui s’annonçait. – « Allez les mecs, vos montures sont prêtes ! »
-    « Il a l’air bizarre vot’ canasson, coach » - s’étonna Eggon avec un certain dégoût – « Qu’est ce qu’elle a à rire comme ça ? »
-    « Bah non » - répondit l’humain – « L’est normale c’te vieille carne, elle rigole juste tout le temps. »

Les deus halflings se regardèrent quelque peu circonspects.

-    « Elle a l’air de s’marrer, ouais. Et vous l’avez appelée comment, du coup ? » - demanda Tholot.
-    « La Marrante. Je l’ai appelée la Marrante ».

***

Sur ce, bonnes vacances les gars cool


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

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#13 28-07-2018 08:11:37

Laerthis
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Re: ANNONCE

C'est très bon smile

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#14 28-07-2018 14:57:24

Skarlan
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Re: ANNONCE

Putain! Écris un livre, t as déjà un lecteur!
J ai vu un livre sur une équipe de Blood bowl, l intrigue était bonne, le style Blood bowlesque, mais là! T es un cran au dessus!
Adieu la place de star du compte rendu de Lepropre...
T assures grave!


"La chance c'est pour les débutants"
on n’a jamais que l’âge auquel on a commencé à jouer aux échecs, car après on cesse de vieillir" Raoul Capablanca

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#15 28-07-2018 16:34:09

Drah
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Re: ANNONCE


Si l'adage "Malheureux au jeu heureux en amour" est vrai, prépare toi à te faire aimer très fort.
-Faites un don-

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#16 28-07-2018 18:53:16

Aredhel
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Re: ANNONCE

Je trouve le texte GENIAL, et cerise sur le gateau... la derniere allusion a un coach (si on peu appeler ca comme ca) connu


Le Genie (maléfique) de l'internationalement reconnue team "Les Experts Lutèce".

Sgt Taliesin : Après un match comme ça tu peux me tirer tout ce que tu veux mon grand mrgreen
vivement le tirage de la prochaine saison !!!!!

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#17 28-07-2018 19:54:58

Ankha
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Re: ANNONCE

Je me désinscris de la Lutèce Cup. Je refuse de voir Duda pleurer devant moi.

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#18 28-07-2018 22:57:34

SSB
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Re: ANNONCE

Excellent prélude au *come back* du Real Boitar ! smile


Si Dieu existe, j'espère qu'il a une bonne excuse…

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#19 29-07-2018 11:20:45

Scarabee
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Re: ANNONCE

Et bien ça m’a fait mon dimanche matin smile
Vivement la suite !
Surtout la partie du « plan », qui doit être rudement machiavélique pour espérer se frotter aux assoiffés de sang d’en face.


Scarabee, sinon, j'ai une nouvelle fois rien compris à ton intervention — Duda®2023

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#20 29-07-2018 12:33:06

Aredhel
Arbitre
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Flying RoubignollesLoose Spyral

Re: ANNONCE

son plan marche : Ankha a trop peur d'avoir une chance de l'affronter alors il demissionne...


Le Genie (maléfique) de l'internationalement reconnue team "Les Experts Lutèce".

Sgt Taliesin : Après un match comme ça tu peux me tirer tout ce que tu veux mon grand mrgreen
vivement le tirage de la prochaine saison !!!!!

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#21 01-08-2018 20:09:25

nicap
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Re: ANNONCE

Duda a écrit:

https://image.noelshack.com/fichiers/20 … ter-rb.jpg

Heureux d'être de retour ! wink

Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaannnnnnnnnnnnnnnnn

Mais je dois être SM parce que ça me fait trop plaisir lx

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#22 01-08-2018 20:11:25

nicap
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Re: ANNONCE

Azzroag a écrit:

Omg il.est de retour. Et avec des halfing

Tremblez messieurs. Tremblez

(Surtout nicap )

smile

toi tu fermes bien ta gueule lx

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#23 31-08-2018 18:20:58

Duda
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Re: ANNONCE

Hey les gars, merci pour vos commentaires. Très content que ça vous a plu ! wink

De retour aux affaires après un repos bien mérité, tenez - un "petit" cadeau rien qu'pour vous parce que j'vous aime bien. Je préviens : Prévoyez un peu de temps pour lire.

LE DIABLE EST DANS LES DETAILS

-    « Bon, au fait coach, vous allez nous dire maintenant c’est quoi ce fameux plan dont vous nous avez parlé ? » - Tholot posait cette question quotidiennement à leur nouveau partenaire en obtenant toujours la même réponse :
-    « Ferme la l’Ancien. J’vous dirai tout le moment venu » - la réplique cinglante de l’humain acariâtre ne se faisait jamais attendre.

Dans les faits, ils avaient voyagé durant une semaine entière à un rythme effréné et éreintant pour les deux halflings, pas habitués aux rudesses d’un voyage de plèbe. Or, le coach, pour des raisons connues de lui seul, avait préféré qu’ils assurent la route par leurs propres moyens, à dos de mulet, plutôt de de voyager confortablement en carrosse aménagé, comme c’était de coutume jusque-là pour les deux anciennes gloires du Real Boitar. Et si d’ordinaire, les coussins bien rembourrés, les rideaux de soie et les en-cas mielleux étaient les compagnons de route de nos deux amis, ils devaient aujourd’hui confronter leurs fondements grassouillets aux sursauts non coordonnés de leurs braves bêtes, luttant infatigablement pour porter les deux halfings dodus sur les routes cabossées du piémont nord des Irranas.

Nonobstant ces désagréments, le voyage se passait plutôt correctement. Le vent chaud et sec qui soufflait en cette fin d’été permettait de supporter la chaleur suffocante des après-midis ensoleillés et réchauffait agréablement les soirées et les nuits que nos compères passaient le plus clair de leur temps à bivouaquer autour d’un feu de camp. Le coach Duda avait visiblement décidé de mener la vie dure à ses deux acolytes fraichement recrutés et acceptait de s’arrêter dans les rares auberges qu’ils croisaient uniquement si la région traversée s’avérait inhospitalière pour des voyageurs esseulés (ce qui était, somme toute, rare – il faut le souligner).

En l’occurrence, une semaine de voyage permit à Tholot de s’habituer de nouveau tant au coach (et à son humeur accablante), que même à l’idée qu’ils allaient refaire le coup, qu’ils allaient remonter l’équipe et rechausser les crampons – et ce pour de vrai cette fois ! Finis les matchs d’exhibition, finis les tours de terrain pour les sponsors, finis les jeux de passe-passe pour amuser les fans, les éreintantes séances d’autographes et les interviews pour la presse spécialisée, ils retournaient au charbon, ils allaient regoûter à la sueur et au sang, ils allaient vraiment retâter du cuir – en tout cas dès qu’ils auraient récupéré les gars… ce en quoi le coach ne doutait pas, au contraire de Tholot…

C’est la raison pour laquelle, malgré la bonne ambiance qui accompagnait les trois amis durant leur voyage, Tholot ne cessait de questionner le coach sur la manière dont celui-ci comptait s’y prendre pour remotiver quatorze halflings fatigués de remettre les maillots du Real Boitar ! Pour l’heure, malgré un sourire de façade, la réponse était donc toujours la même de la part de l’entraineur.

-    « Bon, on arrive bientôt, donc vous la bouclez, les deux traine-savates » - le ton sec de ce dernier sortir Tholot de ses réflexions.

Ils arrivaient en effet en vue d’une bourgade quelconque, entourée d’une imposante palissade en bois et située sur une butte pierreuse, dressée au milieu de vastes champs de céréales. La route cahoteuse et poussiéreuse qui menait au portail d’entrée était bordée des deux côtés d’oliviers et de pêchers rabougris. L’entrée du bourg était gardée par deux factionnaires fatigués, suffoquant sous leurs brigantines cloutées et leurs larges casques plats. Ils s’appuyaient mollement des deux mains sur des lances plantées dans le sol, luttant visiblement contre le sommeil qui n’aurait pas tardé à les emporter sans l’arrivée impromptue des deux halflings et de leur coach. Dès qu’ils les aperçurent, ils hurlèrent quelque chose au garde placé dans la tour d’observation en haut du rempart, lequel s’était visiblement assoupi – lui. Lorsque les voyageurs arrivèrent à leur hauteur, un troisième garde sortit par la poterne située à quelques mètres de la porte d’entrée. Il reboutonnait encore sa chemise rebouclait sa ceinture tout en baillant aux corneilles.

-    « Doudiou, mais quek’ nous avons-là mazette !  C’est en quelle honneur vot’ visite mes bons sires ? » - les questionna le nouvel arrivant, avec un accent pittoresque qui fit sourire les deux halflings.

Mais leur entraineur ne laissa pas de place à l’incertitude :

-    « Conduisez-nous au bourgmestre caporal. Il me semble que vous avez un problème dans le coin, on est venus le régler » - la réponse du coach Duda – visiblement préparée – sonna lugubrement de manière théâtrale, de sorte que les trois gardes se dévisagèrent pétrifiés. Quant à Tholot et Eggon, ils tournèrent leurs regards vers l’humain, somme toute interloqués par la réplique de celui-ci. Il ne leur avait jamais parlé de régler un quelconque problème pour des bouzeux d’un patelin montagnard paumé au milieu de nulle part. Ils devaient retrouver leurs anciens joueurs et non pas jouer aux justiciers.
-    « Pfiouuuu, mais d’quel problème qu’vous causez nob’ seigneur. C’est qu’on est un ch’tit village paisib’, ‘veut pas d’soucis d’par chez nous. » - le caporal ne s’en laissa visiblement pas compter.
-    « Quel problème tu demandes ? » - rétorqua Duda – « Mais tu le sais bien mon brave, votre problème. Le problème. Le Démon ! ».


***

-    « Hé coach, c’est quoi ces conneries de démon ? » - intervint Eggon en chuchotant alors qu’ils suivaient le chef des gardes en sa faufilant entre les bicoques lugubres vers le centre du village. Le caporal, la mine visiblement effrayée, menait les trois amis par un chemin détourné, sans leur adresser la parole, en jetant de temps en temps un bref coup d’½il afin de vérifier que les trois voyageurs ne cherchaient pas à s’éclipser.
-    « Je vous ai dit de vous taire, les deux nabots » - rétorqua le coach humain entre les dents, la mâchoire serrée. Puis il reprit un ton plus enjoué, à l’attention de leur guide : « Mon caporal, pourquoi passer par ces petites venelles ? »
-    « C’est qu’d’cette façon-là, on évit’ les curieuses mes seigneurs ! Vous aut’ d’la grand-ville, vous pigez ça pour sûr ! Le bourgmest’, y’veut pas d’soucis ‘vec cette histoire-là ! » - répondit le soldat de manière sérieuse.

Arrivés sur la place du village, ils ne purent malgré tout échapper à quelques regards de villageois apeurés. Plusieurs portes claquèrent rapidement et les trois compères virent des silhouettes se faufiler hâtivement dans les entrebâillements. Ils s’arrêtèrent en face d’une bâtisse imposante en rondins de bois mal dégrossis, couverte d’un toit en chaume épais. Le caporal héla un gamin efflanqué aux pieds nus, qui était assis sur le pas de porte :

-    « Nicola, va appeler Janos et reviens-y t’occuper des canassons de ces nob’ sires ! Et fissa ! Z’ont à causer avec not’chef ! »

Une minute plus tard la porte du bâtiment s’ouvrit sur un humain ventripotent et dégarni, au visage boursouflé, vêtu d’une bure brune et quelque peu tâchée, sur laquelle apparaissait un motif délavé de ce qui devait être l’emblème du patelin – un écu aux trois épis d’or sur champ or et tanné tranché à la verticale. Sa panoplie était complétée par un imposant ceinturon soutenant sa volumineuse bedaine, auquel était attaché un trousseau de grosses clefs quelque peu rouillées. Suant à grosses gouttes et s’épongeant le front avec un bout de tissu fatigué, l’homme sourit aux trois voyageurs, découvrant des chicots brunis et abîmés :

-    « Soyez les bienv’nus dans not’ village Seigneurs ! Nous avons peu d’visit’ d’par chez nous, oui da ! En quoi j’peux vous z’aider ? » - les accueillit-il avec le même accent pittoresque que celui du caporal.
-    « Janos, c’est ça ? » - le questionna le coach Duda. – « Nous sommes ici sur ordres du Baron. Le problème à régler. »

La mine du bourgmestre se fit immédiatement plus sérieuse : « Aha. J’comprend’. V’nez, on va régler ça à l’intérieur. »

Toujours interloqués, mais n’osant pas intervenir pour le moment, les deux halflings suivirent leur entraineur et le dénommé Janos à l’intérieur du bâtiment. Ils furent installés dans la salle principale, une pièce carrée et plutôt spacieuse, dont les fenêtres étaient couvertes de rideaux épais ne laissant passer que peu de lumière. Quelques chandeliers éclairaient l’espace dans lequel planaient des particules de poussière, faisant éternuer les arrivants. Ils s’assirent autour d’une grande tablée sur des larges bancs en bois. Le bourgmestre prit place en soupirant bruyamment sur un fauteuil recouvert de cuir usé. Puis une porte latérale s’ouvrit, en un homme à la mine sévère et au menton rasé de près entra. Il portait une tenue militaire bien entretenue et amidonnée, et des bottes de cavalerie lustrés. Un baudrier cinglait sa taille, auquel était attaché un fourreau en cuir brun stylisé, qui laissait dépasser la poignée d’une rapière magnifiquement ouvragée et incrustée de quelques pierres précieuses. L’homme prit place derrière le fauteuil du bourgmestre, en reluquant les trois voyageurs d’un ½il sombre.

-    « Sacrébleu, quel’ fatigue mes aïeux ! Sires, voici comm’ qui dirait mon bras droit, l’sergent André, responsab’ d’la garde en chef ! » - Janos se tourna avec un sourire de façade vers le nouvel arrivant. Ce dernier fit un bref hochement de tête à l’attention des trois amis, puis reprit sa posture militaire. Le bourgmestre reprit alors la parole :
-    « On va vous servir à boire, c’est qu’vous devez êt’ rincés après tout c’chemin-là. Helga ! » - hurla-t-il en direction de la porte du fond – « Ramène z’y un broc d’eau et du gobelet ! Et magne-toi l’fondement. Nous avons à causer pour sûr, les M’ssires et moi ! »

Ils attendirent deux bonnes minutes dans un silence pesant, entrecoupé seulement par le bourdonnement agaçant des mouches et les grincements du fauteuil du bourgmestre qui se tortillait inconfortablement dessus. Puis, une villageoise ridée et voutée entra, portant un plateau en bois sur lequel étaient posés cinq gobelets et un cruchon en terre cuite. Elle déposa le tout sur la table et sortit en silence, suivie du regard par les participants à cette réunion improvisée.

Le gros bonhomme remplit les gobelets d’eau et reprit la parole alors que la porte se renfermait sur la vieillarde :

-    « Mille z’excuses nob’sires, mais on a rien d’aut’ que d’la flotte à vous prop’ser. C’est qu’les temps sont rudes avec tout’ c’te histoire vous voyez, hein. Plus d’bière, plus d’vinasse, z’ont rien à s’mett’ dans l’gosier nos gars… »
-    « Et si nous passions aux choses sérieuses, bourgmestre ? » - le coach coupa court aux palabres de l’humain rondouillard. Celui-ci fit la moue puis jeta un coup d’½il circonspect au sergent placé derrière lui. Un bref hochement de tête de ce dernier sembla convaincre le chef du village à parler :

-    « Bah, vou’ z’êtes du genr’ rapide. Bon ben, tant mieux tant mieux. C’est qu’si vous z’êtes envoyés par l’baron, j’veux dire M’ssire l’Baron, j’capte qu’vous connaissez l’fond de c’te affaire-là. »

-    « C’est-à-dire que… euh… si vous pouviez quand même préciser pourquoi on est là… » - intervint Tholot, qui paraissait de plus en plus réservé quant à leur présence dans ce coin paumé. Mais un simple regard de glace de son entraineur lui coupa net la parole. Le bourgmestre et le sergent saisirent toutefois la remarque de l’halfling et se regardèrent quelque peu médusés.

-    « Comment ça, Messires, le baron ne vous a pas informé de votre mission ? » - les questionna le dénommé André, en fronçant les sourcils.

-    « Naturellement que si, on connait l’affaire. » - répondit Duda, la mâchoire crispée. – « Mon… associé ici présent voulait seulement connaitre la vision des responsables locaux sur le problème rencontré. Nous vous écoutons donc. » 

Quelque peu rassuré, le bourgmestre reprit d’un ton légèrement alarmant :

-    « Oula, mais c’est qu’y’a rien à ajouter à ce que j’ai pipé au scrib’ du Baron. Y’a l’diab’ chez nous et faut nous z’en débarrasser ! Un point c’tou ! »
-    « Comment ça, le diable ? » - intervint Eggon en se relevant de son banc. – « Vous voulez dire un démon infernal vous attaque ? »
-    « Nous attaque… tout de suite… nooon, pas plu’ qu’ça. » - rétorqua le chef du village. – « J’veux dire y’a pas d’blessés. En tou’ cas, pas parmi nos gars quoi. Y’a just’ les chasseurs d’monstres et les aut’ chevaliers à la mords moi l’n½ud qui s’pointent d’temps en temps par ici et qui repart’ cabossés »
-    « Alors, quel est le problème ? » - l’interrogea Tholot, visiblement énervé par cette conversation qui lui semblait ne mener nulle part, et certainement pas sur un terrain d’entrainement.
-    « L’problème ?! » - Jonas sursauta presque sur son fauteuil. Il posa violemment son gobelet en renversant de l’eau autour de lui. – « C’est qu’c’est une sale bête c’te bestiole-là ! Ça fait cailler l’lait des vaches et ça vole les draps tout juste lavés ! Ça court derrière les gamines qui vont s’laver à la rivière et ça veut leur pincer l’fessier, non mais ! L’aut’ jour, ça a fait peur au vieux Marcel qui m’nait ses brebis au ruisseau, l’a perdu tous ses chicots l’pauv’ bougre ! Et sa bonne femme s’pleint que depuis, il la réchauff’ plus assez bien au pieu. Elle est obligée d’aller voir l’fiston du boulanger pour ses… hmm… besoins d’gonzesse qu’elle dit… »
-    « Et ce n’est pas tout. » - le sergent coupa court à cette énumération fort imagée des griefs. Le bourgmestre reprit son souffle, avala une gorgée d’eau et reprit en rotant bruyamment :
-    « L’sergent, l’a raison, pardieu ! C’est pas tou’. Il nous vole not’ houblon et not’ orge. »
-    « Nous y voilà. » - reprit le coach. – « Il vous vole vos récoltes et vous ne pouvez plus produire la picole que vous vendez au baron. On est d’accord ? ».
-    « Bah, c’est ça, oui da ! » – confirma Jonas avec résignation. – « C’est pour ça qu’y’a plu’ d’bière au village pardi ! On n’produit plu’ et on n’ven’ plu’. Du coup, plus d’recettes et l’village s’meurt, les gosses z’ont qu’la peau sur les z’os et les bonnes femm’ nous trait’ d’bons à rien… Alors faut nous débarrasser d’cette bestiole-là, pardi ! »
-    « Ah oué ?! » - intervint Duda en grimaçant. – « Et on peut l’trouver où, ce démon ? »

***
Ils furent installés à l’étage de la seule auberge du village, une bâtisse décrépie aux toit affaissé, gérée par deux frères jumeaux, aussi crasseux que bêtes, et dont la satisfaction du client n’était certainement pas le premier des soucis. Faute de clients, ils purent s’approprier la chambre commune, une vaste pièce remplie de lits superposés et de hamacs, située sous les combles de l’auberge.

La discussion avec le bourgmestre et son bras droit avait tourné court. Après s’être mis d’accord sur leurs émoluments, qui correspondaient nécessairement à ceux qu’avait fixé le baron et qui s’élevaient à mille couronnes en cas de réussite de la mission (avec preuve de l’extermination du démon), ils prirent les renseignements nécessaires leur permettant d’aller débusquer la bête.

Toujours interloqués, les deux halflings écoutaient paisiblement leur coach échanger avec les deux villageois sur le lieu où la bête était censée se tapir, à savoir un vieux château en ruine, abandonné depuis des lustres, et situé dans la montagne à plusieurs lieues du village. L’endroit semblait dangereux, car la route qui menait à l’antre était parsemée d’embuches et de pièges diverses, et le château lui-même avait la réputation d’être hanté… et ce sans parler du démon lui-même !

Après un repas frugal, composé d’un bol de gruau à la viande et au fumet fort douteux et à la provenance encore plus hasardeuse, sur lesquels nos trois amis préféraient ne pas trop s’attarder, ils firent le tour du village en tentant d’interroger les autochtones. En effet, malgré la prudence dont le caporal avait fait preuve pour les mener auprès du bourgmestre, les deux halflings et leur coach furent accueillis, à leur sortie de chez ce dernier, par une foule de curieux venus prendre des nouvelles. Le secret de leur arrivée fut visiblement rapidement ébruité. Les trois compères les interrogèrent donc sur ce qu’ils savaient du fameux démon. Toutefois, les villageois n’avaient eu que peu de détails à leur apporter sur l’affaire. La plupart étaient trop effrayés et les rares qui osaient parler décrivaient une bête venue tout droit des enfers, avec des cornes de bouc et une gueule remplie de crocs, qui hurlait comme un supplicié en agitant ses bras munis de griffes acérées. Quant à la femme du vieux Marcel, elle avait même parlé d’un monstre qui l’aurait violentée un soir avec son membre puissant et musculeux. Elle n'avait jamais autant… eu peur de sa vie !

De retour dans leur mansarde, ils se reposaient alors que la nuit venait de tomber sur la contrée, recouvrant les alentours d’un manteau brumeux laissant présager un lendemain pluvieux. Le vent s’étant apaisé, la nuit paraissait calme, toute activité du village ayant subitement cessée au crépuscule, le silence ambiant étant perturbé par les seuls cris d’oiseaux nocturnes et les ronflements des deux aubergistes – lesquels dormaient pourtant dans la cuisine au rez-de-chaussée.

-    « Bon, coach, on s’est bien amusés aujourd’hui, mais ne pensez-vous pas qu’il est foutrement temps de nous raconter ce qu’on fout là ? » - intervint subitement Eggon, la mine morose, alors qu’ils étaient allongés tous les trois sur leurs paillasses.
-    « C’est vrai Duda. Merde, on n’a pas la moindre idée de ce à quoi rime toute cette histoire. On s’retrouve dans un patelin paumé, rempli de bouzeux crottés, à des milliers de lieux de là où on devrait être, c’est-à-dire sur un terrain ! » - renchérit Tholot, visiblement agacé de la journée qu’il venait de passer.

Leur entraineur se leva de son lit et s’approcha de la petite fenêtre donnant sur la place du village. S’adossant au mur, il répondit en scrutant les alentours :

-    « Vous bilez pas les mecs. J’vous ai dit de m’faire confiance, alors faites moi confiance. On est là, parce qu’on est venus chercher les autres gars, je vous l’ai pourtant dit, non ? »
-    « Quoi ? » - s’étouffa Tholot et se redressant. – « Vous voulez dire que les anciens de la team de cachent dans ce trou pourri ? »
-    « C’est ça mon p’tit. C’est bien ça. Et j’ai comme l’impression que je sais où ils se cachent précisément. » - répondit l’humain en fronçant les sourcils.
-    « Où ça alors ? » - le questionna Eggon. – « Et puis quels gars seraient là ? »
-    « De ce que j’sais, Lorel est quelque part dans l’coin. En compagnie d’autres probablement. »
-    « Lorel ? Ce bon vieux poivrot d’Lorel ?! » - abasourdi, Tholot se releva de la paillasse en sautant presque. – « Mais lorsqu’on s’était quittés, c’était y’a quoi ? Quatre ans ? Il arrivait pas à mettre pied devant l’autre ! C’était une barrique sur pattes ! Plus large que haut qu’il était ! Et vous voulez qu’on le reprenne dans la team ?! »
-    « Exactement. » - la réponse du coach ne laissait pas de place au doute – « T’inquiète, on le remettra sur pied, comme vous tous. »
-    « Mais… » - voulut intervenir Eggon mais leur coach le coupa court :
-    « Vos gueules maintenant. Quelqu’un arrive. Tenez vous sur vos gardes les morveux. Eggon, prends ton gourdin et place toi à côté d’la porte. Tholot, tu restes où t’es. »

Effectivement, soudain, un léger grincement de la porte arrière de l’auberge se fit entendre, suivi de bruits de pas prudents dans l’escalier. Puis, quelqu’un toqua à la porte de leur chambre. L’entraineur humain alla ouvrir.

-    « Tiens donc. Bonsoir sergent. Que nous vaut votre aimable visite à cette heure tardive ? » - Duda accueillit le nouvel arrivant sur un ton quelque peu sarcastique. Le visiteur entra, droit comme un balai, jeta un bref coup d’½il à la chambre et à ses occupants, se campa au milieu de la pièce en se tournant vers le coach, puis prit la parole :
-    « Faut qu’on parle. Tous les quatre. »
-    « Ah, mais je sais bien qu’il faut que nous ayons une discussion. Je gage que celle-ci sera fort instructive pour nous. N’est-ce pas sergent ? » - répondit Duda sur le même ton narquois. Cela eut pour effet immédiat d’irriter le soldat, qui reprit entre les dents :
-    « Ne jouez pas à ce jeu avec moi, vagabonds ! J’les connais ceux comme vous. Vous croyez que vous êtes les premiers charlatans venus par ici ! »
-    « Hey, doucement mon bon, doucement… » - voulut intervenir Tholot.
-    « Attends l’Ancien. » - reprit le coach. – « Laisse parler notre sergent. J’crois qu’il a une proposition à nous faire. Une proposition du genre qui ne se refuse pas… C’est bien ça ? »
-    « Tout juste. » - aboya ce dernier. – « Voici, cent pièces d’or ». – dit-il en tendant une bouse qu’il cachait dans le repli de sa chemise. – « Prenez-là, et barrez vous d’ici. Tout de suite. » Le ton sec et directif employé par le soldat ne laissait pas de place à une quelconque discussion. Pourtant, l’entraineur ne s’en laissa pas compter.
-    « Voyez vous ça. Le chef de la milice locale essaye de corrompre les envoyés officiels du baron. C’est étrange ça, non les gars ?! » - le ton de Duda demeurait narquois.
-    « Arrêtez ça tout de suite ! » - le coupa le sergent. – « Je sais parfaitement que personne ne vous a envoyés. Je n’ai reçu… enfin le bourgmestre n’a reçu aucune missive de la baronnie. Et je gage que vous n’avez aucun document officiel sur vous. Alors, barrez vous de suite, si vous ne voulez pas d’emmerdes ! »

Soudain, le coach se rapprocha du militaire et le saisit par le col avec une rapidité fulgurante. Ce dernier voulut se libérer, mais Duda le maintint dans un étau de fer, fort étonnant pour un individu de son âge. Il prit alors la parole :

-    « Calme-toi, brave soldat. Regarde plutôt ça. » - fit-il en retournant un pan de sa houppelande, laissant découvrir le désormais célèbre logo de la Lutèce Cup. – « J’parie que tu sais très bien que c’est. Tu veux vraiment nous chercher des noises à nous ? » - finit-il en relâchant le sergent. Ce dernier écarquilla les yeux et reprit la parole :
-    « Ligue de Blood Bowl ? Mais qu’est ce que vous foutez là ? »
-    « C’est pas tes oignons ! » - reprit le coach. – « Nous ne partirons nulle part avant d’avoir réglé l’affaire avec votre putain de démon. »
-    « Mais nous ne voulons pas que vous régliez quoi que ce soit ! Compris ?! » - rétorqua le sergent au grand étonnement des deux halflings. Eggon questionna alors, totalement abasourdi :
-    « Doucement sergent, doucement. Comment ça, vous ne voulez pas vous débarrasser du fléau qui attaque le village ? »
-    « Et non, Eggon. » - intervint Duda. – « Notre grand soldat que voici va nous expliquer que la situation est parfaitement maitrisée et que si on s’en mêle, on va avoir des soucis, des gros soucis… C’est bien ça ? » Le sergent lissa sa chemise quelque peu froissée par le coach et reprit la parole sur un ton assez imposant :
-    « Parfaitement. Nous maitrisons la situation. Soit vous vous barrez d’ici demain à l’aube, soit… on vous fera partir, et dans un sale état. »
-    « Ecoutez moi bien sergent. » - reprit le coach. – « Vous pensez vraiment que nous sommes venus là sans prendre des précautions ? La Ligue connait parfaitement la situation, et c’est elle qui nous a envoyée. Pigé ? Si on est là, c’est pour une bonne raison, qui ne vous regarde pas. S’il nous arrive quoi que ce soit, vous allez voir débarquer ici un peloton entier d’lanciers impériaux. C’est ce que vous voulez ? »
-    « Je ne vous crois pas. » - riposta sèchement le soldat.
-    « Vous prenez le pari ? » - le questionna l’entraineur.
-    « D’accord. Si c’est ce que vous voulez, restez ici ! » - siffla entre les dents son interlocuteur. – « Je vous aurai prévenus ! » Sur ce, il sortit en claquant la porte sans un regard pour ses occupants.
-    « Putain, c’est quoi cette histoire encore ?! » - souffla Tholot, totalement interdit.
-    « Ça, c’était le vrai comité d’accueil. » - répondit sur un ton énigmatique le coach en grimaçant.

***

Ils prirent le chemin de la montagne au petit matin, sous un ciel ombrageux. Le bourgmestre et quelques villageois s’étaient rassemblés près du portail d’entrée pour leur souhaiter bonne chance. Le sergent André était là également, accompagné du caporal et de quelques gardes. Il ne pipa mot, mais son regard lugubre et menaçant était suffisamment parlant.

-    « On va faire un petit détour les gars. » - intervint le coach en mettant fin au silence ambiant, alors qu’ils voyageaient à dos de leurs bêtes depuis environ une bonne heure.
-    « Pourquoi ça ? » - le questionna Eggon – « Vous pensez qu’on nous a tendu un piège sur la route ? »
-    « Y’a d’ça. Possible. Mais en réalité, j’veux perdre un peu de temps. Nous ne sommes pas pressés. Et si mon instinct ne me trompe pas, je souhaite laisser le temps au démon de se préparer. » - reprit mystérieusement Duda.

Ils s’arrêtèrent ainsi quelques moments au bord d’un ruisseau pour s’alimenter en laissant leurs montures s’abreuver. Puis ils reprirent la route par un vallon rocailleux qui serpentait entre les monts environnants, alors que le temps tournait à l’orage. Effectivement, quelques minutes plus tard, il se mit à pleuvoir dru et les trois amis durent se réfugier sous un affleurement rocheux qu’Eggon réussit à dénicher, le temps que l’averse passe.

L’après-midi débutait alors que les trois voyageurs arrivèrent en vue d’une route étroite et cabossée qui montait abruptement vers une corniche que l’on apercevait au loin, perchée au-dessus d’une falaise, et qui menait plus haut dans la montagne. Au loin, une chute d’eau dévalait les pentes abruptes de l’escarpement.

-    « Je pense qu’on est sur la bonne voie. » - intervint le coach en réajustant sa capuche. – « C’est certainement la route du château dont nous a parlé le bourgmestre. A partir d’ici, on entre sur les terres du démon… »
-    « Des précautions ? » - le questionna Tholot.
-    « On avance doucement et on regarde au sol. » - répliqua l’humain. – « Y’aurait des pièges disposés sur le chemin, parait-il. »
-    « Et cette route mène où après ? » - demande Eggon.
-    « Si nous ne sommes pas perdus, la corniche débouche sur un haut plateau. Le château devrait être situé de l’autre côté de celui-ci, au bord d’une rivière. La cascade que vous voyez là-bas… » - dit Duda en tendant la main – « En principe, c’est ce cours d’eau. Maintenant, on y va les mecs. »

Ils avancèrent jusqu’au début du chemin menant à la corniche, et purent ainsi apprécier le grand tertre qui se trouvait au bord de celui-ci, recouvert d’ossements, dont certains paraissaient humains, et orné de plusieurs crânes d’animaux. De sigles mystérieux étaient grossièrement peints en rouge sur la pierraille. Plus loin, la route était bordée çà et là de poteaux en bois sur lesquels étaient accrochés divers colifichets, plumes d’oiseaux, peaux de bêtes et autres babioles extravagantes, censés probablement faire renoncer les curieux à explorer plus en avant le chemin. Ces signes menaçants ne firent toutefois aucun effet sur les trois comparses, qui s’engagèrent sur cette étrange route, tout en surveillant attentivement les alentours. Au bout d’une dizaine de minutes, ils tombèrent sur le premier obstacle dressé sur leur chemin. Celui-ci était effectivement parsemé, un peu partout sur une centaine de mètres, de vieux pièges à loups rouillés, des collets et autres chausse-trappes, totalement abimés, rouillés, brisés ou entièrement démontés, et qui visiblement ne pouvaient fonctionner d’une quelconque manière, et encore moins blesser qui que ce soit.

-    « C’est quoi ces conneries ? » - Tholot questionna ses deux autres compagnons alors qu’ils mettaient pied à terre. – « C’est censé attraper quoi ? »
-    « Mais c’est… » - intervint Eggon
-    « D’la merde. C’est d’la merde. » - compléta leur coach.
-    « Chiotte, mais regardez ça les gars ». – Tholot avança de quelques pas et s’accroupit près de quelque chose qui ressemblait à des rigoles creusées dans la route, que les pluies du matin avaient remplies de petites flaques d’eau. – « On dirait des traces de roue. »
-    « C’est clair. » - riposta l’autre halfling avec circonspection. – « C’est visiblement des traces d’un chariot. Et y’en a pas qu’un peu. Et regardez, y’a aussi les empreintes d’un canasson ferré. Elle semble bien fréquentée, cette route hantée. »
-    « A moins que l’démon ne se déplace en roulotte, qui sait. » – répondit Duda sur un ton sibyllin. – « En tout cas, ça pue. Avançons ».

Ils cheminaient désormais sur la corniche menant au haut plateau. La route paraissait suffisamment large pour permettre à deux chevaux de trotter de front, mais le coach les fit avancer les uns derrière les autres, au cas où. Il ouvrait la marche, suivi de Tholot, Eggon étant chargé de surveiller leurs arrières. Les traces des roues d’un chariot, et les empreintes d’une bête de somme demeuraient clairement visibles un peu partout.

L’incident se produisit alors qu’ils tournaient à gauche à un angle de la route. La jument de Duda hennit soudain, sa cabra en désarçonnant presque son cavalier, et fit une embardée qui sauva probablement la vie de ce dernier. Au même moment, un énorme rocher dévala la falaise, vint s’écraser à quelques pas de la monture du coach, puis poursuivit son chemin plus bas, le long de la pente abrupte qui menait à la vallée.

-    « Ho putain ! » - hurlèrent les deux halflings de concert. – « Coach, ça va ? »
-    « Tout doux, tout doux la Marrante. Brave bête, ça c’est une brave bête. » - l’entraineur avait toutes les peines du monde à calmer sa monture effrayée, lui tapotant le cou et caressant sa crinière, alors que l’animal piétinait dangereusement au bord du précipice. Quelques secondes plus tard, le cheval s’apaisa fort heureusement pour son cavalier, mais continuait à remuer la tête et à hennir bizarrement, en expédiant de la bave tout autour de lui.

Ils avaient beau relever leurs têtes, les trois amis ne voyaient rien qui aurait pu provoquer la chute du rocher. Le coach reprit alors la parole avec scepticisme :

-    «  Pfff. Quel manque de créativité. On aurait dit un piège sorti tout droit d’une série B bien pourrie. »
-    « Sorti d’où coach ? » - l’interrogea Eggon, interloqué.
-    « Cherche pas, vous comprendriez pas. En tous les cas, on est visiblement pas les bienvenus ici. Heureusement que je l’ai cette vieille carne. Tu viens de m’sauver les miches ma grande. » - dit-il en grattant sa monture derrière les oreilles, au grand plaisir de cette dernière, qui hennit de plus belle.

Le reste du chemin se passa sans entraves. Ils débouchèrent ainsi, après quelques dizaines de minutes de marche prudente, sur un plateau parsemé d’hautes herbes, niché entre les parois abruptes des monts environnants. Au loin, un torrent rapide dévalait la montagne, coulait au travers du plateau, et se transformait en une impressionnante chute d’eau qui tombait dans la vallée en contrebas. Pas très loin de celle-ci, posé sur une petite butte, un lugubre château en ruine attirait l’½il.  Bien qu’il fût assez lointain, on apercevait néanmoins avec aisance son état de délabrement avancé. Ses deux tours semblaient effondrées et ses murs en pierre noire étaient parsemés de trous et fissures imposantes. Les deux battants du portail d’entrée étaient sortis de leurs gonds et pendaient dans le vide, tels deux malheureux suppliciés, accrochés seulement par d’énormes chaînes en fer, laissant ouvert aux quatre vents le tunnel d’entrée, d’une noirceur inquiétante.

Le vent soufflait fort sur les hauteurs, faisant voler les capes des trois voyageurs, qui partirent au petit trot en direction des ruines, en suivant un petit chemin de terre battue, sur lequel les traces de roues et d’empreintes d’animaux de bat étaient toujours visibles par endroits. De temps à autre, ils firent un léger écart, afin d’éviter des bouts d’ferraille et des vieux pièges à loup rouillés, visiblement hors d’état de fonctionner. Cela mise à part, personne ne vint à leur rencontre et aucun incident ne fut à déplorer lorsqu’ils arrivèrent au torrent. Quant au fameux démon, ils ne virent même pas la queue. La route s’arrêtait net au bord de l’eau et semblait continuer sur l’autre rive, à une dizaine de pas. Un gué peu profond, et parsemé de grosses pierres plates, permettait de traverser le cours d’eau en toute tranquillité, semblait-il. Duda mit en garde les deux halflings :

-    « Ça m’a l’air suspect tout ça. C’est trop calme. Il pourrait y avoir un bon gros piège dans la flotte. J’passe le premier. Vous me suivez seulement lorsque j’aurai traversé. »
-    « Pas d’soucis coach. » - répondit Tholot. – « Mais franchement, vu comment ça se présente jusque-là, y’a rien à craindre. Ça frôle l’amateurisme quand même toute cette… ».

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase, lorsqu’un bruit strident à s’arracher les oreilles leur vrilla les tympans, faisant ruer leurs montures. Puis un hurlement torturé se fit entendre. Une brume épaisse apparut tout à coup de l’autre côté du torrent et dont sortit… le diable !


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

Hors ligne

 

#24 31-08-2018 18:23:01

Duda
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Re: ANNONCE

La suite (parce que vous imaginez bien que ça ne finit pas comme ça).

L’affreuse bête s’avança de quelques pas dans l’eau, marchant de manière quelque peu rigide, couverte d’un épais tapis de poils bouclés. Elle hurlait telle un écorché vif en agitant des bras étrangement petits et peu proportionnés au reste du corps, mais qui finissaient par des serres visiblement acérées. Sa face hideuse était tordue en un abominable rictus et de sa bouche dépassaient deux énormes canines pointues. Des yeux globuleux et injectés de sang fixaient les trois amis. Deux cornes massives et recourbées pendaient de chaque côté du crâne du démon.

-    « Alleeez vous-ennnnn ! » - hurlait-elle dans un concert aigu de sons venus de toutes parts – « Ou subisseeeez la colèrrrrre des enfeeeeers ! »
-    « Et si t’arrêtais ton cinéma, l’monstre ? » - l’invectiva le coach en descendant de sa jument, qu’il réussit à calmer tant bien que mal.
-    « Coach, faites gaffe ! » -  cria Eggon effrayé à l’attention de leur entraineur qui s’avançait avec assurance dans l’eau. – « Qu’est ce que vous faites ? Vous êtes dingue ! ».

Le démon reprit ses hurlements :

-    « Plus un pas malheurrreux ! Je vais vous dévorrrer morrrtelll ! »
-    « C’est ça ouais. Et moi, j’suis le célèbre King Phanos. » - continuait le coach en avançant doucement vers le monstre.
-    « Qu’est ce que tu as dit ? » - le démon cessa tout à coup de s’agiter. – « Vous êtes qui au just… oh PUTAIN !!!! »
-    « Bon, allez mon con. Enlève-moi tout ça et arrêtons cette mascarade. » - l’invectiva Duda en plissant les yeux.

C’est ainsi que, sous les yeux médusés des deux halflings, le diable agrippa ses deux cornes et enleva sa tête, faisant tomber de stupéfaction les mâchoires des semi-hommes. En effet, sous le masque démoniaque venait d’apparaitre le visage rubicond et boursouflé de… Lorel Bonvin.

-    « Lorel ! » - hurlèrent-ils de concert. – « Lorel, c’est nous, Tholot et Eggon ! Et le coach ! Lorel, qu’est-ce que tu fous-là ?! »

Lorel revint sur la berge et se défit de son accoutrement hétéroclite, permettant à ses anciens collègues d’apercevoir qu’il était planté sur des échasses, savamment dissimulées sous une épaisse peau de bête et d’amples frusques recouvrant la partie antérieure de son accoutrement. Il semblait autant étonné qu’eux de leur visite, sinon plus, et paraissait très mal à l’aise.

-    « C… c… comment vous m’avez retrouvé les mecs ?! » - les interrogea t-il ébahi. – « Et qu’est ce que fous faites là bordel ! »
-    « Ça suffit Lorel. » - le coupa le coach. – « Mène nous dans ta baraque, qu’on t’explique tout. A toi et aux autres gars. »

***

A leur entrée dans la cour délabrée du château, ils furent accueillis par des aboiements déchaînés d’une meute de limiers, enfermés dans des cages métalliques adossées aux murs d’enceinte. Les nouveaux arrivants purent ainsi admirer les lieux et l’état de délabrement général dans lequel se trouvait la demeure. De partout se dressaient des empilements de caissons et de barriques en bois, disposés à l’emporte-pièce sans aucun souci visible de rangement. Un chariot fatigué était garé dans un coin de la cour donnant sur une arche qui apparaissait être l’entrée des écuries, à en croire les tas de foin et de paille jetés négligemment sur un côté de l’entrée, et les amas de crottins étalés sur tout le pourtour de celle-ci. L’infernal boucan avant heureusement cessé. Alors que les trois voyageurs mettaient pied au sol, des cris de joie venant du donjon se firent entendre. Puis, trois halflings déboulèrent, poussant des hurlements et agitant les bras dans tous les sens.

-    « Tholot, Eggon ! » - vocifèrent-ils. – « Mais c’est incroyable ! On pensait ne jamais vous revoir ! »
-    « Calben, Posho, Afka ! » - répliqua Eggon avec enthousiasme. – « Ha, mes couilles ! Dites-moi pas que c’est pas vrai ! »

S’en suivirent des franches accolades entre les anciens partenaires de jeu, des tapes dans le dos, des pichenettes et autres embrassades, le tout sous l’½il amusé du coach Duda, qui demeurait pour l’instant à l’écart. Les questions fusaient dans tous les sens, dans un brouhaha indescriptible, auquel l’humain mit fin :

-    « C’est moi qui vous ai retrouvés, les rase-mottes. Je suis content de voir revoir aussi, bande de saligauds, mais faut qu’on cause. » - fit-il sur un ton énigmatique. Les regards des semi-hommes se tournèrent vers lui, pour certains fort circonspects.
-    « ‘Jour coach. Ravis d’vous voir aussi, hein. Ça fait un bail ! » - répondit Calben sur un ton bourru que ses amis connaissaient si bien. – « V’nez à l’intérieur. Vous d’vez avoir la dalle, non ? Afka, mon p’tit, file aux cuisines ram’ner un truc à grignoter. Et d’la binouze ! Faut qu’on s’désaltère l’gosier ‘vec toussa ! »

Ils furent amenés par leur quatre hôtes à l’intérieur du donjon, une vaste tour carrée, de trois étages, aux fenêtres étroites et au toit en pente recouvert partiellement d’ardoises noires, et dont les trous béants faisaient apparaitre les poutres de soutènement. Ils s’installèrent dans la salle commune, dans laquelle étaient disposées plusieurs grandes tables en bois, recouvertes d’une panoplie d’appareillages de brassage en plus ou moins bon état. Une imposante cheminée ouvragée occupait une grande partie du mur du fond, et dans le foyer de laquelle gisaient quelques rondins de bois calcinés. Sur le côté droit de celle-ci, un escalier en pierre démuni de rambarde menait vers une porte située à mi-hauteur, laquelle semblait conduire aux étages supérieurs. Sous l’escalier, une autre porte, bien plus grande, était entrebâillée et laissait apercevoir un escalier chichement éclairé par quelques torches, menant aux sous-sols.

Ils s’installèrent tous autour d’une table près de la cheminée et firent grand honneur aux mets apportés par leur compère, en dévalisant les plats de saucisses, de formages et de tourtes froides, et en arrosant le tout de plusieurs pintes de bière fraîche. L’ambiance était plus que joviale, les six halflings se remémorant les anecdotes de leurs aventures passées et racontant chacun, presque en même temps, quelques bribes de leurs péripéties depuis qu’ils s’étaient perdus de vue.

-    « Mais au fait. » -  s’interrogea Eggon. – « Vous tenez ça d’où, cette bière les gars ! J’croyais qu’y’en avait plus dans le coin. »
-    « Bonne remarque, Eggon. » - intervint le coach. – « Faut que nos amis nous expliquent. »
-    « Ba ! Vous voyez, non ? » - répondit alors Afka, tout enjoué. – « On la fabrique nous-mêmes ! »

Tholot eux un hoquet de surprise et recracha la mousse qu’il venait d’avaler.

-    « Attendez les mecs ! Vous voulez dire que tout l’pognon que vous vous êtes mis dans les poches quand on jouait, vous l’avez investi dans ce coin perdu, pour fabriquer de la binouze pour des pécores ! »

Les quatre hôtes baissèrent leurs têtes en se grattant le cou et en détournant le regard, visiblement gênés.

-    « C’est-à-dire que… la tune… » - rétorqua finalement Lorel – « On l’a quelque peu… dilapidée… »
-    « Alors vous êtes venus ici. » - reprit l’entraineur.
-    « Pour sûr mon gars ! » -  réagit Calben sur un ton toujours aussi rêche. – « On a déniché c’trou à rats puis on a monté not’affaire ! »
-    « Et cette histoire de diable, alors ? » - fit Tholot interloqué. – « Ca rime à quoi ça ?! »
-    « Allez, dites-leur les mecs. » - répliqua Duda. – « On est entre vrais amis, non ? »

-    « Fermez-là ! » - hurla soudainement une voix sèche, qui venait de la porte d’entrée. Toutes les têtes se tournèrent instinctivement pour voir apparaitre sur le seuil deux visages que les trois voyageurs connaissaient parfaitement.

Le sergent André venait de faire son apparition, suivi par la masse ventripotente du bourgmestre Jonas.

-    « Qu’est ce qu’ils font-là ceux-là ?» - aboya le soldat en avançant dans la pièce. – « Je vous ai dit de vous en débarrasser au plus vite ! Ils ont réussi à éviter mon rocher ? Comment ? Et pourquoi vous n’avez pas encore lâché les chiens ! »
-    « Rebonjour Sergent. Votre pièce n’a malheureusement pas si bien marché que ça. A dire vrai, je m’attendais un peu à vous trouver là. » – intervint le coach. – « Mais pas vous, bourgmestre. Je suis attristé, en réalité, de vous voir. » - dit-il en direction de ce dernier, lequel paraissait manifestement très gêné par la situation.
-    « Boucle-là vagabond, où je t’embroche net ! » - beugla Jonas en postillonnant.
-    « Doucement sergent. » - répondit Lorel. – « Vous ne nous avez pas dit qu’il s’agissait de nos amis ! Y’a rien à craindre d’eux, ils sont avec nous ! »
-    « Pas question ! » - riposta vivement le sergent. – « Ils sont une menace pour notre affaire ! J’veux pas de témoins ! ». Il s’avança encore plus près, menaçant, et saisit la poignée de sa rapière.

Un couteau de jet voltigea alors dans les airs et vint se planter dans la paume du militaire, qui hurla de douleur en saisissant son poignet de l’autre main. Faisant preuve d’une agilité déconcertante, le coach était déjà debout après son lancer, et se jeta sur le blessé. Trois coups bien placés suffirent à estourbir le sergent, qui s’affala inconscient sur le plancher.

-    « Attachez-moi ça et foutez-le près de la cheminée. » - ordonna le coach aux halflings médusés. Puis, il se tourna vers le gros bonhomme, qui demeurait immobile, le visage totalement blême, les yeux grands ouvertes, haletant et suant à grosses gouttes :
-    « Pitié Sire ! Pitié, ne fait pas mal au pauv’ Jonas ! » - supplia-t-il en courbant l’échine et en jetant des coups d’½il très inquiets aux halflings.
-    « Vous me décevez vraiment, bourgmestre. » - répliqua Duda dans un rictus sauvage. – « Soyez gentil et prenez place sur un banc. Vous allez tout nous expliquer tranquillement maintenant, n’est-ce pas ? » - conclut-il sur un ton qui ne laissait pas de place au doute. »

Une fois l’énorme carcasse de Jonas bien installée entre Calben et Eggon, qui le pressaient de près, le coach fit signe à Lorel de poursuivre le récit de leurs aventures.

-    « Bon, comme j’disais avant d’être interrompu. » – reprit ce dernier, légèrement interloqué, en se resservant une rasade de bière pour s’éclairer les esprits après l’incident auquel il venait d’assister. – « On était dans la déch’ les gars et moi. Rappelez-vous, on s’était quittés y’a quoi ? Quatre ans de ça ? »
-    « Ca doit faire ça environ » - le coupa Tholot, quelque peu dubitatif. Lorel hocha la tête :
-    « Ouep, quatre ans. On avait un peu marre de glander et d’rien foutre. Se prélasser dans des clubs et palaces, ça a du bon, mais au final, on s’emmerdait. »
-    « A qui l’dis tu ! » - enchérit Eggon avec grand sourire. – « J’arrêtais pas de le lui répéter, à Tholot ».
-    « ‘Fin bref, on s’était quittés bons amis et on a fait notre chemin, Posho, Afka, Calben et moi. Mais, rapidement, nous sommes tombés à court de finances, j’pense que vous comprenez. »
-    « Vous avez tout claqué en putes et alcool, en gros ». – riposta Thlolot perplexe.
-    « Héhé, on peut dire ça ! » - poursuivit Lorel en souriant. – « Alors, on a eu l’idée d’monter une affaire. Au début, on ne savait pas trop quoi faire, puis, par hasard, on est tombé sur le village de ces deux-là. » - dit-il en agitant le menton en direction du bourgmestre et du sergent. – « Un trou paumé, comme vous l’avez vu. Que des demeurés et pas l’ombre d’un quelconque danger sérieux à des lieues à la ronde. Un village d’bouzeux peut-être, mais qui avait l’incroyable avantage de faire une excellente bière, et même de l’eau-de-vie ! Alors, j’ai eu l’idée du siècle. Rappelez-vous, lorsqu’on jouait chez nous en amateur, j’faisais quoi dans la vie moi ? »
-    « Tu bossais dans la brasserie du Père Honorin... » - répliqua Tholot, qui commençait à comprendre de quoi il retournait.
-    « Tout juste mon vieux ! C’est que la boisson, c’est mon affaire ! » - reprit Lorel avec enthousiasme. – « Alors, quand on a vu ces champs d’orge et ces plants d’houblon cultivés par quelques pouilleux, on a monté ce coup. Fallait juste trouver un endroit tranquille où produire et corrompre les bonnes personnes pour ne pas être dérangés. Puis inventer quelque chose pour qu’on nous fiche la paix. »
-    « D’où l’idée du diable. » - rétorqua le coach humain. – « J’imagine que le bourgmestre vous a bien aidés pour tout ça. »
-    « Oh que ouais ! » - répondit Lorel en reluquant l’humain rondouillard. – « Il était plus qu’intéressé par notre projet. C’est d’ailleurs lui qui nous a dégoté cette bicoque tranquille. ». Ce dernier s’agitait nerveusement sur son banc, mal à l’aise, mais n’osant pas intervenir sous les regards lugubres de ses tortionnaires.
-    « Par contre, on a vite compris qui dirigeait les affaires par ici. Jonas ne faisait rien sans que le sergent ne soit au courant. Par chance, ce dernier était encore plus facile à approcher. On se l’est mis facilement dans la poche. L’appât du gain que ça s’appelle. C’est que la solde du baron, c’est pas folichon. Alors, avec les quelques fonds qui nous restaient, on a investi dans du matos, une bonne cariole – les canassons, on les avait – et le tour était joué. Ne restait plus qu’à… piquer l’orge et le houblon aux villageois. »
-    « Et c’est là que l’histoire avec le démon intervient, j’imagine ! » - s’exclama Eggon.
-    « Et comment mon vieux. » - sourit Lorel. - « Lorsque Posho nous a présenté son idée, on s’est pissés dessus de rire. Tellement c’était improbable. Mais ça a marché, et d’enfer, si j’peux m’le permettre ! »
-    « Bien pratique ce diable, je gage. » - l’interrompit Duda. – « Cela vous permettait de refourguer la production en douce, ni vu ni connu. »
-    « Exact coach ! » - s’esclaffa l’halfling joufflu. – « L’affaire était en or. On vendait comme s’il s’agissait de la production locale, et notamment au baron. Et toutes les taxes étaient versées par le bourgmestre, sur le dos des pécores du village. De toute manière, ils y comprennent rien à la comptabilité ces cons là. La baronnie n’y voyait que du feu et pour nous, c’était net d’impôt ! »
-    « Et ce putain d’son des enfers qui nous a accueilli tout à l’heure ? Et cette brume ? » - demanda Tholot.
-    « Bah, c’est simple. » - précisa Lorel, hilare. – « En arrivant ici, on a trouvé un vieil orgue délabré dans les étages du donjon, mais qui fonctionnait encore tant bien que mal. Afka a essayé d’en jouer et ça a foutu un de ces boucans ! Le son se répercute sur les parois des montagnes tout autour, et ça fait cet effet-là. On s’était dit que c’était un excellent moyen pour faire fuir les petits curieux. Quant à la brume, juste un tour de passe-passe à coup d’fumigènes. »
-    « Donc vous étiez tranquilles en somme. Et personne n’a envoyé de soldats, des répurgateurs ou même des chasseurs de démons ? » - s’étonna Eggon.
-    « Bah si. Y’en a eu du chevalier et du mercenaire venus tenter leur coup. » - répondit Lorel. – « Dites-leur, bourgmestre. » - fit-il en s’adressant à ce dernier.

Le gros humain prit la parole, en marmonnant dans son double menton :

-    « Ah M’ssires ! La plupar’ d’ceux qui s’pointaient z’y connaissaient rien en chasse aux monstres ! D’la chienlit d’charlatan, pour sûr ! Ils v’naient, f’saient leurs beaux z’yeux aux gamines, mais à la première rencontr’ ‘vec l’diab’, ils prenaient leurs jambes à leur cou et s’barraient plus vit’ q’leur canasson. »
-    « Mais y’a quand eu quelques pros qui sont venus, non ? » - demanda Duda intéressé.
-    « Oui da ! Quel’uns. Ceux-là, s’faisaient amadouer par une jolie bourse bien remplie. Quant aux aut’, les inrock.. les incropu… »
-    « Les incorruptibles. » - lui souffla le coach.
-    « Les incroptuptibles, comm’ vous l’dit’ sire. » - reprit le bourgmestre. – « Bah, faut un exemp’ des fois. Alors l’sergent y’s’en chargeait… » - finit-il à regret, en s’affaissant sur son banc.

-    « Mais quand même, les gars ! » - intervint Tholot médusé. – « Et ces histoires de gamines que vous auriez tripotées ? »
-    « Hrooo, ça va ! » - risposta Calben. – « On a rien fait d’mal. On a coursé quelq’ p’tites. Pour rigoler quoi ! »
-    « Et la femme du vieux Marcel ? » - le questionna Tholot sceptique.
-    « Quoi ? La vieill’ truie ?! » - s’époumona son ami. – « T’rigoles ou quoi ? C’est elle qu’est venue nous voir. « Mon gros diable » qu’elle hurlait – « viens m’faire faire peur mon démon ! ». Tu m’connais. Pas pu résister sur l’coup… J’sais pas c’qui m’a pris. Mais j’aurais dû m’la couper, pour sûr ! Depuis, elle s’pointe régulièrement, la grâce. « J’veux être ta succube » – qu’elle beugl’ – « emporte moi aux enfers ! ». Les gars, ils s’fout’ d’ma gueul’ ! Obligé d’lui jeter d’la caillass’ à la tronche pour qu’elle s’barre ! ».

Alors que le bourru halfling s’apitoyait sur son sort, ses amis avaient les larmes aux yeux et gloussaient de bon c½ur de sa mésaventure sentimentale. Ces rires joviaux firent se réveiller le sergent Jonas.

-    « Libérez-moi immédiatement ! » - siffla-t-il, la voix enrouée. – « Vous allez me le payer ! »
-    « Tiens, le merdeux s’est éveillé. Bon, passons aux choses sérieuses. » - fit le coach Duda en se redressant de son siège. – « Vous vous amusez bien ici les mecs, j’avoue. Mais faut que vous arrêtiez. Immédiatement. »
-    « Pourquoi ça ? » - lui demanda Lorel, stupéfait par la remarque de l’humain.
-    « Parce que votre secret est éventé. Vous êtes dans la merde, en réalité. Quelqu’un vous a balancés au baron. Une lettre anonyme lui est parvenue y’a de ça quelques semaines. J’en ai eu vent par un scribe du palais, qui me devait quelques services. Le baron envoie un régiment de piquiers pour en finir avec cette mascarade. Ils seront là d’ici trois jours. » - les informa le coach, ce qui fit se refrogner les quatre halflings. Le bourgmestre hoqueta de peur :
-    « Mazette ! Les troupes du baron ici ? Mes aïeux, nous sommes perdus ! » - se lamenta l’humain obèse en sa cachant le visage dans les mains.
-    « Ne l’écoutez pas ! » - jappa le sergent André. – « Imposteurs ! Je n’ai envoyé aucune lettre ! »
-    « Ta gueule, André. Qui est-ce qui avait dit que c’était toi, le corbeau ? » - répondit le coach. – « C’est con, mais tu viens de te dénoncer, blaireau. Bâillonnez-le. » - dit-il aux halflings, qui tournaient leurs têtes dans tous les sens, complètement pris au dépourvu par la tournure des évènements. – « Vous savez que je ne menace jamais personne gratuitement. Vous me connaissez bien les mecs. Si j’vous dis que vous êtes dans la mouise, c’est que vous l’êtes. Vous avez un jour, peut-être un jour et demi avant de déguerpir d’ici ».
-    « Mais, qu’est ce qu’on fait ? On ne peut pas partir comme ça. On devait justement livrer une nouvelle cargaison. De plus venait d’investir pas mal de pognon dans du nouveau matos de brassage pour augmenter la production. Nous reste plus grand-chose. » - déplora Lorel. – « Vous proposez quoi, coach ? »
-    « Ce qu’il propose ?! » - intervint Eggon avec joie. – « On remonte la team ! Le Real Boitar de nouveau sur les pelouses ! »
-    « Quoi ? » - hurlèrent de concert les quatre halflings. – « Vous êtes sérieux ?! »
-    « Oui, un ne peu plus sérieux, les nabots. » - dit calmement le coach. – « On est venus exprès pour ça en fait. On vous propose de rejoindre l’équipe. On reprend du service à la Lutèce. »
-    « Ouah, ça a l’air cool ! » - s’extasia Afka.
-    « J’sais pas ». – Lorel parut bien plus hésitant. – « J’dis pas, c’est tentant. C’est pas que l’idée ne nous botterait pas. On en discute presque tous les jours de nos aventures passées. Mais bon, c’est derrière nous tout ça. Toi Afka, t’es encore jeune, mais nous autres, j’suis pas sûr qu’on y arriverait… »
-    « Te bile pas ! » - le coupa Eggon, toujours aussi enjoué. – « Si même l’Ancien pense qu’il va y arriver, alors c’est pareil pour nous tous ! Et puis, le coach, il a un plan ! »
-    « Quel plan ? » - s’étonna Lorel.
-    « Je vous dirai tout le moment venu. » - répondit Duda sur un ton sibyllin. – « Sachez toutefois que j’ai parfaitement conscience que, pour l’instant, vous êtes pas en l’état de jouer ne serait-ce que correctement pour des semi-hommes. Je ne vous lâcherai pas sur un terrain comme ça, sans préparation. Mais tout est programmé. Faites-moi confiance les gars. »
-    « Putain oué, moi j’en suis ! » -  brailla tout à coup Calben. – « Y’en a marr’ d’la binouze quoi ! C’tait bien sympa, mais fau’ trouver aut’ chose-là. Commence à m’faire chier dan’ c’trou à rats. Moi, l’plan m’plait, merde ! D’la baston, du ballon, du fric et d’la grognass’ facile. C’est c’qui m’faut ! ». L’idée parut plaire également à Posho et à Afka, qui hochèrent la tête, visiblement ravis à cette idée.
-    « Bon, j’crois qu’on a pas le choix de toute façon. » - répondit Lorel quelque peu maussade. – « Ah, ça fait quand même mal au c½ur de lâcher une affaire qui marchait si bien. Mais bon, vaut mieux ça que s’retrouver cul-nu devant le baron, j’imagine. Alors, on fait comment ? Et nos limiers ? »
-    « C’est simple. » - répliqua l’entraineur se grattant le menton. – « Vous prenez tout ce que vous pouvez, et vous vous barrez d’ici fissa. Les clébards, prenez-les ou butez-les, pour ce que j’en ai à foutre. Pour le voyage, vous connaissant, j’gage qu’il vous reste quand même du pognon donc y’aura pas de souci. Ensuite, on s’retrouve à la capitale, à l’ancien quartier général. »
-    « Au Crampon Doré ? » - le questionna le semi-homme joufflu.
-    « Tout juste, bonhomme. Où veux-tu que ce soit ? »
-    « Par-contre. » - intervint Tholot. – « On fait comment avec ces deux-là ? » - dit-il en désignant les villageois. – « Faudrait pas laisser de témoins… ». Le visage du bourgmestre se vida immédiatement de tout son sang et l’homme tomba à genoux.
-    « Sires ! Pitié, j’ferai tout c’qu’vous voudrez ! » - bégaya ce dernier.
-    « Va falloir nettoyer c’merdier, les gars. » - réagit Duda. – « Laissez-moi réfléchir. ». Un bref silence s’installa, personne n’osant prendre la parole. Plus, le coach reprit sur un ton factieux :
-    « Vous ferez exactement ce qu’on vous dit, Jonas. Sinon, on vous pendra par la peau d’couilles, compris ? ». Le bourgmestre hocha la tête en silence, pétrifié par la peur. – « Parfait donc. Vous allez rentrer au village avec nous trois, Tholot, Eggon et moi. Puis, vous annoncerez à vos ouailles que nous avons capturé le démon ! Vous nous avez bravement servi de guide jusqu’à l’antre de la bête. Après avoir mené notre enquête dans la montagne, nous découvrîmes que toute cette histoire de diable n’était qu’une vaste supercherie, destinée à piller les biens des villageois, et organisée de main de maître par… notre sergent préféré ! ».

L’ensemble de l’auditoire écarquilla alors les yeux, stupéfait, ce qui fit sourire machiavéliquement Duda. Le sergent André, quant à lui, se contorsionnait frénétiquement au sol, tenant de se défaire de ses liens et baragouinant d’une manière incompréhensible, le bâillon enfoncé profondément dans son gosier. Après une pause quelque peu théâtrale, le coach reprit :

-    « Nous étant rendus compte de l’escroquerie perpétrée par ce triste personnage, nous menâmes un rude et âpre combat, lors duquel mes deux amis halflings que voici firent preuve d’une vaillance incroyable. Grâce à notre force et à notre courage à toute épreuve, nous défîmes le traitre et ses sbires, mais nous ne réussîmes qu’à capturer le chef, le reste de la bande ayant péri ou s’étant enfui. Naturellement, pour preuve de notre bonne foi, nous ramènerons ce sac à foutre (dit-il en levant le menton vers le sergent) au village, après l’avoir revêtu de ton déguisement, Lorel. »
-    « Putain, coach, ça peut marcher ! » - reprit ce dernier. – « Mais faut pas que l’gros moufte. Et comment empêcher le sergent de l’ouvrir ? »
-    « Bah, André peut parler autant qu’il veut, déguisé et cabossé comme il sera, personne n’attachera de l’importance à ce qu’il pourrait dire. Tout le monde va croire Jonas. Les gens ont besoin qu’on leur apporte une vérité aisément vérifiable. Mais pas forcément LA vérité. » - conclut-il sur un ton professoral.
-    « Vaudrait mieux buter l’sergent tout d’suite. » - réagit Calben stoïquement. – « Si v’voulez, j’peux m’occuper tou’d’suit’ d’son cas. » - fit-il en passant son pouce sur son cou, alors que l’intéressait couinait de plus belle.
-    « Non, Calben. » - répondit le coach. – « J’pense que les bouzeux voudront s’faire justice eux-mêmes. Si on leur ramène l’diable vivant, ils ne réfléchiront pas à deux fois. Ils vont gentiment gober la soupe que notre bon bourgmestre leur servira. Et ils la boiront encore plus facilement si, avec le cul du démon, nous leur rapportons un joli, petit pactole, sonnant et trébuchant ».
-    « Merde Duda. » - réagit Lorel ennuyé. – « On a plus beaucoup de thunes. Si on doit encore en filer aux pécores pour qu’ils avalent l’histoire, il va rien nous rester. »
-    « Mais non, Lorel. » - rétorqua l’entraineur. – « L’magot, on le prendra chez le bourgmestre. Je suis sur qu’il a caché deux ou trois bourses bien remplies chez lui. J’me trompe, Jonas ? »
-    « Pitié, nob’Lord ! J’vous donnerai tout c’qui m’reste, tout ! Mais pitié, m’faites pas la peau, nondoudiou ! » - s’apitoya ce dernier, les larmes coulant sur ses joues. – « J’f’rai comm’ qu’vous voulez, juré craché ! Et d’abord, c’est la vérité vraie tou’ c’qu’vous disez ! C’est André l’responsab’ de tout, d’façon ! C’est lui qu’a organisé toussa ! Et’ riche, c’est tou’ c’qu’il avait dans la caboche, c’te enfant d’putain. Moi, qu’es’ j’n’ai à fiche de l’or, moi ! J’en ai autan’ b’soin q’d’un furoncl’ sur l’derch’ ! Les gars du villag’, vont bien s’occuper d’lui, promis ! Justice s’ra faite ! A coups d’fourch’ qu’on l’remerciera c’saligaud-là ! La soldatesque du baron, z’auront rien à r’masser ! Juré ! »
-    « Bon, je crois qu’il est mûr là, notre gros ami. » - constata Duda, amusé.

***

Et c’est ainsi que le malheureux sergent André fut livré à la justice aveugle d’un village revanchard, qui le pendit dans la nuit sans autre forme de procès, après avoir avidement bu le conte que leur exposa solennellement un Jonas exalté, lequel joua son rôle à la perfection. Après une courte nuit, et un sommeil pour une fois serein, les trois compères repartirent du village sous les vivats heureux d’une foule de paysans en liesse, chargés de cadeaux et de plusieurs bourses remplies de pièces d’or (sorties des coffres du bourgmestre), reçues en rétribution de l’immense service rendu. Malgré l’insistance de tout le village, et notamment de la femme de Marcel qui souhaitait remercier personnellement et très chaleureusement les héros pourfendeurs du démon, ils refusèrent de participer au banquet devant être organisé le soir même. Ils n’oublièrent toutefois pas de mettre une dernière fois en garde le bourgmestre, notamment à coups de taloches bien placées, afin qu’il garde sa langue bien enfuie dans sa bouche de pécore, s’il ne voulait pas avoir de gros ennuis.

-    « Au fait coach. » - demanda placidement Eggon alors qu’ils se reposaient autour d’un feu de camp qu’ils venaient d’allumer dans un bosquet de pins sis sur une colline boisée, où ils s’étaient arrêtés alors que le soir était tombé. – « Comment vous avez su pour André ? Comment vous avez pigé qu’il était de mèche dans cette affaire ? »

Duda cessa d’admirer la magnifique rapière qu’ils avaient dérobé au sergent – ce dernier n’en avant de toute façon plus l’usage – releva la tête et sourit à l’halfling.

-    « Sa visite nocturne m’a confirmé les soupçons que j’avais. Mais c’est ça qui m’a mis la puce à l’oreille ». – répondit l’entraineur en jetant l’arme ouvragée à Eggon. – « Une lame tiléenne. Et pas n’importe laquelle. L’ouvrage d’un maître forgeron. Vous pensez que le chef de la milice d’un patelin paumé peut se payer une arme pareille avec sa seule solde ? Sans parler de ses fringues et de ses bottes. Alors de deux choses l’une. Soit c’était un fils de bonne et riche famille, à qui papa a payé la panoplie du parfait soldat, soit c’était un escroc d’première. Or, les fistons de nobles on les trouve bien plus souvent dans la garde ducale que comme sergents dans un village de bouzeux. Il devait donc forcément tromper dans cette histoire de diable. »
-    « Vous avez l’½il pour le détail coach. » - intervint Tholot.
-    « Les détails oué. Le diable est dans les détails. » - rétorqua l’intéressé avec amusement, ce qui fit pouffer ses deux compagnons.
-    « Et pour les troupes du baron ? Elles arrivent ? Vous en avez vraiment eu vent par un scribe du baron ? » - reprit le halfling.
-    « Qu’est-ce que j’en sais, à vrai dire. Vous pensez vraiment que j’connais les scribouillards d’un quelconque seigneur local de mes deux ? » - riposta l’entraineur au grand étonnement des semi-hommes, qui se redressèrent d’un bond.
-    « Quoi ? » - s’égosilla Tholot, estomaqué. – « Vous n’en savez rien ? Vous voulez dire… »
-    « Que je l’ai jouée au bluff… oué. » - conclut Duda, avec un clin d’½il. – « Et ça a marché. Tant mieux. Mais, comme l’a laissé entendre le sergent, le baron avait de toute façon été mis au courant de l’affaire. Ce petit merdeux d’André avait bel et bien balancé vos amis. J’parie que les troupes régulières débarqueront d’ici quelque temps, envoyées par la baronnie. C’est ce que ferait n’importe quel hobereau normalement constitué. Donc, au final, ça ne change rien pour nos quatre amis. Leur affaire était compromise ici, de toute façon. »
-    « Mais, tout de même, Duda. » - continua Tholot, interloqué. – « Comment vous avez su que les gars se trouvaient derrière tout ça. »
-    « Franchement, je n’avais aucune certitude. » - répliqua l’humain. – « Mais je savais qu’ils piautaient dans le coin. Et qui d’autre qu’eux aurait pu mettre en place une affaire pareille ? »
-    « C’est sûr ! » - s’écria Eggon. – « Un diable qui brasse d’la bière. Y’a que les gars du Real Boitar pour inventer des conneries pareilles ! ». Cette remarque fit rire de plus belle les trois amis.
-    « Au fait. » - s’interrogea Tholot. – « Avec tout ça, on ne sait même pas comment il s’appelait, ce village du diable. »
-    « Vauvert. Le village s’appelle Vauvert. » - répondit Duda, hilare.

cool


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

Hors ligne

 

#25 10-09-2018 18:15:22

Duda
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Re: ANNONCE

La suite des aventures :

Les Guerriers aussi ont droit au repos

L’odeur fraiche de l’humus dissipant des senteurs moites de rosée matinale se répandait dans l’air froid de l’épaisse forêt que les trois voyageurs fatigués traversaient avec lassitude. C’était un de ces matins frisquets de fin d’été, qui laissent toutefois présager une journée encore chaude et ensoleillée et rappellent l’arrivée prochaine des vents et pluies d’automne ; un matin calme et paisible, rempli de cris d’oiseaux et de sons de bruyère, un matin plein de zénitude, invitant à la contemplation, à l’oubli et à l’introspection de soi, un matin de quiétude et de de bonheur solitaire…

-    Quand est-ce qu’on arrive ! – la voix criarde de son compagnon de voyage sortit Duda de ses pensées. – J’ai faim ! J’veux mon troisième petit déj’ !
-    Oh, mais boucle là Eggon ! – riposta le coach agacé. – ‘Dirait un môme, merde ! Y’en a marre de vos palabres les minus.  « J’suis fatigué, j’ai faim, j’ai mal au cul ! ». Non mais vous vous entendez des fois ?! De toute façon, y’a plus rien à béqueter. Vous avez dévoré ce qui restait ce matin, bande de goinfres.
-    Mais coach. – intervint le troisième comparse, un halfling ventru et ridé à la peau tannée, mais néanmoins de taille imposante pour un individu de son espèce. – On a plus l’habitude de ce type de voyage. Ça fait plus d’une semaine que vous nous trimballez de nouveau dans la nature, sans qu’on sache où on va, et ça sans la moindre auberge, sans qu’on s’arrête dans le moindre troquet ou rade de paumés.
-    Ha bon ?! – répondit l’humain sur un ton sarcastique. – Parce que t’as vu des auberges sur notre route peut-être ? Ne fais pas celui qui ne sait pas où on est. Tu sais qu’on s’approche de la grande forêt, cette grande forêt oué… et que de tavernes ou de bistrots, t’en auras pas dans le coin. En tout cas, sauf celle où on va…
-    Quoi ?! – s’exclama Eggon, un halfling joufflu aux favoris imposants. – On va enfin poser nos culs dans un rade ?! Putain, c’est vrai ça ? Genre, y’aurait une auberge à quelques jets de pierre de la Loren ?
-    Oui, c’est ça mon con. – Duda fit une légère moue et répondit de manière énigmatique. – Une sorte d’auberge oué. Une auberge un peu spéciale…

Et en effet, après quelques minutes à capahuter à dos de leurs infatigables montures, à travers des chemins forestiers tortueux, les trois voyageurs débouchèrent sur un petit vallon bucolique au milieu duquel coulait paisiblement un cours d’eau aux eaux limpides, parsemé ça et là de bosquets de frênes et de bouleaux. Au loin, à l’horizon, se dessinait la ligne menaçante des arbres magistraux et lugubres de la grande forêt elfique.

Au milieu d’un des bosquets, nichée au creux d’un méandre de la rivière, se dressait fièrement une bâtisse champêtre et soigneusement entretenue, entourée par un muret solide au portique volumineux, flanqué d’un panneau en cuivre lustré, sur lequel était affiché en lettres dorées et stylisées ce qui semblait être le nom de la demeure – « La Caverne d’Isha – le Repos du Guerrier ». Avisant l’écriteau, les deux halflings se regardèrent interdits, haussèrent les épaules de concert et suivirent leur coach qui avait déjà franchi le portail d’entrée. Ils s’engagèrent alors, en direction de la demeure, sur un chemin gravillonné et ombragé, bordé de majestueux tilleurs derrière lesquels s’étendait une pelouse parfaitement taillée.

Ils arrivèrent ainsi devant ce qui s’avéra être un véritable corps de ferme, avec son imposant bâtiment central de deux étages, en pierre meulière, auquel étaient accolées deux tours à l’architecture alambiquée et au toit recouvert de tuiles en ardoise fraichement décapées. A gauche de la bâtisse se dressaient d’énormes écuries, visiblement occupées, à en croire l’activité bruyante autour de celles-ci, où plusieurs palefreniers s’activaient à panser et à abreuver de superbes étalons arabiques, à la robe lustrée d’un noir d’ébène de plus bel effet. L’autre côté du bâtiment était occupé par une série de dépendances du même acabit que ce dernier, dotées de larges fenêtres obstruées de l’intérieur par d’épais rideaux de velours. Sur les linteaux des portes étaient accrochés plusieurs panneaux en métal poli qui précisaient la destination des lieux : « Sauna – Hammam », « Poolhouse » ou bien encore « Salon de Jeux – Détente ».

Sur le devant de l’établissement était disposée une terrasse d’agrément en bois exotique, entourée de massifs de buis en pots, aménagée en un agréable salon d’extérieur. Des convives, de races et d’ethnies diverses mais mâles pour l’essentiel, vêtus de manière élégante mais quelque peu extravagante, se prélassaient sur les canapés et fauteuils rembourrés qui y étaient installés, en sirotant des cocktails multicolores et en riant aux éclats. Toutefois, aux yeux des deux vétérans du Real Boitar, les individus en question paraissaient bien trop proches les uns des autres, trop amicaux, trop… affectueux, dans la mesure où ils semblaient se masser les nuques mutuellement, se caresser tendrement les dos ou encore passaient délicatement la main sur la joue de leurs camarades, le tout dans une ambiance sensiblement bon enfant, mais bien trop criarde pour les deux halflings.

Après avoir laissé leurs montures à un palefrenier enjoué, mais somme toute assez légèrement vêtu (ce qui permit à Tholot et à Eggon de constater sa superbe musculature), les trois voyageurs se dirigèrent vers l’entrée principale de l’établissement, une large porte en chêne massif dotée d’un heurtoir doré à forme oblongue et finissant par deux sphères. Lorsque Duda toqua à la porte, celle-ci s’ouvrit sur une montagne imposante de muscles appartenant à un humain au faciès taillé à la hache, mais au sourire charmeur, doté d’une large moustache brune. Celui-ci, vêtu à la mode guerrière et portant une impressionnante cape blanche sur les épaules, était visiblement le gardien de céans. Il accueillit les nouveaux arrivés :

-    Mais quelle surprise coach ! C’est vous ! – lança-t-il d’une voix de ténor complètement non en phase avec sa corpulence. Il sourit joyeusement en direction de Duda, au grand étonnement des semi-hommes. – Vous êtes revenus. Je savais que notre établissement allait vous manquer.
-    C’est bon, c’est bon, Blanchard. – répondit ce dernier. Fais-nous entrer.

Ils pénétrèrent ainsi dans une vaste pièce au sol dallé, et aux murs couverts d’épaisse moquette d’un rouge impérial. Un énorme lustre en cristal, éclairé au moyen de lampions dorés, pendait majestueusement du plafond. Un escalier stylisé en fer forgé et aux marches en marbre partait du côté gauche de l’entrée pour monter vers les étages supérieurs. Le mur du fond était occupé par un immense miroir en verre tiléen, fixé dans un cadre doré sculpté d’arabesques. Le décor était complété par une large méridienne et une table basse ouvragée, sur laquelle reposait un bouquet de fleurs exotiques, inséré dans un élégant vase en porcelaine. 

Plusieurs portes et alcôves obstruées par des rideaux de velours partaient de l’entrée. Le gardien agita une petite clochette posée sur la table basse tout en souriant aux trois compères, et quelques instants plus tard surgit de l’une des alcôves un halfling potelé, à la chevelure rousse et vertu d’une toge d’une blancheur immaculée. Il était flanqué de deux humains obèses aux torses velus, accoutrés de masques de catch et d’habits de lutteur criards, qui leur enserraient profondément l’entrejambe. Ils se tenaient par leurs mains replètes en se cajolant les avant-bras et en susurrant des niaiseries improbables pour des individus de leur taille. Derrière eux, défilèrent plusieurs elfes au visage androgyne, aux cheveux extravagants, revêtus de tenues affriolantes de cuir clouté, tutus, plumes chamarrées, collants en résille et vestes bariolées sur lesquelles figurait un blason aux lettres « SL ». Ils jacassaient en sautillant allégrement et riaient aux éclats en se lançant des commentaires mielleux, des ½illades et des bises coquettes. 

-    Mes chéries ! C’était un vrai régal cette petite chenille en votre compagnie, mais je dois malheureusement vous abandonner. – jappa le halfling rouquin sur un ton aigu. Ses compagnons affichèrent une mine boudeuse en soupirant de manière infantile.
-    Elle nous abandonne ? – intervint un des catcheurs d’une voix étrangement stridente pour un tel colosse. -  Mais quelle garce celle-là alors. Bon, les copines, si nous allions au salon de thé nous empiffrer de sucreries pour noyer notre chagrin ? – les elfes braillèrent de joie à cette idée.
-    Merveilleux mes chéries ! Et n’oubliez pas, nous nous retrouvons ce soir pour la soirée « Gants et Mystères » ! – répliqua le halfling en agitant ses petits bras boudinés.
-    Oh oui ! – glapit un de ses compagnons, un grand elfe élancé, vêtu d’un collant rose déchiré par endroits, et d’une veste en cuir très saillante, bardée de clous en argent. – Je n’attends que ça ma belle ! Il parait que ces salopes du Couvent des Culs de None doivent venir nous donner la fessée ! J’ai la rondelle qui frétille rien que d’y penser ! – dit-il en direction du semi-homme sous les vivats concupiscents de ses congénères, lesquels se mirent à scander – Expi ! Expi ! Expi !

Sur ce, la troupe hétéroclite disparut par l’une des portes du hall d’entrée, suivie du regard par l’halfling roux.  Ce dernier se tourna alors lentement vers les trois voyageurs en s’exclamant sur le même ton aigu :

-    Bienvenue à La Caverne d’Isha ! Nous sommes heureux d’accueillir de si braves guerriers., Massage, Sauna, Hammam, Pédicure, Epilation, Pénétration – tous nos services vous sont offerts ! Que puis-je pour vou… Aaaaaaah - sa voix se mua tout à coup en un cri strident et il écarquilla les yeux, visiblement choqué.
-    Qu’est ce que que cet endroit. – intervint Tholot, en se grattant le front, totalement abasourdi par la scène à laquelle il venait d’assister. Quant à Eggon, il demeurait bouche bée, les mains sur les joues, et tournait les yeux dans tous les sens, ayant visiblement énormément du mal à analyser la situation. Il réussit néanmoins à articuler : - On est où là, merde…

Le halfling en toge tourna les talons et courut se refugier derrière un rideau en velours, suspendu à l’entrée de l’une des alcôves, d’où, par intermittence, il reluquait avec stupéfaction les trois nouveaux venus.

-    Arrête de faire le con, Waldi. – intervint Duda avec agacement. – Je t’avais prévenu que j’allais revenir. Blanchard, va me le chercher par la peau du cul… - finit-il en s’adressant au garde moustachu qui regardait la scène, impassible.
-    Duda, c’est bon, j’arrive. – répondit le halfling en sortant de son précaire abri. – Salut les mecs. – lança-t-il, sur un ton ouvertement gêné, en direction des deux autres semi-hommes, lesquels demeuraient interdits.
-    Waldi ? – réussit à balbutier Tholot. – Waldi Belleplume. Putain, mais c’est quoi tout ça ?
-    J’crois qu’il faut qu’on s’explique. – conclut le coach avec sarcasme.

***

Quelques verres de cognac bretonnien et un bon cigare permirent aux deux halflings de se remettre de leurs émotions. Ils se reposaient paisiblement dans un salon privé de l’établissement, une bibliothèque richement décorée dotée de canapés capitonnés en cuir et de vastes étagères remplies de livres anciens, mais traitant cependant pour la plupart des plaisirs de la chair. Ils purent ainsi apprendre un peu plus sur l’étrange établissement au sein duquel il se trouvaient, Waldi se faisant un plaisir immense à conter à ses amis ses aventures.

Ils découvrirent ainsi que ce dernier ouvrit la Caverne d’Isha, en compagnie de Séraphin et d’Aldo, dès la fin de leur carrière de joueurs de Blood Bowl. Il s’agissait tout d’abord d’une petite auberge sans prétention, où venaient se reposer les voyageurs fatigués et les guerriers en mal de combat. Ils purent ainsi retaper une vieille bicoque abandonnée, située idéalement dans un vallon bucolique aux abords d’une route menant à la grande forêt de Loren, et ce avec l’accord de leurs mystérieux voisins elfes, qu’ils durent grassement rémunérer. Grâce à leur sens de l’entreprise, à leur accueil chaleureux et à leurs talents culinaires, ils en firent un établissement de premier choix.

Néanmoins, leur popularité et leur réputation d’anciennes gloires de la Lutèce les suivirent comme des ombres et, au fil des ans, ils se mirent à recevoir de plus en plus de joueurs de Blood Bowl, d’anciennes gloires ou des vétérans à la retraite, venus se prélasser ou se ressourcer dans un endroit qui fut, peu à peu, spécialement adapté à leurs demandes et à leurs exigences. Le coach Duda les aida énormément à cette époque-là, ventant les mérites de leur auberge et en faisant la publicité auprès de ses collègues de métier – qui ne rechignaient pas à venir y passer quelques jours entre deux saisons éreintantes. Duda lui-même était un convive régulier, bien que rare, de l’auberge.

C’est ainsi que naquit La Caverne d’Isha – le Repos du Guerrier Fatigué. Un établissement de choix, aux pratiques quelque peu « frivoles » et dont raffolaient certaines anciennes équipes de la Lutèce Cup à la retraite.

-    Putain, on savait que t’étais une belle salope Waldi. – intervint Eggon sur le ton de la plaisanterie. – Mais pas une comme ça. J’savais pas que t’aimais te faire enfiler d’la perle par le fion.
-    Oh, tu sais mon grand. Tout ça, c’est du business. C’est du théâtre, je n’y participe que de manière passive… la plupart du temps. Faut fidéliser le client, vois-tu. Alors, faut savoir parfois mettre la main à la pâte, hein. Et puis bon, sucer un centaure-taureau, est-ce vraiment de la zoophilie ? – répondit son ami rouquin, sous les regards stupéfiés des deux halflings.
-    Et les autres alors ? – le questionna Tholot avec circonspection. – Séraphin et Aldo ? Ils sont avec toi ?
-    Naturellement ! – répliqua Waldi avec enthousiasme. – Ils s’occupent du personnel actuellement. On a une soirée à préparer, alors ils sont au four et au moulin. Aldo doit être aux cuisines, certainement à surveiller les pâtisseries, ce goinfre. Séraphin gère l’espace sauna et massages. Ha mais tiens, on pourrait y aller tout à heure ! Mamadou, notre masseur professionnel pourrait s’occuper de vous. Qu’est-ce que vous en dites ?
-    On passe notre tour. – se dépêchèrent de répondre les deux halflings presqu’en même temps. – Ca ira.
-    Bon, maintenant que nous sommes-là… - reprit Tholot devenu un peu plus sérieux. – Coach, et si vous nous disiez de ce qu’il retourne, cette fois-ci ?
-    C’est simple. – répondit leur entraineur sur un ton neutre. – Nous sommes venus chercher ces trois-là.
-    Coach… - lui coupa la parole un Waldi visiblement navré. – Je vous ai déjà dit que ça ne nous…
-    Ces trois-là. – continua l’humain, imperturbable. – Et les deux hommes-arbres.
-    Quoi ?! – hurlèrent Tholot et Eggon estomaqués, en sautant de leurs fauteuils. – Les hommes-arbres ?!

***

-    Donc, vous ne renoncez pas à votre plan ? – reprit le halfling roux après quelques instants de silence qui suivirent l’annonce tonitruante de Duda.
-    Non Waldi. Il nous faut ces deux vieilles branches, tu le sais bien. On ne peut pas jouer sans eux. – lui répondit sereinement le coach.
-    Quand même, vous jouez un jeu dangereux là. Les mecs en face, c’est pas des rigolos ! – répondit le halfling sur un ton professoral.
-    Quoi ? Quels mecs ? Qui n’est pas rigolo ? – les questionna Eggon, pris au dépourvu. – Vous ne nous avez pas parlé de plan, coach. C’est quoi encore ces histoires ?

La porte s’ouvrit alors et apparurent sur le seuil deux halflings potelés, à la mine joviale et vêtus de toges en soie fine semblables à celle que portait Waldi. Ils accueillirent très chaleureusement les trois voyageurs, et les accolades franches et viriles mirent un peu plus à l’aise Eggon et Tholot, qui furent quelque peu rassurés sur les pratiques de leurs deux camarades. Ceci étant fait, la discussion reprit sur le ton de la confidentialité.

-    Il faut que je vous expose l’idée. – reprit le coach de manière sibylline. – Cendrechêne et Grisfrêne seront des nôtres, mais y’a un léger problème. Actuellement, ils sont rentrés chez eux, en Loren. Ils sont détenus, si on peu dire ça, par une bande d’elfes à la mords moi l’n½ud…
-    Par les Ecureuils Vicieux, plus précisément. – le corrigea Waldi, la mine grave. – Une belle bande de salopards. Ils font la loi dans le coin. Des malfrats de la pire espèce. Spécialisés en protection, extorsion, kidnapping et viols à la demande… voire sans demande.
-    De quoi ? – s’étouffa un Tholot étonné. – Qu’est ce que nos hommes-arbres foutent avec la mafia elfe ?
-    C’est tout con. – reprit le coach. – A la fin de la saison, les deux vieilles branches sont rentrées à la maison. Ils sont naturellement passés dans le coin, parce que Waldi montait son affaire à l’époque. Mais comme c’est des feignasses de première, ils se sont enracinés dès leur entrée dans la grande forêt. Il s’avère que c’était la zone de jeu de ces putains d’Ecureuils Vicieux…
-    Et donc ? – riposta Tholot, toujours circonspect.
-    Et donc, faut casquer. Deux cent mille pièces d’or. – répondit Waldi en faisant la moue.
-    Quoi ? – hurlèrent de concert Tholot et Eggon, offusqués. – Deux-cent mille pièces d’or ?!
-    Vous les avez, coach ? Comme convenu ? - demanda Aldo, légèrement anxieux. – Parce qu’ils se pointent demain matin.
-    Naturellement. – répliqua l’humain, imperturbable. – Naturellement que je les ai…

***

Les trois voyageurs passèrent une nuit paisible, confortablement endormis dans des lits à baldaquins aux matelas douillets, aux draps de soie. Ils refusèrent de participer à la petite soirée « Gants et Mystères » organisée le soir, au grand dam de Waldi et de plusieurs convives, qui reconnurent les anciennes gloires halflings de la Lutèce. Epuisés, ils s’endormirent rapidement et ni les bruits de musique entrainants, ni les rires joviaux, les éclats de voix frivoles ou les autres hennissements bestiaux des participants à la sauterie ne purent les réveiller.

Le lendemain matin, Duda et les anciennes gloires du Real Boitar petit-déjeunaient sur la terrasse de l’établissement, en s’empiffrant de saucisses grillées, d’½ufs brouillés à la ciboulette, de mogettes en sauce et de grosses tranches de pain au seigle, en arrosant le tout de grandes rasades de café corsé. Waldi, visiblement fatigué, les yeux cernés et les traits tirés, mais néanmoins jovial en cette heure matinale, prit la parole en soupirant bruyamment :

-    Ah, qu’est ce que ça fait du bien ! Dites ce que vous voulez les gars, mais un vrai petit-déj’ bien d’chez nous, y’a que ça de vrai ! Au diable les sucreries et autres mignardises de tafioles, d’la viande, des ½ufs et du pain, ça c’est de la vraie bouffe de halfing !
-    Et c’est toi qui dit ça ? – lui répondit Eggon avec réserve, alors que ses amis le regardaient circonspects.
-    Coucou les filles ! – hurla tout à coup une voix vibrante, provenant du jardin. Les halflings purent ainsi apercevoir qu’arrivait dans leur direction un nordique barbu, au crâne dégarni et à la panse bedonnante. Il était vêtu très légèrement et ne portait qu’un clip en cuir noir, très échancré, ainsi que des bretelles faites dans la même matière, recouvertes de piques argentées. Il était chaussé de sandalettes à lacets hauts. Dépassaient de son dos des ailes d’ange faits en ouate. Il tenait dans sa main droite un arc factice, auquel était accrochée une flèche dont la pointe prenait la forme d’un c½ur. Pourtant, son costume insolite n’était pas la chose la plus étrange dans la mesure où dans sa main droite, il serrait fièrement une corde au bout de laquelle était attaché un véritable âne vêtu d’une magnifique robe de princesse d’un bleu étincelant, et coiffé d’une perruque blonde. Eggon et Tholot écarquillèrent les yeux à l’arrivé de l’individu et de son animal de compagnie.
-    Waldi, ma chérie ! – piailla le nouvel arrivé. – Quelle soirée hier, mais quelle soirée ! Je viens à peine de me réveiller. J’ai fini la nuit dans la tonnelle du jardin en compagnie de ma belle. – finit-il tout sourire en caressant le museau de la bête.
-    Lars, mon grand. – répliqua l’halfling avec amusement. – T’as encore fait des folies ! Mais où trouves-tu cette énergie ? Permets-moi que je te présente. Les gars, vous avez devant vous Lars Malfason, une star, que dis-je, une véritable légende de la Lutèce. Lars, mon beau, mes congénères que tu vois ici sont mes anciens collègues du Real Boitar.
-    Ah ! – s’exclama exagérément le nordique. – Le Real Boitar ! J’avais adoré suivre votre parcours sur Cabalvision, les gars. Sacrée équipe. Vous m’avez bien émoustillé à l’époque. Bon, faut que je file, y’a les copines qui m’attendent au hammam. On va s’faire masser par Mamadou, ça nous fera du bien après la soirée d’hier. Allez, viens Elsa. – finit-il en direction de son âne. - Ravi de vous avoir rencontré.
-    Nous aussi. – répondirent à l’unisson un Tholot et Eggon stupéfaits. Puis, lorsque Lars quitta leur champ de vision, Tholot reprit sur un ton plus bas en direction de ses amis : - C’était vraiment lui ? Lars Maflasson, la légende des Comments d’Odin ? Qu’est ce qu’il fout là ?
-    Ban, il se repose, comme les autres. – répliqua Aldo avec stoïcisme. – L’est fatigué notre Lars. Alors, il coule des jours, et des soirs, heureux au Repos du Guerrier. Il l’a mérité. Que veux-tu qu’il fasse ?
-    Bon, les nabots. – intervint tout à coup Duda en reposant sa serviette de table. – Ca suffit. J’crois qu’il est temps d’y aller. Les Ecureuils doivent probablement être arrivés. Séraphin, va prévenir Blanchard. Il nous accompagne.

***

Le rendez-vous était fixé à l’entrée d’une grotte située au pied d’un affleurement rocheux, qu’ils atteignirent après une dizaine de minutes de chevauchée à travers la plaine. Lorsque Duda et les cinq halflings mirent pied à terre, plusieurs elfes sortirent de la grotte, la démarche nerveuse et les visages crispés.

-    Z’y’va l’lascard’, t’as vu l’heure, cousin ? – aboya l’un d’eux, un grand elfe au nez aquilin et au regard perçant, le crâne étrangement rasé pour un représentant du peuple sylvestre.

Son accoutrement était également très surprenant, car l’individu s’était fagoté de braies très amples de couleur rouge et d’un veston en cuir noir. Il portait également autour du crâne un bout de tissu carmin aux motifs alambiqués, noué sur le devant. Il était chaussé de bottes en daim à lacets et à semelle épaisse, qui lui montaient à mi cheville. Sa panoplie était complété par une série de bagues et une impressionnante chaîne en or qui pendait à son cou, à laquelle était attaché un pendentif en forme de cadran solaire. Enfin, ultime détail, son rictus faisait apparaitre une dentition en or, sertie, ça et là, de pierres précieuses de diverses formes et couleurs. Les deux elfes qui le flanquaient étaient vêtus de manière somme toute semblable. Plusieurs autres de leurs comparses étaient visibles à l’entrée de la grotte.

-    Tu t’crois chez ta reum ?! – reprit l’elfe chauve avec aplomb.
-    Ca va, calme toi Karis. – répondit le coach Duda sur un ton calme. – On a quelques minutes de retard.
-    Vas t’faire enculer, bolos. – jappa un des elfes qui accompagnaient le dénommé Karis. - Ranafout’ de tes excuses. Faut pas gazer avec nous, bâtard.
-    Boucle-la, gamin. – riposta le coach en direction de ce dernier. – Je parle avec ton boss, pas avec ses clébards.
-    Quoi ?! – s’offusqua alors le jeune elfe. – Vas niquer ta mère sale yeuv’. J’vas t’marav’ fils de pute ! – il fit mine de s’avancer vers l’humain en prenant une posture de combat, mais un ordre de son chef l’arrêta :
-    Ca suffit ! On est venus causer business. – Le combattant téméraire cracha par terre près de Duda en le fixant férocement du regard :
-    T’as d’la chance, bâtard. J’t’aurais explosé ta face de rat.
-    Passons. – répliqua Duda. – Tu les a ramenés ?
-    Qu’est ce que tu crois, ‘culé ? – répondit le chef des Ecureuils. Il siffla en direction de ses camarades puis sourit méchamment au coach et aux halflings.
-    C’est quoi ces mecs, merde ? – chuchota Eggon en jetant des regards nerveux. – Qu’est ce qu’on fout là.
-    Ca, mon petit. – répliqua Duda posément. – Ce sont les Ecureuils Vicieux. C’est avec eux que nous sommes venus parler affaire, n’est ce pas, Karis ?
-    Ferme ta chebou’ et aboule la thune, fonbou’. – répondit ce dernier avec fermeté.
-    Doucement, mon ami, doucement. Le fric est dans les sacoches. – répliqua le coach en montrant les montures derrière lui, près desquelles se tenait un Blanchard, étrangement masqué. – J’veux d’abord voir la marchandise.

Quelques instants après, de puissants bruits de pas se firent entendre dans la caverne, puis Cendrechêne et Grisfrêne firent leur lente apparition. Les deux hommes-arbres n’avaient, pour ainsi dire, pas du tout changé depuis ces longues années, et ressemblaient parfaitement à ce qu’ils étaient il y a de ça huit ans, à savoir deux immenses arbres mouvants.

-    Cendre ! Gris ! – hurlèrent les halflings avec joie, en sautillant sur place et en tapant des mains. Ils firent signe aux deux hommes-arbres qui relevèrent la tête dans un bruit de grincement de bois.
-    Thooooooloooooo…. Waaaaaaallllldiiiiii. – articulèrent-ils en direction des semi-hommes.
-    Vos bouches, baltringues ! – hurla de nouveau Karis. – Pas touche à la came. File le pognon.
-    Calmez-vous. – reprit Duda sur un ton neutre. – Karis, tu va pas me la faire à moi. Tu connais la procédure.

Il fit un geste de la main en direction de Blanchard, lequel ouvrit doucement une des sacoches attachées à la selle de la monture de Duda. Les pièces d’or scintillèrent dans la lumière matinale.

-    Deux cent mille pièces d’or, comme convenu. – continua le coach alors que l’elfe chauve ouvrait grand les yeux avec avidité. – Y’a quarante mille par sac. Tu sais compter Karis, tu vois donc que le compte y est. Maintenant, file-moi la branche.

Le chef des Ecureuils reporta son regard sombre vers l’humain et sourit dans un rictus dévoilant pleinement sa dentition baroque. Il tendit la main vers l’autre comparse qui le flanquait, et qui n’avait pour l’instant pas bougé d’un pouce. Ce dernier déposa dans la paume de son boss un bout de bois biscornu, sur lequel étaient attachés divers colifichets de fabrication visiblement elfique. Karis remit alors la branche à Duda, qui s’en saisit avec vigueur.

-     Tiens, sont à toi ces bouffons ! – répondit l’elfe, sur un ton véhément. – Maintenant, la thune !

Blanchard déposait les sacs remplis de pièces d’or au sol, puis fit signe aux halflings de le suivre. L’ensemble de la petite bande se rapprocha des hommes-arbres. Alors, l’entraineur prit la parole en s’adressant à ces derniers :

-    Salut les vieilles branches ! Heureux de vous revoir. Regardez-moi ça. – il leva bien haut le bout de bois qu’il tenait dans sa main. Les deux hommes-arbres baissèrent les yeux, se regardèrent, puis Cendrechêne, à moins que ce ne soit Grisfrêne, répondit :
-    Le daaaaaaaard de Kuuuuuurnouuuuuussss.
-    Précisément. Vous m’appartenez donc, dorénavant. Pigé ? – répliqua le coach avec malice. Les deux hommes-arbres hochèrent lentement leurs têtes.

-    Enculés ! – hurla soudain une voix acérée. – C’est quoi cette merde !

Les halflings et leur coach se retournèrent vers Karis et sa bande qui étaient en train de répandre le contenu des sacoches au sol, visiblement furieux. A première vue, celles-ci étaient remplies de cailloux et de bouts de métal divers, les pièces d’or ne composant qu’une fine couche recouvrant ce qui semblait être un subterfuge.

-    Tu voulais nous la faire à l’envers, fils de pute ! – aboya le fameux Karis. – Putain, on va vous défoncer, bâtards !

Sur ce, la bande des Ecureuils vicieux saisit épées, poignards et gourdins et s’avança dangereusement ver les deux humains et les halflings, pris totalement au dépourvu.

-    Duda ! – jura Tholot. – Vous êtes malade ? On va se faire défoncer !

C’est alors que le coach, étrangement calme, sourit méchamment aux semi-hommes puis se tourna vers les hommes-arbres en disant :

-    Cendrechêne, Grisfrêne. Vous m’appartenez. Alors occupez vous de cette bande de merdes ! – puis il pointa le Dard de Kurnous sur les Ecureuils Vicieux qui s’approchaient.

***

Quelques minutes plus tard, c’en était fini. Les elfes gisaient tordus dans des poses grotesques, démembrés, éventrés, éparpillés. Karis réussit toutefois à s’échapper en se saisissant des rênes d’une monture. Il décampa en direction de la Loren en lançant des invectives et des menaces de vengeance en direction de Duda et de ses amis.

-    Qu’est ce que j’vais faire maintenant ! – se lamentait un Waldi, inconsolable dans les bras de Séraphin et d’Aldo. – Vous faites vraiment chier Duda. Ils vont revenir et ils vont brûler mon établissement ! Vous ne les connaissez pas ces elfes.
-    Putains d’Ecureuils – reprit Aldo. – Sûr que ça va pas être la joie quand ils arriveront. On va se faire dégommer.

Le coach sourit alors une nouvelle fois et répondit avec entrain.

-    Pour la Caverne d’Isha. Ne vous inquiétez pas. – répondit le coach. - J’pense que vu ce qu’il y a là-bas comme gars, ces bouffons vont réfléchir à deux fois avant de tout casser. Et puis, Karis vous en veut à vous et à moi, pas à l’auberge. Celle-ci restera intacte je pense, surtout vu ce que ça rapporte aux anciens des elfes. Et je connais un coach nain de la Lutèce qui serait intéressé pour reprendre votre établissement.
-    D’accord. – intervint Aldo apeuré. – Mais nous. Ils vont nous buter, nous torturer, nous violer, puis nous ré-tuer.
-    Vous n’avez donc plus le choix les gars. – riposta Duda avec malice. - Faut que vous veniez avec vous.
-    Putain, vous faites vraiment chier. – conclut un Waldi résigné.

cool

Dernière modification par Duda (14-09-2018 10:34:31)


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
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