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Lutèce Cup

Le Blood Bowl à la sauvage !!!

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#176 03-04-2019 00:19:38

Laerthis
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[TMNT] AS Bashtraciens

Re: ANNONCE

C'est comme toujours, superbe.

J'ai beaucoup aimé les références aux "Aventuriers de la mer(de) du Trône en fer".
Ce fut fort bien trouvé, mon cher Duda!!!

(Franchement, faudrait faire imprimer et relier tout ça dans un joli petit bouquin)

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#177 03-04-2019 07:19:55

PoireAbricot
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Petits Elfes des BoisThe Great Red Sneaky FamilyWolf and Rabbit

Re: ANNONCE

Voir même un livre audio tant qu'à faire ? smile


Futur meilleur ogre saison 2023-24
Champion 2023-24 si je gagne tous mes matchs

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#178 03-04-2019 07:51:18

Scarabee
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[TMNT] Croâ ? Croâcoubeh !

Re: ANNONCE

En exclusivité, les premières images du film

🍿

Dernière modification par Scarabee (03-04-2019 07:51:41)


Scarabee, sinon, j'ai une nouvelle fois rien compris à ton intervention — Duda®2023

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#179 03-04-2019 08:00:19

Budmilka
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Dans la peau de Jérôme

Re: ANNONCE

Il s'appelle pas Peter le Bailli pour rien...


"L'important, c'est de passer l'armure." Pierre de Coubertin (sur une aggro à 7 soutiens)

"Je ne perd jamais : soit je gagne, soit je chatte." Nelson Mandela (joueur sylvain/skaven)

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#180 17-04-2019 13:08:41

Dritzz
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Re: ANNONCE

Allez Mister Duda !
Il manque les derniers CR ... C'est les derniers mètres pour clore cette superbe saison !!! wink

Dernière modification par Dritzz (17-04-2019 13:08:57)


- Louper un plaquage, c'est comme enculer un collègue ... C'est moche !!!   Smiley 014
- Meilleur défenseur WC 2023 avec 2 TD d'encaissé !

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#181 17-04-2019 19:03:40

Duda
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Re: ANNONCE

C'est chaud actuellement, mais chose promise... wink
Je sais, j'ai 3 matchs de retard. On va y arriver big_smile

- Qu’est ce qui a pris à Dieu de faire un type comme José !
- Dieu n’a pas fait José. C’est la Lutèce qui l’a fait.

Budmilka, Président de la Lutèce Cup

La colombe blanche et sèche,
Retombe souvent sur sa poitrine,
Elle vole quand même... c'est très bien,
Et finit sa course dans la prairie de notre enfance.

Yvain, Kaamelott, Livre II, 86



L’envol de la Colombe blanche


-    Tholot ! Tholot ! On a un problème ! – Posho braillait à tue-tête d’une voix pataude, en déboulant tel un forcené aux abois dans le petit salon d’agrément, attenant à la salle commune de l’auberge du Crampon d’Or, dans lequel la plupart des joueurs se reposait après le festin de roi qu’ils venaient d’ingurgiter en guise de petit-déjeuner.  Bacon, saucisses fumées, ½ufs au plat ou brouillés, haricots en sauce, fricassées de volaille, pâtés de foie et fromages de tête, mais également de délicieux petits pains au lait nappés de confiture, des miels sirupeux à souhait, des toasts grillés généreusement tartinés de beurre frais et autres succulentes friandises, le tout arrosé de bière et de café, les halflings appréciaient donc la quiétude ambiante dans un silence jusque-lors reposant et bienvenu, leurs dos confortablement calés dans d’agréables fauteuils en velours, les pieds posés sur d’esthétiques tabourets et chauffés par une douce flamme grésillant dans le feu de l’immense cheminée en pierre qui occupait le mur ouest de l’établissement. 
L’impassible sérénité des lieux fut donc brutalement rompue par le lourdaud candide qui leur servait de compagnon. Toutefois, l’attitude celui-ci semblait très éloignée du comportement habituellement placide de Posho. Il avait l’air complètement, entièrement, absolument paniqué, horrifié, épouvanté. Les yeux écarquillés, le visage tordu par l’angoisse, les veines du cou gonflées et le visage rouge, il s’égosillait, tenant dans la main une grosse enveloppe en carton, quelque peu froissée et tâchée par endroits de mucosités sombres.
-    Calme-toi, bon dieu. – protesta Lorel sans bouger de son fauteuil, les yeux fermés, un verre de liqueur posé sur son ventre distendu.
-    Qu’est-ce qu’il y a, Posho ? – demanda Tholot avec un agacement certain, tournant vers son collègue un regard fatigué et désabusé. – Quel genre de problème ?
-    Un genre de gros problème, Tholot ! – répondit en postillonnant le semi-homme apeuré. – Très gros, même !
-    S’tu racont’ com’ conn’ries ‘core, gamin ? – l’interrogea Calben avec son accent guttural. -  Vois pas qu’on s’repos’ ?
-    Tenez. Regardez par vous-mêmes. – finit par balbutier Posho, en tendant d’une main tremblante un bout de parchemin chiffonné à son capitaine.
Les quelques haflings rassemblés dans la pièce se levèrent de leurs fauteuils et, interloqués, se rapprochèrent de Tholot qui essayait de comprendre ce que signifiait le message gribouillé dans un écriture plus qu’hésitante et rempli de fautes d’orthographe que venait de lui remettre son coéquipier.

NOU TENON VOTR COATCH
HIHIHI BIENFÉ POUR VOU SAL BOUFFEURS D’VIAND
RAMENÉ LA RANSSON DEUXMAINS SOIR A LENDROI INDIKÉ
SÉ SENT MIL PIESS’DOR LA RANSSON
ET N’APPELÉ PA LA GARD
SINO LE COATCH ILÉ MOR !!!

PS : SVP TOURNÉ LA PAG POUR VOIR OU DEPOSÉ LORE

Au recto était effectivement dessiné à la hâte et d’une main gauche, enfantine, un plan sommaire de la ville, duquel il pouvait être déchiffré, avec quelques difficultés, que le rendez-vous était fixé sur le Pont D’à vos Gnons – grandissime ouvrage reliant les deux rives du fleuve traversant la capitale et situé dans le quartier des stades de la Lutèce – célèbre surtout pour être l’endroit choisi par les groupes supporters de tous bords qui ont, depuis toujours, chéri ce lieu pour y organiser des séances d’échanges d’amabilités à coups de torgnoles, de baffes, de caboches, de châtaignes, de marrons, de taquets, de beignes… enfin, de gnons quoi. C’est cette pratique pittoresque et ancestrale qui donna définitivement son appellation à l’édifice, son nom originel étant tombé dans l’oubli depuis bien longtemps. Quoi qu’il en soit, après une stupéfaction de très courte durée, les halflings réagirent avec grand émoi, à coups de cris alarmés, de gestes d’incompréhension et de mots d’injures jetés à la volée.
-    Qu’es’c’te merde ! – brailla vivement Calben.
-    C’est quoi ces conneries ? – s’étonna vertement Eggon.
-    Moi, j’dis, ils bluffent. – observa avec sa ruse habituelle Sherlock.
-    Foutaises ! – protesta Waldi avec vigueur. – Vous n’allez quand même pas croire à ce bout de torchon !
-    Oh mon Dieu, qu’est ce qu’on va devenir maintenant ! On est fichus ! – paniqua Roch les larmes aux yeux.
-    C’est n’importe quoi ! – râla dans sa barbe un Lorel énérvé.
-    Quelqu’un veut une part de gâteau ? Il reste du gâteau… - observa avec sa franche candeur naturelle Hubert, qui semblait ne rien comprendre à ce qui se passait.
-    Du calme les gars. – Tholot essaya d’analyser la situation. – D’abord, Posho, dis nous que c’est pas une blague. Tu l’as sorti d’où, ce machin ? Hein ?
-    C’est pas une blague, cap’. – répondit avec appréhension ce dernier. – C’était dans la boite aux lettres. J’ai vérifié le courrier, comme tous les matins, et voilà. C’est tout.
-    Mais si ça se trouve, quelqu’un veut nous faire une blague. – Tholot tenta de rassurer ses coéquipiers. – Ce serait pas la première fois qu’on veut nous extorquer un truc.
-    En même temps. – intervint Sherlock pensif. – Quelqu’un a vu le coach depuis hier ?
-    Putain, non ! – s’exclama Eggon, subitement paniqué. – Il était parti hier en fin d’après-midi. Il avait des trucs à régler à la ligue.
-    Et moi, j’continue à croire qu’il s’agit d’un canular. – affirma Waldi avec fermeté. – Ou au pire, y’a un escroc qui veut s’en prendre à nous. N’allez pas croire que…
-    Attendez les gars. – l’interrompit Posho, affligé. – C’est pas tout. Y’avait aussi ça joint au message…
Sur ce, il plongea sa main dans l’enveloppe et en sortit un petit boitier en carton, poisseux et barbouillé d’une substance rouge-brun. Il tendit la boîte à Tholot. Etonné, ce dernier leva un sourcil et se saisit de l’objet que lui présentait son camarade et très lentement, avec appréhension, en retira le couvercle d’un geste trahissant son angoisse. Soudain, tous les halflings poussèrent à l’unisson des cris de stupeur horrifiée. Dans l’étui, posé sur un morceau de gaze et recouvert de sang séché, se trouvait en effet un doigt humain a priori masculin compte-tenu de son gabarit et de quelques poils recouvrant le dessus de la première phalange. Mais la vraie raison de cet émoi collégial, de cette complainte funeste de la part des halflings, consistait dans l’immense bague en argent toujours accrochée au doigt en question, et sur laquelle était gravé – aux côtés du logo bien connu de la Lutèce Cup et de sa célèbre maxime « Arroganter Vincere Mala Fide Vinci » - un seul et unique nom : « Duda ».


***

Il fut réveillé par un violent coup de poing qui s’écrasa sa mâchoire endolorie. Il jura très bas alors que sa tête s’affaissait et qu’il crachait quelques calots de sang poisseux. Il sentit immédiatement ses lèvres enfler et de l’hémoglobine couler le long de son cou. Il essaya de reprendre ses esprits mais un bourdonnement sourd et aigu dans sa tête perturbait hautement ses pensées. Il avait un effroyable mal de tête, dû certainement au violent coup qu’il se souvenait d’avoir reçu sur l’arrière du crâne. Réfléchis. Analyses. – se dit-il mentalement pour lui-même, se forçant à faire fonctionner son cerveau malgré la souffrance, espérant ainsi pouvoir dominer le fil entremêlé de ses souvenirs.

Le premier sens qui se signala, et bien plus qu’il ne l’aurait voulu, fut son odorat. Il se trouvait dans un endroit empestant fort le renfermé et le rance. Des odeurs de pourriture, mêlées aux effluves caractéristiques de moisissure et de légumes en décomposition emplissaient l’air ambiant. Il sentit également les relents pestilentiels de sueur et d’urine qui émanaient d’un être humain à la propreté plus que douteuse – très certainement son tortionnaire inconnu. 

Tout autour, d’effroyables bruits se faisaient entendre par intermittence. Aux glaçants cris de douleur et beuglements d’écorchés vifs succédaient des rires hystériques et d’inaudibles chants impies, entremêlés de bruits de chaînes d’acier qui s’entrechoquaient et d’ignobles sons d’os brisés, suivis de longs hurlements et lamentations de condamné, qui lui glacèrent les sangs et le firent frissonner d’appréhension.

Assis sur une solide chaise en bois, les bras et les jambes solidement attachés, il tenta d’ouvrir les yeux mais une pique de douleur lui fit comprendre qu’il avait un immense hématome au niveau de l’arcade gauche. Tant pis, il ne verrait que d’un ½il. Lentement, avec difficulté et aspirant à grands coups l’air vicié et chargé de putréfaction, il ouvrit sa paupière droite. Il jeta un rapide coup d’½il aux alentours en essayant, tant bien que mal, de tourner sa tête endolorie. Pivoter son orbite valide lui était impossible, une atroce douleur lui lacérant les nerfs derrière l’½il droit.

Apparemment, il se trouvait dans une sorte de cave voutée au plafond bas, duquel pendait un attirail hétéroclite et inquiétant de chaînes en fer, de cages et autres cordes en chanvre. Sur les murs en pierre, vétustes, irréguliers et suintant une eau fétide, étaient accrochées plusieurs torches abondement fumantes et éclairant très faiblement les lieux. Le sol en terre nue était jonché de monticules de détritus poisseux et nauséabonds en tout genre, mais principalement composés de morceaux ou d’épluchures de fruits et de légumes en décomposition avancée.

Sa vue, bien que parcellaire, s’adapta peu à peu à l’obscurité et il put déceler les contours de plusieurs personnages qui se tenaient debout et en silence face à lui, à quelques pas de distance.
-    Qu… Qui êtes-vous ? – réussit-il à balbutier malgré sa gorge sèche et en dépit de la souffrance qui irradiait tout son visage.
-    Ton pire cauchemar. – répondit mystérieusement une voix sombre et profonde devant lui. L’individu lança alors un atroce rire de dément qui rebondit sur les murs et résonna puissamment dans l’obscure pièce.
Duda soupira de dépit et de consternation et, dans un effort incroyable de volonté, finit par dire :
-    Ho putain, José, espèce de sale con, c’est toi. J’reconnais ta voix.
La mémoire lui revint rapidement au visage, tel un glaviot craché contre le vent. Il se souvenait désormais. Il avait encore du mal à se rappeler les détails exacts mais son cerveau embrumé réussit tant bien que mal à mettre de l’ordre dans les idées et les souvenirs de la veille. Il sortait du bureau des recettes et taxes de la ligue. Il y était venu pour régler les dernières charges fixes que ces escrocs d’officiels de la Lutèce lui imposaient après le match du Real contre les Inguiz Titi. Il se remémora qu’il pleuvait. Une charrette était passée devant lui dans la rue et il se rappela avoir fait un écart pour éviter d’être éclaboussé par les flaques d’eau sur lesquelles le véhicule roula. C’est alors qu’ils lui sont tombés dessus. A plusieurs. Quelqu’un lui mit un sac opaque sur le crâne, par derrière. Puis on le frappa au visage. Il se débattit quelques instants, lança les poings et rua des pieds, mais ses assaillants étaient coriaces. Trop coriaces. Rapidement, un coup de bâton sur l’arrière du crâne mit fin à ses tentatives de libération et lui fit perdre connaissance.
Et l’instigateur de ce coup fourré n’était autre que l’énigmatique José, son homologue dans le métier, entraineur sulfureux de la Lutèce Cup, ardent opposant à l’hégémonie de la Fédération Internationale de Blood Bowl et au système financier mis en place et contrôlé d’une main de fer par celle-ci, agitateur d’idées révolutionnaires, grand défenseur des causes perdues, et au passage végétarien convaincu, dénommé par bon nombre Léguman ou encore l’Homme-Céleri, sobriquet qui n’avait – aux dires de certains et surtout certaines – aucun rapport direct avec le goût immodéré de l’individu pour cet herbacé potager.
Un type complètement barré, en réalité. Et accessoirement, son futur adversaire de la Lutèce Cup.
Au son de ce rire paranoïaque de son interlocuteur, le sang monta rapidement au visage de Duda. Une rage imprudente s’empara de lui et lui fit serrer la mâchoire. Il tira de toutes ses forces sur les liens qui l’entravaient, essayant de gonfler au maximum ses muscles endoloris. Il pourra un cri de rage effrénée, cherchant désespérément à se libérer et hurla en direction de son geôlier :
-    Putain José qu’est ce qui t’as pris, bordel ! Libère moi immdédiat…
Un nouveau coup de poing, sur l’autre côté du visage, le fit taire et lui coupa le souffle. Sa tête fut projetée vers l’arrière faisant dangereusement craquer ses cervicales. Il gémit doucement et cracha un nouveau glaire de sang poisseux. Il passa sa langue sur ses dents endolories et constata qu’il en avait au moins deux de déchaussées.
-    Merde. – jura-t-il tout bas.
-    Excuse mes gars, Duda. – José entama la conversation sur un ton légèrement badin, comme si de rien n’était, comme s’il ne séquestrait pas un homme dans une cave miteuse en compagnie de plusieurs de ses sbires qui mettaient un malin plaisir à martyriser un entraineur de la Lutèce Cup.
José se rapprocha à pas chaloupés de son prisonnier en pivotant le cou de gauche à droite et en fixant celui-ci avec un regard exalté. Duda constata qu’il était vêtu de vieilles frusques élimées, répandant des relents âcres de sueur, et qu’il tenait un poireau dans une main.
-    Ils sont un peu sur les nerfs mes petits joueurs. – reprit José. – Avant notre match. Tu comprends. Alors il faut parler gentiment.
-    Josééé… - voulut protester Duda.
-    J’ai dit il faut parler gentiment !!! – hurla tout à coup son interlocuteur en se baissant vers le visage du coach du Real Boitar et en lui postillonnant dessus.
-    D’accord José, d’accord. – souffla ce dernier calmement. – Donne moi à boire. Et dis moi juste pourquoi je suis là.
-    Ah mais c’est simple, caralho ! – dit José en se redressant et en lui tournant le dos, le ton de la voix devenu soudainement plus guilleret. Il fit signe à un de ses disciples qui se rapprocha avec un pichet d’au fétide, dans lequel le coach halfling but goulument. – Hihihi ! Tu es notre prisonnier !
-    Ça, je l’avais remarqué. – ironisa Duda le visage tordu de dégoût, recrachant le liquide empli de miasmes qu’il venait d’ingurgiter. – Mais encore ?
-    Je veux tout ! – répliqua son homologue. Il se retourna vers le coach halfling et le pointa avec le légume qu’il serrait dans la main. – Je veux la gloire, le veux la victoire, mais surtout, surtout, j’veux détruire la Ligue !
-    De quoi ? – s’étonna Duda. – Tu veux dire qu’on me capturant, tu cherches à lutter contre toute la Lutèce ? Faire la guerre au Crew ?
-    Pour survivre à la guerre, il faut devenir la guerre. – répondit sereinement son interlocuteur en redressant fièrement le menton. – Je suis prêt pour ce sacrifice.
-    T’es fou José. – souffla de dépit l’entraineur du Real Boitar. – Vraiment.
-    Oh mais tant mieux ! Car je pense que les dieux aiment les fous ! – brailla son géôlier avec entrain, souriant soudainement à l’invective de Duda.
-    Pourquoi ? – se troubla ce dernier.
-    Parce-que, il en met tellement au monde. – reprit calmement José, sur un ton plus lugubre, en regardant de nouveau Duda droit dans les yeux.
Le coach halfling ferma l’½il et soupira avec consternation. Il était dépité. Son collègue semblait au-delà de tout raisonnement, il paraissait avoir sombré dans une folie pure, une folie frénétique, incontrôlable et dangereuse. Dangereuse surtout pour Duda lui-même, qui prit soudain conscience de la situation catastrophique dans laquelle il se trouvait. Il essaya malgré tout de maintenir la conversation, il fallait faire parler son tortionnaire, chercher une solution de repli, un angle d’approche amiable, tenter de tirer quelque avantage psychologique de la bouille verbale lancée sans une once de raison par ce dernier. Et aussi de gagner du temps.
-    José pourquoi tu m’as kidnappé ? – reprit Duda d’une voix calme et posée, essayant de maintenir un dialogue constructif.
-    Tu ne sais pas, sacano ?! – s’étonna avec une étonnante véhémence José. – Joues pas aux cons avec moi ou j’te donne à bouffer à mon bestiau ! En ville, tu fais peut-être la loi. Mais ici, la loi, c’est moi. Alors fais pas chier. Fais pas chier ou je te ferai une guerre comme t’en as jamais vue.
Visiblement, pour la tentative de conciliation, c’était raté. Il fallait chercher une autre approche.
-    Qu’est-ce que tu racontes ? Je ne comprends vraiment pas. – Duda essaya de calmer le jeu.
-    Le décalage ! – brailla soudain son interlocuteur. – Le décalage !
-    Hein, c'est quoi encore cette histoire de décalage ? – questionna Duda avec étonnement non feint.
-    Tu te fous de moi ?! – brailla de nouveau José d’une voix fortement agacée. T’as fait décaler notre match ! Qu'est-ce que j'en ai à foutre moi ? José s'en bat les couilles, ça marche pas avec moi ça, ça marche peut-être avec ces cons de la fédération mais on la fait pas à José. Y a que les minus dans le genre de tes halflings qui essaient de se défiler. Ça me fait bien marrer. Au lieu de vous la carrer dans le train un lundi, on va vous la carrer dans le train un mercredi. Olé ! On a rencard mercredi, ma poule.
Sur ce, il se mit à lécher langoureusement le poireau qu’il tenait dans sa main, d’abord doucement, puis de plus en plus vite, énergiquement. Puis, il se tourna de nouveau vers son prisonnier et se rapprocha de lui. Une fièvre brûlante dans ses yeux et les lèvres retroussées, il lui demanda !
-    Alors, vous êtes prêts à vous faire mettre ? Vous avez réussi à pas être encore éliminés. Meu deus mec, mes gars et moi on va vous flanquer une dérouillée.
-    Sans blague ? Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? – souffla Duda de dépit. – C'est ton opinion, José.
-    J'aime mieux te le dire à l'avance, paneleiro. – brailla ce dernier avec véhémence. – Si tu essaies de jouer au con avec nous et que tu sors ton cuistot pour nous pointer d’la barbaque faisandée sous le nez, tu peux compter sur moi pour vous la foutre au cul, à tes trouffions et à toi, et à pousser bien profond jusqu'à l’os.
-    José. – voulut intervenir le coach halfling.
-    T’as compris, mec. – répondit son interlocuteur. – On ne manque pas de respect à José.
-    José. – répliqua Duda en essayant de mettre le plus d’autorité possible dans sa voix, c’est-à-dire pas beaucoup vu les circonstances. - C’est pas moi. C’est toi qui as demandé le report…
-    Quoi ?! Jamais ! – protesta ce dernier en tournant brusquement le visage vers son prisonnier.
-    Si, José, c’est toi. – reprit Duda.
-    Ah bon ? – fit José sur un ton badin. – Peut-être, m’en souviens pas. – Puis, il se remit à brailler fort. – Mais c’est pas une raison !
-    Une raison de quoi ? – l’interrogea le coach halfling.
-    De vouloir nous faire bouffer d’la barbaque ! – affirma vertement José en accentuant chaque moi alors qu’il se mettait à fouetter doucement le visage de Duda avec le légume qu’il venait de lécher.
-    De quoi ? Quelle barbaque encore ? – Duda demeurait stoïque malgré la situation compromettante dans laquelle il se trouvait.
-    La Ligue veut nous forcer à bouffer votre saloperie de ragoût ! Parait que c’est une obligation ! – répliqua d’un ton lugubre et bas un séide qui se tenait aux côtés de José. – On ne mange pas votre saloperie d’viande par ici !
-    Et du coup, on t’a kidnappé. – ajouta posément son entraineur en croisant les bras. – Et on veut aussi vot’ pognon. Y’a pas de raison. Tout ce flouse que vous avez. Faut partager avec ses frères d’armes, amigo.
-    Non mais c’est quoi encore cette histoire de pognon ? – s’étonna Duda, la voix étranglée.
-    Tu peux appeler ça l’effort de guerre. – ricana son collègue de travail ce qui souleva l’hilarité de ses joueurs présents dans la cave. Un rire gras, cholérique, maladif et inquiétant, qui se transforma pour certains en une quinte de toux scorbutique.
-    L’impôt révolutionnaire. – ajouta un des sbires.
-    C’est ça ! – railla José. – Bien trouvé, Roger ! – puis il reprit, à l’attention du coach du Real Boitar. - On va alléger ton équipe d’un certain poids… en pièces d’or !
-    C’est une rançon que vous voulez ? – la voix de Duda trahissait son incompréhension la plus totale. – C’est vraiment pour ça que vous m’avez capturé ?
-    Appelle ça une rançon si tu veux, chico ! – répliqua avec malice José. – Moi, j’dirais que c’est un juste retour à l’équilibre. Une vengeance pour le monde animal que vous maltraitez !
-    Parce que tu vas me dire que c’est pour soutenir la cause des bestiaux que tu veux nous extorquer du pognon, peut-être ? – souffla avec désapprobation le coach entravé. – Depuis quand t’as quelque chose à foute de ces saloperies d’animaux ? Tu te prends pour le grand sauveur, maintenant ?
-    J’ai dit, on ne touche pas à la viande !!! – hurla de plus belle son interlocuteur. – On ne doit manger que des légumes. Et des fruits. C’est autorisé les fruits. Alors oui, nous défendons une grande cause ! Nous sommes le FLAN ! – conclut-il en prenant une pause théâtrale, jambes écartées, le bras tenant le poireau levé haut vers le plafond, le visage relevé.
-    Le flan ? – pouffa Duda.
-    Le Front de Libération des Animaux dans la Nature ! – précisa avec fermeté José, le regard sévère et les mâchoires crispées. – Le FLAN quoi !
-    Abattons les abattoirs ! – hurla un de ses suppôts en serrant le poing.
-    Oué ! Les bouchers au bûcher ! – ajouta vigoureusement un deuxième joueur.
-    Au moins cinq fruits et légumes par jour ! – compléta la ribambelle des slogans un troisième partisan, sous les vivats des autres participants.
-    José, s’il te plait. – Duda tenta de faire raisonner son géôlier une fois que la clameur ambiante se soit apaisée. - T’as l’expérience de la Lutèce, t’as vidé quelques pintes. Tu sais bien que ça ne marchera pas.
-    Bien sûr que ça marchera, estupido ! – protesta vivement José. – Nous sauverons les animaux. Nous imposerons la loi du monde végétal à toute la Lutèce ! Et de cette noble quête de la justice, rien ne me détournera ! – conclut-il en adoptant une nouvelle posture tragique, tournant la tête d’un côté, les bras croisés sur son torse. Soudain, il écarquilla les yeux. – Oh ! Tiens ! Un navet ! – lança-t-il en désignant du menton un légume qu’il aperçut dans un coin de la pièce. Il se jeta littéralement sur ce dernier et commença à le mâchouiller à genoux en tournant le dos aux autres personnes massées dans la cave, en mastiquant bruyamment et en jetant de temps en temps des regards inquiets, comme pour vérifier si personne ne tentait de lui voler sa trouvaille.
-    José, non, ça ne marchera pas. – reprit Duda une fois que son homologue eut fini de consommer le bulbe violacé.
-    Et pourquoi ça ? – l’interrogea sur un ton railleur José en s’essuyant d’un revers de manche la bave qui lui coulait sur le menton. – Dis-le moi, je t’en prie.
-    Mais parce que vous m’avez kidnappé juste devant les bureaux officiels de la Lutèce, bande de cons ! – explosa de rage le coach du Real Boitar. – En plein jour. A la vue de tous ! Vous pensez que personne n’a vu qu’un entraineur du championnat se faisait kidnapper ? Toute la ville doit être au courant à l’heure qu’il est ! Le Crew doit être au courant ! Et tu crois qu’ils vont réagir comment à ça ? Hein ?
-    Duda, Duda, Duda. – fit José sur un ton enjoué, en agitant son index de gauche à droite, cherchant à montrer à son prisonnier qu’il avait tort. – On a pensé à ça, pequeno. Pour qui tu nous prends. On s’est déguisés.
-    Ah bon ? – répondit Duda étonné. – Sérieusement ?
-    Et comment ! – reprit José, une note de fierté dans la voix. – On s’est déguisés en gobelins. J’ai fait repeindre les gueules de mes gars en vert ! Haha ! Tout le monde pensera que c’est ces minables clowns de l’équipe de Lepropre qui ont fait le coup !
-    Des gobelins ? – souffla avec dépit le coach halfling.
-    Oui des gobelins ! – affirma stoïquement José. – Tout le monde sait que les gobelins c’est sournois et vicieux.
-    Ah oué ? – se moqua Duda. – Et tout le monde sait que les gobelins c’est des putains de colosses de deux mètres de haut, tout en muscles, et qui portent des casques à corne et des armures à pointes, peut-être ?!
-    Ah. – José s’arrêta immédiatement de gesticuler.
-    Oui. Ah. – constata Duda avec une certaine emphase.
-    Merda. – jura l’amateur de légumes.
-    Tu l’as dit. – ponctua sa réflexion l’entraineur du Real Boitar. – Surtout que t’oublies une chose, José. Nos bagues officielles de coach de la Lutèce. Elles sont équipées d’un système magique de détection. Une sorte de mouchard indiquant la position exacte de chaque porteur. Au cas où. C’est géolocalisé et suivi à chaque instant par des équipes spécialisées d’officiels de la Ligue. Pour pas qu’il y ait d’entourloupes de ce genre-là, tu vois. – Duda regarda sa main et constata que son bijou avait disparu. – D’ailleurs, elle est où, ma bague ?
-    Renvoyée à ton équipe. – l’informa José, qui semblait perdu dans ses pensées. L’ambiance autour de lui avait radicalement changée, ses sbires paraissant confus. – Avec un doigt, en guise de menace.
-    Quel doit ? – s’étonna franchement Duda. – Il me semble que j’ai encore tous les miens.
-    Roger s’est sacrifié. Pour la bonne cause ! – précisa son homologue avec vigueur. – Hors de question de porter atteinte à l’intégrité physique d’un entraineur de la Lutèce ! On est pas complètement idiots non plus ! Alors il fallait que quelqu’un se sacrifie…
-    Désolé pour toi, Roger. – lança laconiquement l’entraineur halfling au maraudeur qui se tenait en face de lui.
-    S’pa grave. – répondit celui-ci d’une voix lugubre. – M’en reste plein d’autres.
-    Enfin bref. – reprit Duda en soupirant. – J’imagine qu’on est déjà à ma recherche. Et si vous m’avez fait venir ici avec ma bague, les services de la Ligue le savent déjà. L’alerte a été lancée, ils vont surement débouler tôt ou tard, le temps d’analyser les données du mouchard…
-    Merde ! – hurla soudainement José en plaquant les paumes de ses mains sur ses yeux et en poussant une complainte aigue. – Merde ! Ma tête ! J’ai mal au crâne !
-    Tiens. Le coach, il fait encore une crise. – observa avec un stoïcisme inquiétant le dénomme Roger.
-    Ça va pas, José ? – l’interrogea Duda, réellement inquiet.
-    Ce n’est rien. – indiqua son géôlier en serrant les dents. – On m’a appris à oublier la douleur.
-    Et ça marche ? – demanda le coach prisonnier.
-    Pas vraiment, non. – constata un José dépité. – Notre plan, notre putain d’plan !
José tourna en rond dans la salle et en se frottant vigoureusement les tempes, poussant de temps en temps des gémissements stridents et marmonnant dans sa barbe des paroles incompréhensibles. Ses joueurs demeuraient impassibles, visiblement habitués à ces crises de leur coach. Il finit par se calmer.
-    Bon, de toute façon, ça ne change rien ! – finit-il pas affirmer avec force, tentant manifestement de se convaincre lui-même. – Ha Ha ! On va vous piquer plein d’pognon et après, à nous la belle vie ! Toi. – dit-il en pointant Duda du doigt. – Tu vas nous attendre sagement ici qu’on revienne avec l’or.
-    José, j’vais cru qu’une rançon, ça supposait un échange. – fit observer Duda posément.
-    Ah mais c’est là que mon plan est superbe ! – explosa l’entraineur frénétique. – C’est une nouvelle sorte de rançon ! Une rançon type révolutionnaire ! On va vous entuber bien profond, bande de bouffeurs de barbaque mécréants ! On pique l’argent à tes petits bufoes, et on te garde au chaud pour la rencontre ! Comme ça, on gagne sur les deux tableaux ! Allé, adios cabrao !

***

Les halfings, accompagnés de leurs deux hommes-arbres, attendaient nerveusement au lieu prévu sur l’inquiétante missive qu’ils avaient reçus ce matin même. Le soir était tombé depuis plusieurs heures déjà, et la nuit répandait son sombre linceul tout autour des joueurs du Real Boitar, ajoutant à l’angoisse de ces derniers et jouant sur leurs nerfs déjà mis à rude épreuve par l’absence notable et alarmante de leur entraîneur. Parsemée en de rares endroits par la lumière des lampions et lanternes des bateaux à l’amarrage, la noirceur huileuse du fleuve s’écoulait au loin de chaque côté du large pont, découpant en deux le halo étincelant des lumières de la ville fatiguée qui refusait de s’endormir. Pour autant, outre la présence des halflings, l’endroit paraissait complètement désert, peu de citoyens osant s’aventurer dans les parages – plutôt mal famées – une fois la nuit tombée.
-    Quel est le plan alors ? – demanda Waldi, la voix tremblante d’anxiété.
-    Bah, c'est facile. – répondit Sherlock avec assurance, une cigarette coincée entre les lèvres. – On la récupère le coach sans donner la thune et comme ça personne n'aura lieu de se plaindre et nous on garde le bakchich.
-    Ouais c'est formidable Sherlock. Sacré plan. Mais ce que tu oublies de nous dire c'est comment on récupère le coach sans donner la caisse avec l’or ? – observa Tholot de manière sarcastique en pointant de l’index le volumineux caisson que tenait dans ses branches un des hommes-arbres.
-    Alors ça c'est la base. – riposta Sherlock, imperturbable. – Au moment de la transaction, on les chope ces connards, et on laisse Grisfrêne et Cendrechêne jouer avec eux !
-    Ah ça c'est un super plan ! C'est une petite merveille ton plan si j'ai bien compris. – le railla Eggon. – On peut dire que c'est de la mécanique de précision !
-    C'est ça la beauté de la chose. C'est sa simplicité. – continua leur compère, totalement imperméable aux critiques de ses amis. – Quand un plan est trop complexe, neuf fois sur dix il foire.
-    Et comment tu sais qui viendra en face ? – lanca avec véhémence Tholot. – Selon toute probabilité, on va se retrouver en face d’une bande de mastodontes, deux fois plus grands que nous ?! Comment espères-tu les choper, nigaud va !
-    De toute façon, tu m’fais jamais confiance. – protesta vivement Sherlock. – C’est pas juste ! Moi en tout cas, j’compte pas m’laisser faire.
-    Taisez-vous ! – siffla soudain Waldi entre les dents. – Quelqu’un approche !
Au bruit de lourds pas lointains qui se rapprochaient doucement, tous se pétrifièrent instantanément, leurs sens aux aguets, essayant de scruter la noirceur ambiante, les regards troublés par les lumières lointaines du rivage. Puis, au bout de quelques instants, ils avisèrent plusieurs silhouettes massives qui avançaient d’un pas lourd dans leur direction et derrière lesquelles semblait se mouvoir une masse beaucoup plus volumineuse, imposante, inquiétante. Enfin, les individus surgirent de la nuit. Venait à la rencontre des halflings une dizaine de guerriers, vêtus de simples pagnes et de casques à cornes, aux bras musclés bardés de bracelets à pointes, et dont la peau était étrangement recouverte de peinture verte. Et derrière les sbires apparut la carcasse magistralement immense, incroyablement terrifiante, épouvantablement abominable, d’un véritable démon de Khorne, dont les gigantesques sabots écrasaient les pavés usés du pont à chacun de ses pas, faisant trembler toute la structure de l’édifice. La bande guerrière s’arrêta à quelques pas des halflings, attendant dans un silence morbide et funeste.
-    Et merde. – jura tout bas Eggon.
-    Et maintenant Sherlock. – souffla Tholot, blasé, à l’attention de son coéquipier. – Tu veux choper lequel de ces gars ?
Ce dernier n’eut pas le temps de répondre à son capitaine car surgit de la masse compacte des barbares une silhouette râblée et trapue, à la chevelure ébouriffée, vêtue de frusques élimées. Chose étrange, l’individu tenait dans une main ce qu’était visiblement un brocoli. Il fixa intensément et avec un regard courroucé les joueurs du Real Boitar, tout en marchant de droite à gauche d’un pas saccadé. Soudain, il brailla d’une voix acérée, mais néanmoins forte et puissante :
-    Alors, bande de nazes ! Où est l’or ?
-    On l’a. – répondit laconiquement Tholot, quelque peu inquiet. – Où est notre coach ?
-    C’est pas toi qui pose les questions ici, burro do caralho ! – vociféra l’individu menaçant en agitant ses bras. – Jouez pas aux plus malins avec nous ! Donnez-nous l’or et plus vite que ça !
-    Mais le coach... – voulut protester Eggon.
-    Hé toi, palhaço ! Dis-moi, t’as envie de mourir ? – lança l’inquiétant énergumène qui leur faisait face. – Mon p’tit démon peut s’occuper de toi, si tu veux vraiment.
-    Vous ne nous faites pas peur ! – intervint vaillamment Waldi, mais sa voix tremblante trahissait son effroi. – Nous avons nos hommes-arbres avec nous !
-    Ha ! Ces deux vieilles branches pourries ? – s’égosilla l’individu, ce qui fit ricaner les guerriers situés derrière lui. – Mon boubou va les transformer en tas de cendres en moins de temps qu’il vous faut pour vous torcher vos culs d’merdeux !
-    Mais vous êtes qui au juste ? – demanda Tholot avec appréhension.
-    Nous sommes le FLAN ! – hurla leur contradicteur, sous les vivats de ses séides.
-    Hein, un flan ? – s’ébahit Eggon à l’instar de la stupeur ayant frappé son entraineur quelques heures auparavant à l’énoncé du nom de groupuscule.
-    Le FLAN, bordel ! – jura le rançonneur. – Le Front de Libération des Animaux dans la Nature ! C’est pas compliqué à comprendre, merda !
-    Euh, mais qu’est ce qu’on a à voir avec ça, nous ? – s’étonna vivement Tholot. – Pourquoi vous vous en prenez à nous ?
-    Parce que vous êtes de sales mangeurs de viande ! – brailla l’individu courroucé.
-    Sales goinfres ! – hurla un de ses guerriers.
-    Bouffeurs de barbaque puants ! – jura un autre tout de go.
-    Halflings ! – lança un troisième pour lequel le terme de « halfling » était manifestement un outrage en soi.
-    Ca suffit ! – l’homme coupa soudainement les protestations de ses séides, en écartant les bras. – On est pas là pour s’toucher la nouille. Donnez-nous l’or immédiatement !
-    Et sinon quoi ?! – lança tout à coup Sherlock avec véhémence. L’étrange individu se raidit dans une posture de défi.
-    Sherlock, ta gueule. – siffla doucement Tholot à l’attention de son camarade.
-    Sinon ? – dit posément leur interlocuteur, une note menaçante vibrant dans la voix. – Tu oses me demander sinon, cabrao ?
-    J’en ai rien à foutre moi de ce que tu dis ! – explosa l’halfling malicieux.
-    Putain Sherlock, boucle-la, bon dieu ! – voulut l’interrompre son capitaine. – T’es fou ou quoi ?
-    Non Tholot. Rien à cirer. – Sherlock paraissait comme possédé. – J’ai pas peur des menaces de ce connard ! C’est illégal de kidnapper quelqu’un ! Surtout un coach de la Lutèce !
-    Ah oui ?! – l’individu se mit à rire en raillant l’halfling. – On s’en fout nous de ce qui est illégal ! On ne respecte pas les règles ! On croit en rien, nous !
-    Bande de nihilistes ! – lança Sherlock en direction du chef des kidnappeurs.
-    Putain, mais on va mourir. -  couina Waldi apeuré.
-    Et y a autre chose qu’il faut que j’vous dise, qu'il faut surtout pas perdre de vue ! – Sherlock s’avança vers l’inconnu en le pointant du doigt. Ce dernier semblait demeurer perplexe, amusé et certainement perturbé par l’outrecuidante hardiesse du semi-homme. – C'est que s’balader avec une bête sauvage, un démon des abysses en l'occurrence, même domestiqué, dans une zone urbaine, ça aussi c'est illégal !
-    Assez ! – hurla de nouveau le racketteur. – L’or immédiatement, sinon votre coach, il est mort !
-    Très bien, on perd notre temps. – Sherlock s’arrêta à quelques pas de l’individu et se retourna vers ses camarades. - Bien, changement de méthode.
-    Sherlock, ça suffit ! – grogna Eggon, manifestement sans succès.
Sherlock semblait au-delà de la raison, furieux et déchainé, il agitait ses bras tel un forcené sous les regards étonnés de l’ensemble des participants. Il se tourna à nouveau vers leur opposant et brailla à son attention :
-    Dis-moi, ducon. T’as déjà entendu parler du Mootland ? Parce que nous, on vient du Mootland. Et on va te montrer comment on règle les choses par chez nous. Tu vas comprendre ta douleur, mon gars. On va t'arracher les olives. Regarde bien ce qui se passe quand on veut niquer les gens jusqu'au trognon !
-    Il est mort ce con. – observa Eggon désabusé.
Mais son camarade se rapprochait déjà à pas vifs vers Cendrechêne, qui tenait le lourd caisson rempli de pièces d’or.
-    Cendre ! – hurla Sherlock en levant la tête vers l’homme-arbre. – Jette-moi la caisse dans la flotte. Tout de suite !
Et comme à l’accoutumée, sans réfléchir, l’immense gardien sylvestre exécuta l’injonction donnée par son petit camarade. Tout se passa alors comme au ralenti. Les halflings poussèrent à l’unisson un gémissement catastrophé alors que le grand coffre basculait par-dessus le parapet du pont et chutait vers les abysses noirs des eaux. Il s’écrasa contre une des piles de la construction, répandant son contenu sur le rebord de la pile et dans les flots tumultueux du fleuve.
Un beuglement atroce se fit également entendre dans les rangs des guerriers attroupés en face des joueurs du Real Boitar. L’immense démon poussa, à son tour, un rugissement atroce qui explosa dans l’air et fit vibrer les tympans des halflings. Mais le son le plus effroyable fut l’½uvre du chef des malotrus qui beugla une complainte funeste, un mugissement strident de souffrance indescriptible, à mi-chemin entre le braiement d’un âne châtié et le blatèrement d’un chameau castré.
-    Mon or ! Tuez-les tous ! – glapit-il en direction de ses guerriers.
Toutefois, ces derniers n’étaient pas encore sortis de leur stupeur et n’avaient pas effectué le moindre pas en direction des halflings apeurés que d’autres voix, et de nombreux bruits de bottes, se firent soudain entendre sur le pont :
-    Rendez-vous, vous êtes cernés ! – hurla une voix forte et puissante venant de derrière les joueurs du Real Boitar.
-    Merde ! Merde ! – jura l’individu exalté, les yeux révulsés, tremblant de tous ses membres.
Tout à coup, surgit de la nuit un peloton entier de gardes municipaux, munis de longs bâtons en bois et de boucliers bardés de fer, les torses recouverts d’armures de cuir cloutées et coiffés d’imposants casques à plumes. Ils prirent une position défensive entre les deux équipes, protégeant les halflings d’un mur de boucliers plus que bienvenu.
-    Retraite ! – brailla l’étranger à l’attention de ses comparses de malheur. – Retraite ! On rentre à l’Asile !

***

Quelques heures plus tard, un cordon de sécurité formé par la milice locale entourait un bâtiment vétuste et délabré, au murs gonflés par l’humidité et au toit troué et avachi, situé tout près d’un cimetière abandonné dans un des faubourgs malfamés de la capitale. Un capitaine de la garde, la mine sévère et la moustache fièrement courbée, faisait les cent pas à quelques mètres de la porte d’entrée de l’inquiétante bâtisse.
-    Permission de pénétrer dans les lieux, capitaine ? – lança un jeune sergent, rasé de près, son regard d’acier imperturbable fixé sur le large portail de l’édifice.
-    Attendez, sergent. Nous ne savons pas combien ils sont là-dedans. Ni la disposition exacte des lieux. – répondit le capitaine, la voix grave. – D’autant qu’ils tiennent un otage. Et c’est pas n’importe qui.
-    Sauf votre respect capitaine. – le sergent n’en démordait visiblement pas et se risqua à une observation hasardeuse. – Peu m’importe l’otage. Ces gars-là ont violé plus d’une demi-douzaine de décrets royaux en l’espace d’une nuit. Je propose la prise d’assaut imminente.
-    Allez-y, si vous voulez mourir. – une voix de baryton sonna soudainement derrière les deux hommes. Ils se retournèrent de concert, avec une vivacité démontrant des aptitudes martiales développées.
-    Qui êtes-vous ? – s’étonna le capitaine.
-    Qu’est-ce que vous foutez là ? – lança le sergent en saisissant la garde de son épée.
-    Je suis Budmilka. – fit l’imposant individu qui leur faisait face et qui semblait ne pas faire grand cas de l’attitude courroucée des deux soldats. – Mon nom devrait vous suffire, je pense. C’est notre entraineur qui est-là dedans. Deux entraineurs même. Ils sont des nôtres. Ils sont sous l’autorité de la Lutèce. José, l’instigateur de tout ce merdier, j’en fais mon affaire, croyez-moi.
-    Je m’en fous ! – hurla le capitaine, rouge de colère, un rictus mauvais lui défigurant le visage. – Lutèce ou pas, le malotru qui est là-dedans a dépassé les bornes ! Vous n’avez pas tous les pouvoirs ici ! Vous ne pourrez pas le sauver de mes hommes !
-    Oh mais. – observa Budmilka en levant la main en signe d’apaisement. – Je ne viens pas sauver José de la Garde, je viens sauver la Garde de José.
-    Qu’est ce que vous racontez comme conneries encore, monsieur le président ? – intervint le sergent en s’autorisant un ton sarcastique sur le titre de leur interlocuteur. Mais Budmilka ne releva pas l’insulte et demeura imperturbable :
-    Que cet homme a été créé pour cela, pour des situations comme celles-là. Il n’excelle pas dans le combat, il est le combat.
-    Nous verrons cela. – observa le capitaine avec mépris. – J’ai sous mes ordres deux cent des meilleurs soldats de la Garde municipale. Et il faut que l’on sauve l’otage !
-    Et vous avez des armes ? Létales j’veux dire ? – demanda Budmilka avec franchise.
-    Non. Pas besoin. – précisa le capitaine. – Juste des bâtons.
-    Alors vous ne sauverez personne. – affirma pensivement le président de la Lutèce.
-    Vous voulez me faire croire que deux-cent hommes contre votre coach, c’est une situation perdue d’avance ? – s’interposa avec véhémence le sergent.
-    Ecoutez. – répondit calmement Budmilka. – Si vous lancez vos hommes, n’oubliez pas une chose.
-    Quoi ?
-    Réservez-leur une place à la morgue. – indiqua stoïquement le nouveau venu.
-    Mais pour qui prenez-vous cet homme ? Pour Dieu ? – objecta rudement le capitaine.
-    Non. – dit le président, quelque peu désabusé. – Dieu aurait pitié, pas José.
-    Ca va être l’enfer, alors. – le jeune officier sourit avec défi.
-    Ce que vous appelez l’enfer, il appelle ça chez lui. – conclut funestement Budmilka.
-    C’est ce que nous verrons ! – une hardiesse orgueilleuse palpitait dans les yeux du sergent. Avec une arrogance désinvolte, il sortit son arme, et le coach de la Lutèce s’aperçut que celle-ci s’apparentait plus à une épée de cérémonie qu’à une véritable arme de combat. Mais le sergent hélait déjà ses troupes :
-    Escadron Alpha, avec moi ! – hurla-t-il avec entrain à l’attention des soldats situés derrière lui. Il pointa son arme sur le bâtiment et ordonna la prise d’assaut.
L’immense porte du sombre bâtiment attendait la charge de la milice – silencieuse, morne et inquiétante dans son mutisme morbide, telle une bête endormie attendant paisiblement la proie qui tomberait dans son piège. La dizaine de gardes, dont plus de la moitié portait un lourd bélier, coururent à toute allure vers le bâtiment, sous les cris d’encouragement de leurs camarades restés en soutien. Mais au moment d’enfoncer le portail, celui-ci s’ouvrit à la volée dans un grincement sinistre et menaçant. Une noirceur maléfique palpait de l’intérieur de la bâtisse, mettant quiconque au défi de pénétrer en son sein. Les gardes s’arrêtèrent, circonspects, se regardant les uns les autres, visiblement stupéfaits. Mais le jeune officier ne s’en laissa pas compter et, en quelques brefs ordres, ordonna à son escadron de le suive à l’intérieur de l’antre infernal. La troupe disparut dans le ventre somnolent de la bête et la porte claqua de nouveau, se renfermant immédiatement dès que le dernier soldat eut franchi le seuil.
-    Qu’est ce que cela signifie, sacrebleu ! – hurla le capitaine en écarquillant les yeux.
-    Je vous avais prévenu… - répondit laconiquement Budmilka sur un ton résigné.
Mais déjà, des bruits de lutte, des cris apeurés et des suppliques d’aide provenaient de l’intérieur du bâtiment délabré. Puis, en quelques secondes, ce fut à nouveau le silence et la porte d’entrée s’entrouvrit une nouvelle fois, doucement, calmement, mais toujours avec un grincement strident qui faisait froid dans le dos. Une silhouette esseulée s’extirpa de l’intérieur, d’un pas hésitant, boitant, trébuchant sur les pavés et Budmilka constata avec aigreur qu’il s’agissait du jeune sergent, si impétueux quelques instants auparavant, dont le visage était désormais déformé par une grimace d’horreur pure. Des soldats vinrent rapidement lui porter secours et l’amenèrent, en le portant à bout de bras, aux pieds du capitaine. Le sergent pleurait des larmes de sang et riait tel un possédé, dans un accès de névrose hystérique au-delà de toute raison. Le capitaine tenta en vain de soustraire au jeune officier des bribes d’information, mais ce dernier tremblait de manière incontrôlable et bafouillait des mots incompréhensibles dans le vide, une rage démente dans les yeux et de la bave jaunâtre coulant sur ses joues.
-    Maléfice ! – jura le capitaine outré. – J’ordonne la charge de tout le peloton !
-    Attendez, capitaine. Ça ne sert à rien. – tenta de le raisonner Budmilka.
-    Et pourquoi donc ? – l’interrogea le soldat courroucé.
-    Mais parce qu’il y a un buveur de sang à l’intérieur. – affirma le président avec stoïcisme.
-    Merde.
-    Avant de perdre tous vos hommes, laissez-moi faire. – conclut Budmilka.
Il quitta la compagnie du capitaine et, sans se retourner, avança d’un pas assuré vers la bâtisse menaçante. Il s’arrêta à quelques pas de l’entrée et, en levant les bras, il hurla de sa voix puissante et imposante :
-    C’est terminé, José. C’est terminé !
Pendant quelques instants ce fut le silence, un calme inquiétant, sombre et cruel enveloppa les lieux. Le vent même se calma, comme si la nature elle-même attendait qu’une réponse surgisse de l’antre de la bête. Celle-ci finit enfin par tomber et une voix éreintée, rocailleuse, étouffée par des sanglots de fit entendre :
-    Rien n’est terminé ! Rien ! Tout continue à cause de vous. C’était pas ma guerre. La Lutèce, c’est vous qui m’avez appelé, pas moi. Et j’ai fait ce qu’il fallait pour gagner, mais on n’a pas voulu nous laisser gagner. Et je suis revenu dans le championnat, et j’ai vu ces larves m’attendre au stade, me conspuer comme un criminel. Ils m’ont traité de toutes les saloperies, ils m’ont appelé « le boucher ». Mais qui sont-ils pour me faire des reproches, hein ? Qui sont-ils ? Est-ce qu’ils étaient à ma place, en pleine jungle ? Ils nous jugent sans savoir de quoi ils parlent !
-    C’est un moment dur pour tout le monde, José. – répondit avec emphase Budmilka. – Tout ça c’est du passé, maintenant.
-    Pour vous ! Pour moi la vie ici c’est rien. Au combat on avait un code d’honneur : tu couvres mes arrières, je couvre les tiens. Mais ici, il y a plus rien. – hurlait la voix en pleurs de l’intérieur du bâtiment.
-    José, tu es le dernier d’un groupe d’élite. Un des derniers vétérans de la Lutèce. Ne finis pas comme ça. – supplia Budmilka sur un ton doux, presque paternel.
-    Avant, je coachais une vraie équipe, je pouvais diriger des machines de combat, j’avais en charge une team valant deux millions de pièces d’or. Mais maintenant, j’arrive pas à me débrouiller avec un boulot de gardien de chèvres ! C’est ça que vous m’avez donné ! Des chèvres ! – piaillait José, inconsolable.
-    José, je vais entrer. – indiqua calmement le président. – Ne fais pas de conneries. Libère Duda et rends toi !
-    Jamais ! – protesta vivement le coach de la Lutèce. – Jamais je ne me rendrai ! C’est foutu maintenant ! Vous ne me retrouverez plus jamais, plus jamais !

***

Plus tard, lors de la conférence de presse qui s’en suivit, devant un parterre de journalistes avide de scoop et toutes les caméras de Cabalvision braquées sur lui, Budmilka essaya, tant bien que mal, de minimiser l’incident. Il fut parfait dans son rôle, mêlant humour à l’agacement, jouant avec les commentateurs, faignant l’ignorance, mais toujours en travestissant la réalité des faits.
-    Et vous dites qu’aucun démon majeur ne fut invoqué, de manière incontrôlée et sans autorisation légale, en pleine ville ? – s’étonna une rédactrice d’un magasine sportif, une espèce de grognasse en tailleur serré et pantoufles en velours, portant des binocles de vue allongées, posées sur un petit nez prétentieux.
-    Oui, mademoiselle. Je vous le confirme avec vigueur. L’invocation des démons est strictement encadrée par la Ligue et aucun incident de ce genre n’était à déplorer, ni hier, ni avant. – répondit le président avec calme.
-    Mais pourtant, des témoins assurent avoir vu… - protesta la journalise opiniâtre.
-    Mademoiselle. Je vous le répète ! – reprit Budmilka le sourire aux lèvres, mais un ton autoritaire dans la voix. – Aucun démon ne fut invoqué. Et je ne vais pas laisser les on-dit de quelques poivrots dessoûlant sous un pont dénigrer la probité de nos entraineurs et jeter l’opprobre sur la bonne image de notre championnat. Nous emploierons toutes les voies de droit possibles et imaginables pour défendre les intérêts de la Ligue contre ceux qui s’adonnent à des actes que je qualifierai de diffamation malveillante ! Autre question s’il vous plait.
-    Monsieur le Président ! – un journaliste belle-gueule, vêtu d’un costume à la mode, une cravate nouée négligemment autour du cou, et une barbe fine et soignée lui couvrant les joues, se leva au fond de la salle. – Hervé Matou de Canal Blood Bowl Club. Bonjour. J’ai une question pour le coach Duda, si vous le permettez !
-    Naturellement. – répondit avec entrain Budmilka.
-    Merci. Coach, pouvez-vous affirmer ne pas avoir été séquestré par votre collègue José ? – lança le journaliste alors qu’un brouhaha embarrassant se répandait dans la salle de conférence.
Avachi sur sa chaise, l’entraineur halfling, la mine déconfite et les yeux fatigués, jeta un regard désabusé au président de la ligue. Il se pencha par-dessus la table de conférence et répondit brièvement :
-    Je confirme.
-    Mais pourtant. – protesta le commentateur, feignant la surprise. – Des témoins vous ont vu être kidnappé par plusieurs individus patibulaires devant les locaux de la Lutèce Cup, en plein jour.
-    Vous vous trompez. – lança sèchement Duda. Il jeta un nouveau regard bref à Budmilka et reprit. – Il s’agissait d’un simple entrainement de routine.
-    Vous voulez dire que… - tenta de reprendre le journaliste, fort étonné par la réponse qui lui était donnée, mais fut coupé dans son élan par le président de la Ligue.
-    Ce que l’entraineur veut dire c’est que la Lutèce a effectivement mis en place un plan de protection de ses membres conte toute tentative d’escroquerie, de kidnapping ou d’atteinte quelconque sur leur personne. Le coach Duda s’est porté volontaire pour tester le dispositif et je peux vous affirmer avec force aujourd’hui, que l’essai s’est avéré plus que concluant !
-    Donc tout ce remue-ménage d’hier… - scanda un autre reporter en haussant la voix.
-    Faisait partie d’un process de sécurité testé grandeur nature. Oui, je vous le confirme. – conclut Budmilka, le sourire aux lèvres.
-    Alors. – reprit la journaliste arrogante. – Pouvez-vous nous dire pourquoi tous les gardes municipaux participant à l’opération d’hier ont été mutés à d’autres postes, en dehors de la ville et demeurent injoignables ?
-    Mademoiselle. – Budmilka se crispa soudain, et une note de menace se fit entendre dans la voix. – Je ne vois pas du tout ce que vous tentez d’insinuer avec de tels propos, mais je ne suis pas au courant de telles mesures. Quoi qu’il en soit, la Lutèce Cup ne peut être tenue responsable des décisions de réaffectation des effectifs de la milice !
-    Avouez tout de même qu’il s’agit d’un curieux hasard… - voulut continuer la rédactrice.
-    Je vous arrête tout de suite ! – tonna soudain le président de la Ligue, visiblement courroucé. – Vos insinuations ne reposent sur aucun fondement et sont dénigrantes pour l’institution que je représente. Je ne vous préviendrai pas deux fois !
-    Monsieur le président. – Hervé Matou tenta une nouvelle approche. – On dit le coach José introuvable. Qui dirigera son équipe lors de la prochaine rencontre, contre le Real Boitar ?
-    Vous vous trompez, Monsieur le rédacteur. – Budmilka reprit contenance rapidement et calma sa voix. – Le coach n’est pas introuvable, mais se porte actuellement souffrant pour une durée… indéterminée. La ligue pensant avant tout à l’intérêt de ses nombreux supporters, le match sera joué et… je dirigerai personnellement l’équipe des Lobotomy.
Cette information fit littéralement exploser la salle. Des journalistes élevèrent les voix les uns par-dessus les autres, vociféraient et tentaient de se faire entendre dans le vacarme ambiant, lançant les questions à tue-tête sans une quelconque once d’ordre et de procédure. Un responsable du protocole de la Ligue prit rapidement la parole alors que Budmilka et le coach Duda évacuaient la salle par une porte dérobée :
-    Mesdames, Messieurs, la conférence est close, je répète, la conférence est close. Il n’y aura plus de réponses ce soir…

***

cool


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

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#182 17-04-2019 19:07:21

Duda
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Re: ANNONCE

Et la suite - CR du match

La rencontre tant attendue par l’ensemble du gotha lutécien eut finalement lieu le lendemain soir des événements étranges qui ont fait chavirer de stupeur le monde de l’ovalie à pointes et qui soulevèrent tant de critiques virulentes de la part de la presse spécialisée à l’encontre des dirigeants du championnat, lesquels – selon de nombreux journalistes – cachaient la réalité des faits à de nombreux supporters et fans. Mais la Ligue demeura inflexible dans sa prise de décision et sourde à toute voix dissonante. La rencontre devait bien avoir lieu, même en l’absence de l’entraineur de l’équipe chaotique des Lobotomy et malgré l’état de santé préoccupant de son homologue du Real Boitar.

Une drôle d’ambiance régnait donc au stade du Crampon Doré en cette soirée printanière, alors que les deux équipes se toisaient nerveusement, devant des tribunes à moitié vides – la rencontre ayant été déplacée par deux fois en l’espace de quelques jours pour être finalement organisée en pleine semaine, de nombreux spectateurs ne purent se rendre au stade et durent renoncer à assister au match.

L’animosité latente et bien palpable entre les deux équipes fut, par ailleurs, renforcée par un étrange incident ayant lieu quelques minutes avant le coup d’envoi, lorsque les officiels du championnat obligèrent les joueurs des Lobotomy – par respect du protocole et des traditions ancestrales du Blood Bowl – à ingurgiter le copieux repas préparé à l’attention des belligérants du soir par le chef cuisiner halfling – le désormais autant célèbre que craint Roël Jobuchon ! C’est donc sous les regards amusés des semi-hommes que les guerriers chaotiques, accompagnés de leur démon, durent avaler, malgré leurs vives protestations et leurs lamentations éplorées, un ragoût de chèvre fort déplaisant pour leurs délicats palais. Bien qu’en tant que végétariens convaincus, ils invoquassent le droit au respect de leur étrange pratique alimentaire, leur coach du soir – qui n’était autre que le président de la Ligue lui-même – demeura implacable sur la question et leur ordonna de consommer le ragoût honni jusqu’à la dernière cuiller, ce qu’ils firent, avec dégoût et consternation.

C’est donc dans une atmosphère d’animosité ambiante, de ranc½ur et d’hostilité électrisantes que débuta la rencontre entre les deux équipes et il put être très rapidement constaté que les joueurs du Real Boitar – exaltés par le retour béni de leur entraîneur et avides de revanche suite à la mésaventure dont ce dernier fut victimes (et qui se ressentit malheureusement sur les finances des halflings) – souhaitaient offrir à leurs adversaires du soir une dérouillée dont ces derniers allaient se souvenir longtemps. Naturellement, les guerriers chaotiques n’étaient pas du reste et n’allaient certainement pas se laisser marcher sur les pieds, les sabots et les autres griffes biscornues par ces ridicules et patauds opposants, et s’adonnaient également à ce qu’ils semblaient savoir faire le mieux, c’est-à-dire à distribuer des coups de poings, de pied, de tête et de cornes à tout halfling se trouvant à proximité.

Le début de la première mi-temps du match fit donc place à un spectacle féroce, lors duquel les belligérants du soir s’occupèrent de tout sur le terrain, sauf de la balle, et s’écharpaient mutuellement dans un concert de rage paroxystique, dont il apparut que les étonnants joueurs du Real Boitar purent rapidement prendre le dessus sur les guerriers et démons du chaos, stupéfaits par la résistance et l’agressivité des semi-homes pugnaces. A vrai dire, l’ascendant physique du Real Boitar fut surtout dû à la puissance des deux hommes-arbres de l’équipe, qui clairsemaient avec une régularité effrayante les rangs des joueurs chaotiques, mais également au jeu très limite des halflings, qui n’hésitaient pas à piétiner allégrement tout adversaire qui se retrouvait inopinément au sol – et ce dans l’impunité la plus totale devant un corps arbitral étrangement impavide devant les grossières fautes commises.  A moins que le surprenant avantage physique des halflings ne provienne d’un tout autre subterfuge que ces semi-hommes vicieux aient pu employer ? Personne ne pouvait l’affirmer fermement, cependant les joueurs chaotiques ne semblaient pas être au meilleur de leur état de forme…

Quoi qu’il en soit, à ce rythme, les effectifs des Lobotomy fondèrent comme du saindoux sur une poêle, mais il n’en demeurait pas moins que leur supériorité physique naturelle ne permit pas aux halflings de faire progresser le ballon exactement comme le souhaitait leur coach.

En effet, alors que Calben Drupoil gardait le ballon à l’abri, bien en arrière des lignes, Duda voyant l’horloge tourner, lui ordonna de s’élancer enfin vers l’avant, protégé par ses nombreux coéquipiers. Néanmoins, les joueurs chaotiques, replacés rapidement par Budmilka, présentèrent une défense efficace qui disloqua quelque peu la cage formée par les joueurs halfling. Les rangs épars des Lobotomy ne purent toutefois stopper complètement l’avancée de leurs adversaires et Calben put s’élancer vers l’en-but adverse. Il finit cependant à être stoppé à quelques encablures de la ligne d’en-but – comme à l’accoutumée pourrions nous dire depuis le début de la saison – par une action désespérée d’un gladiateur chaotique, qui réussit à s’extirper du marquage de Lorel Bonvin, à s’infiltrer entre deux autres joueurs halflings et à percuter Lorel de plein fouet, le sonnant et lui faisant naturellement tomber le ballon.

C’est alors que Waldi décida d’entrer en action.

Le vétéran halfling adoré par ses coéquipiers, le sage, respecté et rassurant Waldi, toujours jovial, toujours bien soigné, toujours affable et quelque peu trouillard aussi, le compagnon parfait jamais avare de bons mots, de bonnes paroles ou de conseils avisés pour ses amis, l’organisateur, le logisticien pourrait-on dire de ce joyeux bordel qu’était le Real Boitar, Waldi Belleplume donc, estima qu’il était plus que temps de donner du sien pour l’équipe. Le ballon gisant au sol à quelques pas de la délivrance, ses coéquipiers pris à partie par les quelques adversaires restants sur le terrain et la mi-temps approchant à grands-pas, il ordonna à Cendrechêne de se saisir de sa pansue personne et de le projeter en direction de l’ovale. Avisant la situation, le coach Duda hurla à l’homme-arbre des directives contraires. Waldi était en effet trop ventru, trop volumineux, trop lourd en réalité, pour qu’une telle action soit correctement exécutée. Il demeurait malheureusement éreinté par les événements récents et sa voix fatiguée demeurait complètement éraillée. Ses cris ne portèrent en conséquence pas suffisamment loin de telle sorte que Cendrechêne ne put comprendre les directives de l’entraineur. Le gardien sylvestre s’exécuta donc et, avec une certaine difficulté tout de même, projeta en l’air le ventripotent semi-homme.

La colombe blanche s’envola donc dans les cieux…

Il existe encore aujourd’hui, parmi les peuplades autochtones des lointaines montagnes Andas en Lustrie, une légende retraçant le vol de Waldi. Elle raconte qu’une colombe au plumage immaculé comme les neiges éternelles de leurs montagnes natales s’envola un jour de la branche d’un chêne millénaire et qu’elle partit en direction du soleil éternel. Il est dit qu’elle plane toujours, observant du haut des cieux la vie des êtres en-dessous, et que le jour où elle descendra sur terre, un grand bonheur tombera sur les êtres vivants, car elle apportera avec elle la paix, le bonheur et la prospérité, toutes les souffrances, toutes les maladies, toutes les douleurs auront disparu, et tous vivront heureux et pour longtemps…

Mais ce n’est qu’une légende de bouseux qui ne connaissent rien au Blood Bowl, car en réalité, Waldi tournoya lamentablement dans les airs, dans un grand concert de couinements apeurés, et tomba la tête la première et s’écrasa au sol telle une grosse fiente de pigeon, se rompant le cou par la même occasion. Ce fut son premier, mais également son dernier, moment de gloire car il rendit l’âme en l’espace de quelques instants, alors que ses camarades inquiets se massaient autour de son corps flasque et inanimé. La mi-temps les surprit au même moment, mais les halflings demeuraient impassibles, pressés les uns contre les autres, lorgnant de leurs yeux humides la dépouille morbide de leur cher ami. Le médécin de l’équipe accourut immédiatement, mais il n’y avait plus rien à faire, la tête de Waldi reposait sur la pelouse dans un angle étrange par rapport au reste de son corps. Aucune potion ne pouvait plus sauver leur compagnon débonnaire, aucune prière ne pouvait lui venir en aide, aucun miracle ne saurait remettre un souffle de vie dans l’enveloppe charnelle de l’halfling. Il était parti le sage et placide Waldi, l’altruiste et affectueux camarade, habituellement si avisé, si posé, si réfléchi.

C’est donc les mines dépitées, déconfites, les regards torves et les c½urs lourds que les halflings quittaient le terrain à la pause, portant à bout-de-bras la volumineuse dépouille de leur camarade tombé au combat. Les jurons qu’ils poussaient, leurs cris de rage et leurs appels à la vengeance, semblaient toutefois présager que la seconde partie du match n’allait pas être de tout repos pour leurs adversaires.

Et il n’en fut pas autrement !

Seuls six joueurs de Lobotomy, dont leur fameux buveur de sang, réapparurent en effet sur le terrain au coup d’envoi, face à un effectif au complet d’halflings revanchards. Dans ces conditions – et compte-tenu d’une part de la bonne disposition des joueurs du Real Boitar et d’autre part, d’un état de forme de plus en plus préoccupant pour les chaotiques, chancelants, tremblants sur la pelouse, le regard vague et les intestins retournés – l’attaque menée par l’équipe de Khorne ne pouvait aucunement aboutir. Ce d’autant plus que les deux hommes-arbres firent, pour une fois, preuve d’un professionnalisme implacable, laminant ce qui restait de la première ligne des chaotiques. Une nouvelle fois, les effectifs des Lobotomy se limitèrent à quelques individus éparpillés sur la pelouse, s’intéressant plus à fuir les coups portés par leurs adversaires furibonds qu’à porter le ballon dans l’en-but adverse. Ce dernier fut d’ailleurs rapidement récupéré par Tholot – le capitaine du Real Boitar – après que le gladiateur qui en en avait la charge fut mis au sol par une attaque pleine de fougue de la part du jeune Hal Pleinepense, lequel reçut les acclamations et les vivats des spectateurs présents dans les gradins.

Ayant pris possession du ballon, le Real Boitar put enfin s’adonner à ce qu’il savait faire de mieux, à savoir maltraiter à plusieurs chaque joueur adverse. Cette tactique porta ses fruits car le nombre des joueurs du chaos diminua encore de telle sorte qu’au milieu de la seconde mi-temps ne demeuraient sur la pelouse, côté Lobotomy, que trois joueurs, dont le fameux buveur de sang, lequel cherchait avant tout à échapper aux branches des deux gardiens sylvestres. Mais il ne put jouer longtemps à ce jeu car il finit par être chargé et plaqué au sol par une charge violente de Cendrechêne, qui envoya l’immonde bête valdinguer dans la pelouse humide du terrain. Il n’en fallait pas moins pour le vicieux et téméraire Lorel Bonvin, qui profita de l’occasion pour sauter à pieds joints sur le dos du monstre. Le résultat fu du plus bel effet pour le public lubrique, toujours avide de sang et de souffrance, car le démon poussa un rugissement infernal de douleur et de rage mêlés puis s’affaissa entièrement, et demeura immobile. Le service médical apparut rapidement auprès de l’affreux buveur de sang, mais ne réussit pas à le réanimer. La bête fut donc évacuée de la pelouse pour le restant de la rencontre !

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La chasse à l’homme reprit alors de plus belle, les deux derniers guerriers étant rapidement maitrisés par des halflings assoiffés de vengeance. Un premier guerrier tomba, étourdi par un violent coup porté par Grisfrêne, de sorte qu’il ne restât qu’un seul joueur des Lobotomy sur la pelouse. Ce dernier gisait au sol, apeuré, tremblant et suppliant, alors que plusieurs semi-hommes se dressaient au-dessus de lui.
-    Il est à nous ! – hurla Sherlock à pleins poumons, une rage funèbre dans le regard. – On l’massacre !
-    Attendez les mecs. – répliqua Eggon, le souffle court. – J’ai une meilleure idée.
Sur ce, il demanda à Cendrechêne d’approcher.
-    Il est à toi Cendre. – dit le vétéran halfling, un rictus mauvais apparaissant sur ses lèvres. – Fais toi plaisir !
Un rire atroce, affreux, terrifiant, tel le grincement d’un linteau qui se plie et qui rompt, sortit de l’immense gueule qui se dessinait sur le tronc ancestral de l’homme-arbre. Ce dernier leva son immense pate boisée et l’abattit de toutes ses forces sur le front du malheureux guerrier gisant sur le sol. Le public hurla d’horreur et de plaisir mêlés en espérant voir la cervelle du gladiateur réduite en bouille sanglante. Etrangement, il n’en fut rien car les racines entremêlées sous la patte de l’homme-arbre farinèrent l’élan de sa jambe et le solide casque en acier que portait l’agressé fit le reste. Aussi étrange que cela puisse paraître, le guerrier du chaos sortit indemne de l’incident. Le c½ur battant à tout rompre, le souffle haché et le regard dans le vague, il passa sa main sur toutes les parties du corps – comme pour s’assurer qu’elles étaient encore bien là – se leva et s’échappa à toutes enjambées, en hurlant, sous les regards médusés des halflings qui semblaient ne pas comprendre comment cet adversaire, plus que chanceux, pouvait encore être en vie. Quoi qu’il en soit, celui à qui toute l’action n’échappa pas fut l’arbitre du soir. S’il ne voulait pas s’attirer le courroux des commentateurs, des spectateurs et des officiels de la Ligue, il ne pouvait objectivement laisser une telle flagrante agression échapper à toute sanction. Il dut sévir et expulsa tout bonnement l’homme-arbre du terrain, sous les huées des gradins, pour tentative de violence non-autorisée sur adversaire inoffensif.

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Il ne restait donc plus qu’une chose à faire au Real Boitar, et qui consistait à enfin porter le ballon dans l’en-but adverse. Tholot se chargea de ce fardeau, alors que la foule en liesse scandait le nom du vétéran halfling. Mais ce dernier n’avait pas le c½ur à rire. Leur ami s’en était allé et rien ne saurait le remplacer.

Le match se terminait certes en une victoire nette et sans bavure pour les halflings, qui déjouèrent de nouveau tous les pronostics et firent preuve d’une vaillance et d’un courage exemplaires. Mais quelle victoire au goût amer ! Quelle triste soirée à vrai dire ! Personne ne riait dans le vestiaire. Tous demeuraient silencieux, impavides, accablés. Le corps sans vie de leur camarade gisait sur un brancard, les yeux clos et le visage paisible. Et tous savaient que le temps béni de l’insouciance joyeuse s’en était allé, définitivement allé. Personne n’avait le courage, l’envie ou la force de prendre la parole et, sagement, le coach Duda laissa ses joueurs ruminer seuls leurs sombres pensées. Il s’adonna avec eux à un mutisme lugubre, purificateur et peut-être réparateur, mais il savait que les c½urs mêmes de ses joueurs étaient touchés, changés pour toujours. Waldi décédé, ce fut un des piliers fondateurs de l’équipe qui s’effondrait, et il n’en fallait que peu pour que l’ensemble de l’édifice qu’il bâtit avec l’aide des autres vétérans s’écroule totalement.

Alors il les laissa seuls, tristes et éteints, et partit se soûler sa sale troche à en perdre conscience. Une fois n’est pas coutume...

cool


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#183 17-04-2019 20:19:19

Scarabee
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Re: ANNONCE

Le « Lepropre » qui s’est glissé dans ton histoire en remplacement de « Lepr0pre » est épique big_smile
Il est fort ce poisson du 17 avril !


Scarabee, sinon, j'ai une nouvelle fois rien compris à ton intervention — Duda®2023

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#184 17-04-2019 21:18:50

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Re: ANNONCE

Et bien, et bien, et bien...
Et bien c’est de la put*in de balle !!!
Ça vaut bien un deuxième post

Encore une fois félicitations l’artiste big_smile
José est saisissant dans son propre rôle ! Il mérite un Oscar.


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#185 18-04-2019 09:47:39

Duda
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Re: ANNONCE

Scarabee a écrit:

Et bien, et bien, et bien...
Et bien c’est de la put*in de balle !!!
Ça vaut bien un deuxième post

Encore une fois félicitations l’artiste big_smile
José est saisissant dans son propre rôle ! Il mérite un Oscar.

Content que ça te plaise !   Smiley 061
Il faut avouer qu'avec José, c'est facile d'inventer...

Quant à "Lesale", oui, souvent je glisse des conneries de ce genre dans le texte. Et là aussi, c'était facile big_smile


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#186 18-04-2019 10:06:24

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Re: ANNONCE

C’est pas toi, c’est le saint Algorithme.

Lepr0pre a fait en sorte que dès que tu mette son nom dans le texte, ça le remplace.
Hier soir c’etait par « le plus grand joueur de tous les temps ».
Aujourd’hui c’est par « lesale »
Et demain... on verra smile

Moi visiblement ça me remplace par « king of spam ».
Et c’est vrai que j’adore le jambon en boîte.

Dernière modification par Scarabee (18-04-2019 10:09:23)


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#187 18-04-2019 10:08:24

Duda
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Re: ANNONCE

OUI !!! Tu as raison en plus ! big_smile
Parfois j'écrit tellement, j'sais plus où j'en suis, sérieusement...


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#188 30-10-2019 12:19:32

Duda
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Re: ANNONCE

Je ne vous ai pas oublié wink

« La question qu’il faut se poser c’est ce traitre qu’il faut éliminer du groupe »
-    Patrice Evra, Knysna, juin 2010




La grève

Le coach Duda était irrité. Il bouillait, il fulminait à l’entrée du petit stade sur lequel devait se dérouler la séance d’entrainement ouverte d’aujourd’hui, alors qu’une pluie fine s’abattait depuis le petit matin sur la campagne environnante, délavant le paysage vallonné et boisé des alentours en des tâches pastel verdâtres. Le printemps était arrivé et amenait dans sa besace les sempiternelles bourrasques et giboulées qui transformaient l’herbe grasse en bourbier spongieux et mettaient à rude épreuve les nerfs de tout sportif normalement constitué. Toujours vêtu de sa sempiternelle pélerine grise, Duda pestait donc contre les éléments de la nature qui semblaient prendre un malin plaisir à le torturer de si bon matin. Mais il râlait également contre les officiels de la ligue, qui n’eurent rien de mieux à faire que d’organiser une séance d’entrainement obligatoire, ouverte à la presse et aux fans de l’équipe du Real Boitar. Autant dire que par un temps pareil, pas le moindre supporter ne pointa le bout de son nez, au contraire de la meute de journalistes, commentateurs, critiques et hyènes de cimetière diverses et variées, venue glaner le moindre scoop sur les péripéties actuelles de l’équipe halfling.

Car il était vrai qu’il y avait beaucoup à dire – et encore plus à écrire – sur le comportement récent des fameux semi-hommes du Real Boitar. A tout le moins, leur attitude pouvait être qualifiée de peu sportive, mais il s’agissait certainement d’un doux euphémisme. Et naturellement, cela mettait en rogne leur entraineur.

Celui-ci se maudissait également d’avoir cédé, sous l’insistance des membres du Crew, à la proposition qui lui avait été faite par la Ligue de prendre quelques jours de congés après la mésaventure qui lui était arrivée récemment. – « Prends un peu de repos, Duda. » - lui avait soufflé amicalement Pedro. – « T’as pas la tête au Blood Bowl avec tout ça. Et t’inquiètes pas, il n’arrivera rien à ton équipe ». Tu parles… Naturellement, dans un premier temps, il avait refusé, la fin de saison approchait à pas de géant et les matchs à venir ne présageaient rien de bon pour le Real Boitar. Qui plus est, il lui fallait constamment surveiller les agissements irréfléchis et douteux de ces petits imbéciles heureux, jamais avares de larcins, et ce sans parler d’excès en tout genre. Mais il finit par accepter. Voyant la détresse et le chagrin dans lequel étaient tombés les halflings après le décès malencontreux de Waldi, il se ravisa et acquiesça à la proposition de la Ligue. – « Ne prends pas ça comme un congé, si tu veux. » - avait affirmé Budmilka. – « Y’a une conférence internationale des Ligues de Blood Bowl, organisée dans le Beach & Bowl Resort sur l’Ile de Mifasol. Disons qu’on t’y envoie comme représentant de la Lutèce Cup, si ça t’arrange. ».

Il y a passé une semaine. Une semaine agréable, il convient de l’avouer, à se prélasser dans les salons luxueux de l’hôtel, à profiter des joies de la piscine et des bains de vapeur, à dîner chaque soir dans les divers restaurants gastronomiques du complexe et à faire sauter quelques jolis brins de filles sur ses hanches. Certes, il assista à quelques conférences thématiques, insipides à souhait, et dut serrer un nombre incalculable de paluches d’officiels de tous bords, la plupart gras et dégarnis, fumant de gros cigares un verre de champagne ou de scotch à la main, souriant obséquieusement aux affaires qui se réglaient dans les couloirs du congrès. Mais toute cette ambiance finit rapidement par le lasser et le dégoûter littéralement. Il avait hâte à retrouver les terrains, à récupérer ses joueurs et à se remettre à travailler pour tenter de finir le championnat dans les meilleures conditions et la tête haute. Un soir, il demeurait allongé sur son lit, les draps défaits et humides des sécrétions vaginales de la blondasse fluette assoupie sur son bras. Elle avait été très gentille, et semblait moins gourdasse que les précédentes. En escort-gril modèle, elle lui avait fait la totale durant leurs ébats nocturnes, jouant à la perfection son rôle qui allait de la fille timide à la maîtresse assoiffée, ponctuant ses mouvements de bassin lascifs par d’agréables gémissements, se mordillant l’index et se caressant langoureusement sa poitrine généreuse et bien ferme. Non franchement, c’était bien. Les gars de la Lutèce ne s’étaient pas moqués de lui. Mais il demeurait insatisfait, stressé et blasé. Une sensation désagréable lui chatouillait l’échine, une appréhension venue de ses entrailles, une crainte sourde lui tamponnait l’arrière du crâne. Il pressentait qu’une calamité allait bientôt arriver et il n’arrivait pas à se défaire de cette sensation désagréable de catastrophe imminente. Il fallait qu’il s’active, et rapidement. « Putain, j’suis trop vieux pour ces conneries » - se dit-il en faisant un bond soudain de son lit. La jolie poupée s’agita nerveusement sans se réveiller, alors que Duda enfilait déjà ses frusques. Il partit sur un coup de tête, juste une intuition qui semblait ridicule, mais les jours qui suivirent lui donnèrent raison.

Et ça le mettait en colère d’avoir toujours raison, putain.

En effet, il retrouva naturellement ses joueurs complètement défaits, imbibés d’alcools et de substances toxiques douteuses, dans un salon privé de l’auberge du Lotus Noir. Aux dires de la patronne, ils avaient fait la fête pendant toute une semaine – la durée de l’absence du coach en réalité. Ce qui devait être une soirée d’adieu sobre pour leur ami Waldi, se transforma rapidement en journée de beuverie, puis en semaine de débauche dégénérée et funeste. Les couillons aux visages ravagés par les excès, aux corps rendus flasques par l’alcool et les drogues, et aux ventres bouffis par l’ingurgitation acharnée de quantités gargantuesques de viandes, tourtes, fromages, charcuteries et pâtisseries diverses, n’arrivaient pas à mettre un pied devant l’autre. Duda les avait quittés en pleine forme après leur match contre les Lobotomy, et il les retrouvait dans un état végétatif et dépravé une semaine après. C’était à en pleurer. Tholot lui avait pourtant assuré, avant son départ : - « Vous inquétez pas coach. On va être sages. On a pas la tête à faire la fête, vous comprenez. ». Oui, il le comprenait. Waldi. Mais il aurait dû s’en douter. Il avait relâché son attention et il avait été négligeant. Peut-être que la mort du débonnaire halfling l’avait perturbé plus qu’il n’osait se l’admettre. Dans tous les cas, il aurait dû voir venir les problèmes, il aurait certainement pu anticiper le comportement décadent et irréfléchi de ses joueurs, il aurait pu les faire surveiller. A la place, il leur a fait confiance. Quelle erreur ! Et naturellement, ça le rongeait au plus haut point.

Ça le stressait d’autant plus que, évidemment, après le scandale qui accompagna leur dernier match, la presse sportive s’était faite un malin plaisir à relater les péripéties alcoolysées et décadentes du Real Boitar, à grands coups de reportages en immersion, de critiques virulentes, de brèves cocasses et d’anecdotes glanées auprès des serveuses, des videurs et des filles du Lotus Noir. Autant dire que l’image de l’équipe était plus qu’écornée, alors qu’elle aurait dû briller de mille feux après leur dernier coup d’éclat. Duda maudissait donc ces chacals de journalistes, prêts à fouiller les poubelles, à remuer la mélasse et à sauter sur le moindre os rongé pour vendre leur calamiteux torchons. Or, c’est bien avec eux qu’il devait composer ce matin car l’entrainement était bel et bien ouvert à la presse et aux médias. Et ça lui mettait les nerfs à vit.

Ça l’énervait d’autant plus que les journalistes et commentateurs de tous bords attendaient depuis maintenant une heure, cachés sous leurs ridicules parapluies aux couleurs de leurs différents médias, que l’entrainement commence.

Or, ce qui faisait surtout rager le coach Duda, ce qui l’irritait, lui faisait grincer des dents, lui faisait bouillir la cervelle et qui le mettait dans un état de colère froide et funèbre, c’était que lui aussi attendait comme un gland que ces enfoirés de petits salauds se présentent enfin sur ce putain de terrain d’entrainement !

Or des halflings et des hommes-arbres il n’y avait la moindre trace.

Les merdeux avaient mis plusieurs jours à se remettre de leur semaine de débauche et de picole. Les hommes-arbres n’étaient pas mieux lotis, imbibés qu’ils étaient de liqueur d’écorce de bouleau. Le coach dut les transporter par charrettes au quartier général, où il fut obligé de les abreuver d’eau fraiche pendant trois jours entiers avant qu’ils daignent faire le moindre mouvement de branche. Certes, il passa les jours suivants à les invectiver et les maudire, en distribuant quelques taloches bien placées, et bon gré mal gré, les joueurs obtempérèrent et émergèrent peu à peu de leur état catatonique. Mais le coach sentit que quelque chose était brisé, que les gars étaient au bout du rouleau, déprimés, fatigués, désabusés et lessivés par une saison éreintante et pleine de rebondissements. Malgré tout, il fallait faire le boulot, c’est pour ça que la Ligue les payait, c’est ce qui attirait les sponsors et faisait entrer le pognon dans les caisses de l’équipe. Ils avaient tous signé et ils devaient se comporter en professionnels jusqu’au bout, quoi qu’il en coûte.

Alors il y avait entrainement ce matin. Pas le choix. Mais ces blaireaux irritants et acariâtres, ces bâtards de rejetons de trollesse vérolée, semblaient s’être volatilisés, au grand désarroi de Duda.

Il allait clore ce spectacle ridicule, il allait mettre fin à cette parodie tragi-comique et envoyer au diable la presse, les sponsors et les fans (qui n’étaient de toute façon pas venus), lorsqu’un bruit de machine à vapeur et de soupapes en action se fit entendre sur la route. Et effectivement, la Phantom émergea lentement de derrière le virage et pénétra au ralenti dans l’enceinte du complexe sportif.
-    Putain c’est pas trop tôt. – jura le coach en s’approchant du véhicule, alors qu’une vague de murmures et de cris traversa les rangs des journalistes et reporters agglutinés derrière le cordon de protection.
Les deux hommes-arbres descendirent de l’arrière du carrosse, dans un concert de grincements de bois et se positionnèrent de part et d’autre de la portière du véhicule. Celle-ci s’ouvrit calmement et les flashs des appareils magiques des journalistes se mirent à crépiter dans l’air humide.  Une noirceur profonde exsudait de l’intérieur du véhicule, alors que la pluie brouillait les regards et délavait les contours.  Rien ne semblait bouger dans la cabine de la Phantom et quelques journalistes protestèrent en exprimant leur agacement. Plusieurs minutes passèrent et la situation devint véritablement embarrassante. Le silence se fit parmi les membres de la presse, ponctué de temps en temps par quelques éclats de rire nerveux. Plus qu’énervé, Duda crispait sa mâchoire, un afflux de sang dans la tête lui causant soudain une migraine virulente.
-    Qu’est ce que c’est que ces conneries encore. – aboya-t-il entre ses dents en s’avançant vers le véhicule. – A quoi vous jouez, bande de cons ? – lança-t-il en direction de ses joueurs mais seul un silence de mort lui répondit.

Soudain, alors qu’il n’était qu’à quelques pas du marchepied du carrosse, plusieurs visages rubiconds et bouffis, qu’il connaissait si bien, émergèrent de la cabine. Tholot s’avança, se positionnant dans l’encadrement de la portière, ses camarades s’agglutinant derrière leur capitaine.
-    Coach. – lança lapidairement le halfling, la mine grave et les traits marqués.
-    Tholot. – rétorqua Duda, imitant le ton étrangement officiel de son joueur. – C’est quoi ce cirque, bordel ? Ça fait plus d’une heure que je vous attends…
-    On s’entraine pas, ce matin. – intervint l’imposant semi-homme en coupant la parole à son entraineur.
-    De quoi ? – s’étouffa celui-ci, la surprise se lisant sur son visage.
-    C’est la grève, coach. – expliqua posément le capitaine.
-    Oué, la grève ! – répliquèrent vivement plusieurs voix derrière Tholot. – On fait la grève ! Y’en a marre ! On en a gros ! – hurlèrent de concert les halflings.
-    Non mais vous vous moquez de moi, les rase-mottes ? – ironisa l’entraineur. – C’est une blague, c’est ça ? Vous croyez vraiment qu’on a le temps…
-    Ce n’est pas une blague, coach. – l’interrompit le semi-homme, toujours sur le même ton grave. – On sort pas de la Phantom.
-    Oué, on bouge pas d’là ! – jappèrent plusieurs de ses congénères.

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Duda regardait ses joueurs, estomaqué. Il n’arrivait pas vraiment à savoir si les halflings lui jouaient un nouveau sale tour, ou s’ils étaient réellement sérieux. Il essaya de déchiffrer la vérité sur leurs visages burinés, mais ne put rien déceler dans les regards ou les attitudes de ses protégés, et ça le perturbait. Il jeta brièvement un coup d’½il dans son dos, où la masse des journalistes attendait, impatiente et surprise, que les joueurs viennent répondre aux questions des médias. Les gratte-papiers s’agitaient de plus en plus, des cris et des invectives commençaient à fuser, et le crépitement des flashs semblait s’accélérer. L’entraineur tourna son regard vers les des deux hommes-arbres, qui attendaient stoïquement des deux côtés de la portière de la Phantom.
-    Et vous, les gars ? – les questionna Duda, une note de sarcasme dans la voix. – Vous faites grève aussi ?
Naturellement, les deux gardiens sylvestres impassibles ne répondirent pas, se contenant de fixer de leurs yeux ancestraux l’horizon lointain.
-    Coach. – intervint de nouveau Tholot. – Cherchez pas, ils nous suivent. Tenez. On a une déclaration à vous faire lire aux médias. On ne dira rien de plus. – conclut le capitaine en tendant à son entraineur une feuille de papier jaunâtre, sur laquelle un texte semblait avoir été rédigé à la hâte.
Interloqué, Duda saisit la fiche et tenta de déchiffrer l’écriture sur le document :

« Par ce communiqué, tous les joueurs du Real Boitar sans exception veulent affirmer leur opposition avec la décision prise par la Lutèce Cup de ne pas avoir exclu l’équipe des Lobotomy de la ligue. Nous regrettons les incidents qui se sont produits avant le match entre nos deux équipes, mais nous regrettons plus encore la décision de la ligue de maintenir le match, lequel a coûté la vie à l’un de nos camarades. A la demande du groupe, son capitaine avait engagé une tentative de dialogue visant un report de la rencontre, mais sa démarche est restée volontairement ignorée. De son côté, la Lutèce Cup n'a à aucun moment tenté de protéger le Real Boitar. Elle a pris une décision sans même consulter l'ensemble des joueurs, uniquement sur la base des faits rapportés par la presse.
En conséquence, et pour marquer leur opposition aux plus hautes instances du Blood Bowl lutécien, l'ensemble des joueurs a décidé de ne pas participer à la séance d'entraînement. Par respect pour le public venu assister à cette séance, nous avons décidé d'aller à la rencontre de ces supporters, qui par leur présence, nous apportent un soutien sans faille. Pour notre part, nous sommes conscients de nos responsabilités, celles de porter les couleurs de notre équipe, mais celles également que nous avons à l'égard de nos supporters, de leurs cadres, éducateurs, bénévoles et des innombrables enfants halflings qui gardent les joueurs du Real Boitar comme modèles. Pour ce qui nous concerne, nous n'oublions rien de nos devoirs. Nous ferons tout individuellement, bien sûr, mais aussi dans un esprit collectif, pour que le Real Boitar retrouve son honneur par une performance enfin positive. »


Le coach dut se frotter les yeux d’étonnement en lisant l’ahurissante déclaration que lui avait présentée Tholot. Il s’ébroua, véritablement surpris, ne sachant pas toujours pas s’il devait vraiment prendre la situation au sérieux. Le ridicule du texte était plus que frappant, ce qui signifiait qu’il avait été, bel et bien, rédigé par ces petits saltimbanques. A première vue, il ne pouvait logiquement s’agir que d’une blague, d’un mauvais tour plus que pathétique de la part des guignols qui lui servaient de joueurs. Mais d’un autre côté, la teneur du courrier et les propos tenus étaient tellement grotesques, tellement insipides, que – qui sait – ils étaient peut-être sérieux ces petits cons.
-    Qui c’est qui vous a pendu ce torchon ridicule ? – demanda Duda avec aversion en levant les yeux de la feuille.
-    C’est nous, coach. – répondit posément Tholot. – Et c’est pas un torchon. On est sérieux. Nous exigeons que vous le lisiez à la presse.
-    Vous quoi ? – éructa l’entraineur en plissant les yeux, un sentiment de colère naissant au fond de sa gorge. – Vous exigez ?
-    Oué, on a des droits nous ! – glapirent quelques halflings. – On s’est renseignés auprès du syndicat des joueurs d’abord ! On a l’droit de faire grève, d’abord ! Que même c’est inscrit dans la convention collective du joueur de Blood Bowl !
Les tripes de Duda se nouèrent soudain, et un courroux intense monta des profondeurs de son âme, lui tordant le visage dans un rictus mauvais. De rage, il arracha le petit sablier qu’il portait attaché autour du cou et jeta l’objet au loin, derrière une haie d’arbustes qui longeaient le stade.
-    Vous osez vous moquer d’ma gueule, bande de chiures de bouc ?! – hurla-t-il de toutes ses forces à l’attention des semi-hommes, alors que les flashs des appareils des journalistes se mettaient à crépiter de plus belle dans son dos. – Pour qui vous vous prenez, bordel !
-    Coach. Calmez-vous. – voulut intervenir Tholot, alors que ses camarades, surpris par l’explosion de colère de leur entraineur, reculaient au fond du véhicule. – En tant que joueurs, nous avons des droits…
-    Des droits ?! – l’entraineur pesta de plus belle. – J’vais vous montrer où j’les fous vos droits, moi ! J’vais vous la faire bouffer, votre satanée déclaration d’mes couilles ! Et par l’autre bout, espèces de p’tits enfoirés !
-    Mais coach, nous voulons juste exposer notre opinion. - tenta d’argumenter le capitaine halfling, visiblement sans réussite.
-    J’me crève à vous sortir d’la merde où vous étiez ! J’vous remets sur le droit chemin, j’refais de vous des vrais joueurs, et c’est comme ça que vous me remerciez ?! – éructait Duda, la bave aux lèvres, le corps agité par des spasmes de fureur. – Je ne vais pas m’laisser tourner en bourrique par quelques mi-portions avinées ! Ca suffit maintenant ! – pesta-t-il, les yeux exorbités. – Sortez et au turbin ! Cent pompes chacun !
-    Hors de question, coach. Désolé. On fait grève. – répondit sèchement Tholot, cependant ses camarades ne le soutinrent pas vraiment, leurs invectives se turent, et ils semblèrent se murer dans un silence maussade.
-    Ah oué ?! Vous ne voulez pas sortir ?! – demanda Duda, un sourire carnassier se dessinant sur ses lèvres.
-    Non. – confirma fermement Tholot.
-    Non ? Vous êtes sûrs ?! – renchérit l’entraineur.
-    Non. Sûrs. – certifia le vétéran halfling.
-    C’est ce qu’on va voir ! – tempêta Duda en plongeant la main dans les plis de sa veste élimée. Poussant un cri de fureur, il en sortit une vieille branche tordue, décorée de multiples babioles et colifichets bariolés, qu’il leva bien haut, en direction du ciel.
-    Le daaaaaarrrrrrd de Kuuuuuurnouuuuuus ! – les deux hommes-arbres sortirent de leur torpeur et portèrent leurs regards à la relique elfique que l’entraineur serrait dans sa main.
-    Cendrechêne, Grisfrêne. – Duda s’adressa à ces derniers d’une voix lugubre et enrouée, luttant pour retrouver son sang-froid, tout en lorgnant en direction des halflings qui, agglutinés au fond du véhicule, scrutaient ébahis, la réaction de leur entraineur. – Vous voulez bien expliquer gentiment à vos petits camarades ce que je viens de leur demander ? Je n’aime pas me répéter.
Les yeux des deux hommes-arbres ancestraux se mirent alors à luire d’une lueur malveillante, alors qu’un rictus carnassier naissait sur les contours de leurs gueules béantes. Ils se tournèrent lentement vers les grévistes, dont les visages décomposés sont devenus soudainement blêmes.

Les journalistes agglutinés ce matin-là au bord du terrain d’entrainement témoignèrent plus tard qu’ils n’avaient encore jamais vu d’équipe de Blood Bowl suivre un entrainement d’une manière aussi consciencieuse, appliquée et sérieuse que celle dont firent preuve ce jour les halflings du Real Boitar…

***

Le lendemain, alors qu’un agréable feu de cheminée réchauffait l’atmosphère douillette de la salle commune de l’auberge du Crampon Doré, les semi-hommes affalés sur des coussins moelleux disposés autour de l’âtre pensaient leurs plaies et bosses suite à la verte correction qu’ils ont reçu de la part de leur entraineur et des deux hommes-arbres.
-    T’ain, on a pris cher les gars ! – Sherlock s’apitoya tristement sur le sort de l’équipe.
-    Ferme-là, Sherlock ! – grimaça Tholot en se massant la mâchoire. – On est bien avancés, ‘vec tes idées à la con !
-    Ba quoi ! – protesta vivement l’intéressé. – C’était une bonne idée !
-    T’a qu’à t’la fout’ dan’l’cul, ton idée ! – le héla Calben d’une voix enrouée. 
-    Jamais on aurait dû faire c’te connerie. – constata avec tristesse Eggon.
-    Effectivement, jamais vous n’auriez dû l’faire. – tonna soudain la voix grave de leur entraineur qui venait de surgir dans l’encadrement de la porte menant aux étages. Les halflings tournèrent alors leurs regards crispés et embarrassés vers le coach, inquiets de subir une nouvelle série de remontrances de la part de celui-ci.
Cependant, Duda n’en fit rien. Il s’avança vers les semi-hommes en hochant la tête, le regard dépité et la mine désabusée, et s’installa au milieu d’eux sur un coussin inoccupé, en poussant un soupir chagriné. Il plongea la main dans une besace fatiguée et en sortit une liasse de paperasse qu’il jeta négligemment au sol.
-    Vous m’fatiguez, les mi-portions. – déclara-t-il en scrutant pensivement les flammes dans la cheminée. – Vous m’fatiguez vraiment. Tenez. Lisez. J’espère que vous êtes contents de vous.
Les halflings scrutèrent le petit tas de journaux étalé devant eux. Visiblement, tels des vautours affamés, les différents médias papier se sont avidement accaparés de la petite tentative de putsch avorté du Real Boitar. La grève faisait manifestement les choux gras des quotidiens, qui se délectaient des turpitudes récentes des halflings. Les photos des joueurs et de l’entraineur figuraient en une de quasiment tous les journaux sportifs et les titres racoleurs enchainaient les calembours et les jeux-de-mots douteux sur les évènements de la veille, sur lesquels les diverses rédactions n’avaient, à l’évidence, que des informations très parcellaires voire totalement erronées : « Du rififi chez les Petits » - annonçait l’Epique Magazine, alors que le Harold Tribune proclamait en grand : « Le Real Boitar : un royal merdier ». Le Lutèce Vox titrait, quant à lui, un laconique « Clash » écrit en lettres de sang au-dessus de la photo de l’entraineur et du capitaine de l’équipe se regardant en chiens de faïence.
-    On est désolés, coach. – répondit de manière gênée Tholot, après avoir parcouru rapidement les diverses unes de la presse. – On vous l’a déjà dit…
-    On est pas fiers de nous. – Eggon soutint son capitaine, la mine attristée.
-    Oué oué, je sais. – répliqua Duda d’un ton las. – Il n’empêche que vous êtes une sacrée bande de branquignoles. J’me demande parfois ce que j’vais faire de vous.
-    Ba, là, tout de suite, c’qu’on aimerait, c’est se reposer. – affirma Sherlock d’une voix crispée. – Rien à fiche de ces torche-culs. Et vous nous avez sacrément amochés, hier, si j’peux me permettre.
-    Non, tu peux pas. – Levant un sourcil, Duda jeta un regard interloqué à son joueur.
-    Putain, boucle-là, Sherlock. -  Tholot réprimanda son camarade entre les dents.
-    Bref. – reprit le coach du Real Boitar. – On oublie l’incident. D’accord ?
Personne ne souffla mot. Sous le regard sévère et sérieux de leur entraineur, les halflings baissèrent les têtes, visiblement mal à l’aise, et quelques raclements de gorge ou toussotements très gênés se firent entendre. Finalement, après quelques instants de mutisme embarrassant, Tholot reprit parole :
-    D’accord coach. On oublie. Vous nous sermonnez comme des gosses, mais on l’a mérité. Pas vrai, les gars ? – lança-t-il en direction de ses camarades.
-    Oué, vrai. – répondirent quelques-uns d’entre eux, de manière confuse.
-    Bon, c’est quoi la suite alors ? – osa questionner le capitaine halfling.
-    C’est simple, les mecs. – affirma Duda d’une voix posée. – La suite, c’est des orques.
-    D’la pô’vert’ ? – intervint Calben avec dégoût. – D’la fient’ d’troll ?
-    Ouaip. Et pas n’importe lesquels. – confirma le coach en se grattant nerveusement la joue. – Les gros bras de Buckler. Des vrais salopards de première…
-    Et ça veut dire ? – questionna Eggon, la voix crispée.
-    Ça veut dire que vous allez prendre très cher, les mi-portions. – déclara l’entraineur, un rictus sur les lèvres. – Et donc…
-    Et donc, nous faut un plan. – conclut pensivement Tholot à la place de son entraineur.

Or, ce fameux plan, expugné après mûres réflexions, débats envenimés et discussions passionnées, des cerveaux abîmés et torturés du coach et des joueurs du Real Boitar, reposait sur trois principes de base, trois pierres angulaires, trois piédestaux d’airain visiblement infaillibles aux yeux des intéressés. Le premier consistait à reprendre attache auprès de cette vieille bique dévote de Robert le Naturaliste, afin que celui-ci recontacte l’agent de la star homme-arbre – Racine Dutronc. L’idée sous-jacente consistait à surprendre les futurs adversaires – dont le jeu était surtout orienté sur l’affrontement physique – et de leur opposer une défense très solide articulée autour des deux hommes-arbres du Real Boitar, épaulés de manière plus qu’imposante par le joueur vedette. Le coach Duda suivait en cela – et ce en quoi il était soutenu par la plupart de ses joueurs – l’un des fameux préceptes figurant dans le Petit Guide Illustré du Parfait Entraineur de Blood Bowl, selon lequel « Deux gros bras, c’est bien. Trois c’est mieux ». Il espérait en effet que l’impact physique que pourraient apporter les trois gardiens sylvestres, ferait suffisamment de ravages dans les rangs orques pour permettre aux halflings de se faufiler entre des lignes clairsemées d’adversaires. Et si, par un heureux hasard, les crampons de l’un de ses joueurs ripaient malencontreusement contre le tibia, les cotes ou le crâne d’un peau-verte, ce serait un mal, mais un mal nécessaire, que la conscience du coach saurait accepter.

La seconde partie du plan machiavélique élaboré par l’entraineur du Real Boitar était bien moins louable sur le plan moral, que la première. Elle consistait, tout bonnement, et comme c’était de coutume depuis le début de l’année, à faire appel au fameux chef cuisiner Roël Jobuchon, afin que ce dernier mette ses extraordinaires compétences culinaires au service de l’équipe. Sachant les orques fervents amateurs de la viande de Squigg et de champignons des cavernes, Duda fit livrer au restaurant étoilé du maître-traiteur, une dizaine de caisses de barbaque faisandée, provenant d’une escarmouche qui s’était déroulé il y a quelques mois de cela dans les Principautés Frontalières, entre une bande de gobelins fanatiques montés sur ces immenses bêtes et les troupes locales d’un baron quelconque. Certes, l’étiquetage des caissons annonçait des contrôles de qualité et de provenance suffisants, mais d’une part, ils commençaient à dater, et d’autre part personne n’était véritablement en mesure d’affirmer avec certitude que la viande livrée était composée uniquement de steaks de Squigg. Il faut l’avouer que l’escarmouche fut un véritable massacre pour les deux camps… La livraison était, par ailleurs, complétée par une centaine de bocaux de champignons hallucinogènes, utilisés par les chamanes des Terres Arides dans le cadre de leurs rites de vision initiatique, mais hautement toxiques pour tout consommateur non initié. Il fallait au moins cela pour les estomacs réputés solides des orques, et Duda espérait que la décoction préparée par Roël soit suffisamment forte et agisse de manière merveilleuse sur le comportement des adversaires durant le match.

La troisième partie du plan enfin était en tous points la plus diabolique, dans la mesure où elle devait conduire à éliminer, de la plus vilaine des façons, le troll de l’équipe des Past Guys 40 – le redoutable Abrixtuck – bourreau macabre pour de nombreux joueurs du championnat depuis le début de la saison qui ont eu le malheur de croiser ses poings de pierre. Pour cela, et en échange d’une coquette somme en monnaie sonnante et brillante, Duda et ses protégés firent appel à quelques supporters fanatiques de l’équipe, lesquels, grâce à bon nombre d’enveloppes judicieusement transmises, surent se faire plusieurs amis parmi les pontes du service de sécurité du stade. Ces petits chenapans furent missionnés pour acheminer en douce, dans l’enceinte sportive où devait se dérouler la rencontre, un imposant bloc de roche devant être projeté, au moment propice, sur le gros bras de l’équipe orque.

Duda et les halflings avaient cependant oublié un détail important dans leur plan si savamment pensé : les peaux-vertes, ça adore la viande faisandée. Pourrie même. A la limite, ça ne se nourrit que de ça…

Ils avaient en outre fait l’impasse sur un autre détail, une scorie futile, un petit détail de rien du tout, une broutille insignifiante : pour des raisons de marketing, le match fut délocalisé au stade de la Waagh Taverne. Chez les orques, en somme…

C’est ainsi que par une pluvieuse soirée de printemps, le Real Boitar affronta les redoutables et patibulaires orques du non moins redoutable et patibulaire coach Buckler. Une marée de spectateurs en liesse garnissait les gradins du rustique stade de la Waagh Tavern, et le vacarme des chants gutturaux et barbares des supporters orques, qui retentissaient puissamment dans l’enceinte, couvrait complétement les cris de ferveur des rares fans halflings qui avaient osé se déplacer dans le quartier malfamé de la capitale où se situait la rencontre. Alors que les deux équipes s’échauffaient sur la pelouse, Duda se fourbissait son plan sournois en se frottant les mains, un sourire narquois sur les lèvres, persuadé que les quelques sales coups qu’il avait élaborés allaient ouvrir le chemin d’une victoire aisée pour son équipe. Il ne savait pas encore, à cet instant précis, combien il se trompait…

Pourtant, le début du match semblait lui donner raison. Alors que le Real Boitar débutait les hostilités et contrôlait le ballon au fond du terrain, bien à l’abri dans les bras velus de Calben Drupoil, les Past Guys 40 semblaient avoir toutes les peines du monde à répondre à l’impact physique imposé par les trois hommes-arbres de leurs adversaires. Heureusement pour eux, la solidité légendaire des peaux-vertes leur permettait de résister quelque peu, et de maintenir un semblant de cohésion dans les lignes, sous l’avalanche de coups furieux distribués par les imposants gardiens sylvestres. Quant à Abrixtuck, son début du match paraissait coller à merveille avec le préfixe de son patronyme, dans la mesure où le soi-disant redoutable troll, restait caché au milieu de ses troupes, et n’osait aventurer son gros nez en première ligne, certainement par peur d’un mauvais coup de la part de Racine Dutronc. Ce faisant, il convint de constater que les orques passaient le plus clair de leur temps, les fesses en l’air, et la tête enfuie dans la pelouse bouseuse. Peut-être également que la mixture qu’ils avaient ingurgités avant la rencontre – offerte généreusement par la Ligue et préparée de main de maître par le fameux chef cuisinier Roël Jobuchon – leur pesait sur les estomacs, pourtant solides. Quoi qu’il en soit, les orques offraient une résistance plus que douteuse. De ce fait, les halflings opiniâtres purent opérer une percée certaine dans le camp adverse. Le coach Duda jubilait intérieurement car, malgré leurs derniers excès, malgré leur comportement récent irresponsable, et malgré cette satanée tentative de grève ridicule, ses protégés tenaient la dragée haute face à des adversaires beaucoup plus physiques et plus expérimentés qu’eux. Une nouvelle fois, la pugnacité et la vaillance des semi-hommes paraissait déjouer tous les pronostics, à la surprise générale d’un stade pourtant acquis à la cause orque.

Et c’est ainsi que, à quelques minutes de la fin de la première mi-temps, propulsé par plusieurs de ses camarades, Calben Drupoil s’élança vers la ligne de touchdown des Past Guys 40, alors qu’il venait de traverser toute la pelouse, la balle bien callée sous son coude. Un seul orque se plaça sur son chemin, un malheureux blitzer esseulé qui tenta de défendre tant bien que mal l’inarrêtable attaque du Real Boitar. Un seul blitzer, que Calben esquiva avec une aisance et une grâce quasi-félines, et tenta de pénétrer enfin dans l’Eden de tout joueur de Blood-Bowl, à savoir la zone d’en-but adverse. Mais voilà, il suffisait de faire quelques pas de plus… Naturellement, alors qu’il s’élançait de toute la force de ses jambes pataudes, Calben trébucha – chose incroyable – sur un monticule de terre, malencontreusement placé là par un effronté et insolent mammifère fouisseur, à savoir une saleté de parasite de taupe ! Calben s’étala donc de travers dans l’herbe faisant choir le cuir…

Sous les vivats du peuple vert, qui se mirent alors à scander des « René ! René ! » sans aucune logique apparente, la contre-attaque orque fut d’une fulgurance impressionnante. Prend’ça, le blitzer des Past Guys 40, saisit pleinement l’opportunité que lui offrait le sort malencontreux des halflings (à moins que ce ne soit la maladresse de Calben ou plus probablement le diabolique complot orco-taupesque). Il s’empara du ballon qu’il projeta au loin vers un de ses comparses esseulés. L’ovale dessina une courbe magnifique et atterrit de manière parfaite dans les bras musclés d’un autre blitzer orque. La passe était splendide, digne des lanceurs elfes les plus doués du championnat et l’entraineur halfling demeura coi, les yeux exorbités et la bave aux lèvres. Il restait pétrifié, incapable de bouger, totalement ébaubi par la tournure des événements. En quelques secondes malheureuses, la réussite changea de camp. L’attaque implacable des halflings s’arrêta net à quelques pas de la ligne de touchdown orque et le ballon se retrouva, quasiment instantanément, de l’autre côté de la pelouse, porté par un blitzer peau-verte complément esseulé. Ce dernier se pressa à toutes enjambées et, puisque le sort semblait avoir changé de camp, réussit à pénétrer dans l’en-but halfling juste avant le coup de sifflet de l’arbitre ! Le stade explosa de bonheur enragé, alors que les orques venaient d’ouvrir le score, et ce après avoir subi la pression du Real Boitar durant toute la première mi-temps. C’était un véritable hold-up, qui faisait jubiler le coach Buckler, lequel souriait à pleines dents et sautillait de joie dans sa zone technique, sous le regard acariâtre et désabusé de Duda.

Mais les malheurs du Real Boitar n’avaient pas encore atteint leur apogée ce soir. Loin s’en faut.

Après ce coup du sort, l’entraineur halfling décida d’employer leur arme secrète, que les séides du Real Boitar avaient sournoisement fait entrer dans l’enceinte sportive. Alors que les deux équipes revenaient sur la pelouse, Duda agita ses bras en direction des gradins halflings, faisant signe à la petite bande de voyous d’agir immédiatement. Tout à coup, il stoppa son geste et blêmit, le sang quittant instantanément son visage. Son regard se pétrifia et des gouttes de sueur apparurent sur son front. Voilà que les fanatiques supporters orques chargeaient en nombre le secteur des visiteurs, visiblement dans l’idée d’en découdre ! Le service de sécurité fut brusquement débordé et les coups commencèrent à pleuvoir entre les deux factions rivales. A ce jeu-là, naturellement, la force physique orque régla rapidement le conflit, les supporters du Real Boitar fuyant à toutes enjambées sous l’avalanche des coups brutaux des peaux-vertes. En quelques instants, ce fut sauve-qui-peut dans les rangs des fans halflings, une véritable débandade. Et les partisans orques hurlèrent de joie en s’emparant des gradins adverses. Quelle ne fut pas alors leur surprise en découvrant, sous une bâche solidement ficelée, un immense morceau de roc tout prêt à l’emploi. Ni une ni deux, leurs cerveaux primitifs entrèrent en action…

L’arbitre de la rencontre faillit avaler son sifflet en donnant le coup d’envoi, alors qu’un imposant rocher traversait le ciel nocturne pour s’abattre en plein sur le tronc noueux de Cendrechêne Boisnoir, l’homme-arbre du Real Boitar ! Le coup fut implacable, la visée juste et la trajectoire parfaite ! Le vénérable ancêtre s’affala de tout son long dans l’herbe grasse et cessa de bouger, seules quelques branches éparses s’agitant sous l’effet de spasmes nerveux. Un silence de cathédrale se fit dans le stade, alors que tous, joueurs, supporters, journalistes et staffs des deux équipes, écarquillaient les yeux de stupéfaction. L’invraisemblable se produisit, alors qu’un bloc de roche grise écrasait de tout son poids le malheureux homme-arbre.
-    Pute vérolée ! – jura tout haut le coach de l’équipe halfling, alors que le stade explosait tout à coup de joie effrénée.
Les orques jubilaient et les railleries moqueuses pleuvaient en direction de semi-hommes abasourdis. Ces derniers s’amassèrent autour de leur compagnon à terre, tandis que l’équipe médicale s’affairait déjà à la man½uvre, essayant tant bien que mal à dégager le roc qui pesait lourdement sur le tronc de l’homme-arbre.

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-    Doooooiiiiiit, faaaaaaire malllll. – constata stoïquement Racine Durtonc en avisant son congénère blessé.
-    T’l’as dit, merde. – confirma avec dépit Eggon.
-    Par les mille enfers ! – jura une nouvelle fois Duda en se penchant au-dessus de Cendrechêne alors que le rocher venait enfin à être dégagé et que tous purent découvrir l’ampleur des dégâts subis par le gros bras du Real Boitar. Celui-ci souffrait de multiples fractures de l’écorce, le tronc enfoncé à de nombreux endroits d’où s’écoulait une sève jaunâtre.
-    Va pas reprend’ l’ma’ch. – constata avec un désabusement blasé Calben.
Le vénérable ancêtre fut harnaché, par des filins solides en chanvre, à deux mulets patauds, qui le tirèrent en dehors de la pelouse. Le verdict médical ne se fit pas attendre. Cendrechêne ne pourrait reprendre la rencontre, ses blessures étant trop importantes et le joueur n’ayant de toute façon pas recouvert ses esprits. La situation s’avérait donc plus que dramatique pour le Real Boitar. Sur un nouveau coup du sort, ils venaient d’être privés instantanément d’un tiers de leur force de frappe !
Naturellement, dans ces conditions, la résistance que l’équipe halfing pouvait opposer à leurs solides adversaires orques n’en trouvait fort amoindrie. Et le terrain vérifia en effet les craintes de leur entraineur. Le Real Boitar tenta le tout pour le tout, mais après cet énième revers de fortune, les c½urs n’y étaient plus. Les halflings erraient esseulés sur la pelouse, esquivant tant bien que mal les violentes charges des Past Guys 40, et les deux hommes-arbres restants ne purent offrir qu’une opposition limitée à la déferlante de violence adverse, exaltée de manière extraordinaire par le coup du sort bienheureux (du point de vue des orques naturellement).

Duda comprit en quelques minutes que la situation était irrémédiablement et définitivement compromise. Il réorganisa son équipe de sorte à éviter une déconvenue encore plus catastrophique, sous forme d’un anéantissement complet des effectifs du Real Boitar, et demanda à ses joueurs d’éviter, le plus possible le contact physique. La voie de l’en-but halfling était donc toute ouverte pour les Past Guys 40, et ces derniers ne se firent pas prier pour augmenter le score du match, après avoir tout naturellement contrôlé le ballon jusqu’au dernier moment.

Il ne restait au Real Boitar qu’une chose à faire, à savoir tenter de sauver l’honneur de l’équipe au moyen d’un lancer de halfling dont l’équipe avait le secret. Cependant, même cela leur fut refusé par la roublardise et l’expérience (ainsi qu’une certaine dose de sadisme diabolique) du machiavélique coach Buckler. En effet, celui-ci profita de la confusion qui régnait dans les derniers instants du match pour réorganiser sa défense juste avant le coup de sifflet de l’arbitre signalant la reprise de la partie. Les deux-hommes arbres positionnés en vue d’un lancer furent immédiatement encerclés par plusieurs orques patibulaires. Il fut impossible pour les quelques halflings restants de repousser l’ensemble des adversaires et la responsabilité de la tentative échut à la star Racine Dutronc. Ce dernier, toujours aux prises avec un trois-quarts orque opiniâtre, ne put tout naturellement se saisir correctement de Hal Pleinepanse, qui était alors le porteur de ballon, et le lancer de coéquipier rata lamentablement, au grand dam du coach Duda et des quelques fans halfling restants dans les gradins sous la protection du service de sécurité.

Ce n’était donc pas le soir du Real Boitar, dont les joueurs quittaient la pelouse les têtes basses et les mines dépitées et les esprits assombris par les multiples revers de fortune qui ruinèrent une soirée pourtant débutée d’une manière si prometteuse.

***

Dans la salle de presse, bondée de journalistes avides et pressants, il régnait une ambiance suffocante et lourde. Les mines graves, les traits tirés, les regards anxieux et les yeux injectés de sang par la fatigue et le stress, Eggon, Tholot et Duda se soumettaient avec désemparement et fatalisme aux questions virulentes des médias voraces, qui pleuvaient sans discontinuer sur les malheureux halflings et leur entraineur. Les flashs des boites à images crépitaient de manière acharnée, alors que le coach, bras croisés et coudes appuyés sur la table, tentait de justifier la piètre prestation de ses joueurs.
-    Non, il ne s’agit pas de cela. – expliquait-il posément, la voix éreintée. – Les évènements de la veille n’ont eu aucun effet sur l’état de forme de mes joueurs. Ils étaient parfaitement préparés pour cette rencontre…
-    Tout de même, coach. – intervint un jeune journaliste, un petit perdreau à la peau glabre et à la chevelure gominée, vêtu d’un costume impeccablement taillé. – Vous ne pouvez nier qu’en refusant de s’entrainer, votre équipe n’a pas mis toutes les chances de son côté…
-    Mon équipe n’a pas refusé de s’entrainer ! Qu’est-ce qui vous a mis des conneries pareilles dans la caboche ?! – Duda haussa le ton en frappant du poing sur la table. – Encore une réflexion de la sorte, et je vous fais sortir de la pièce ! Est-ce bien compris.
-    Certes. – le journaliste ne s’en laissa pas compter. – Et votre homme-arbre ? Pouvez-vous nous donner des nouvelles ?
-    Il va bien. – répondit laconiquement l’entraineur, n’arrivant à s’apaiser que partiellement.
-    Euh. – Eggon prit la parole en venant au secours de son coach. – Ce que l’coach veut préciser c’est que Cendrechêne a parfaitement récupéré de ses blessures. Il a eu du mal à s’en remettre, et le staff médical a préféré le sortir. Mais le protocole commotion n’a pas révélé de séquelles importantes. Tout au plus quelques bosses ou plaies superficielles. Il va s’en remettre pour le prochain match, soyez rassuré.
-    Passons à autre chose, voulez-vous ? – la question venait d’une journaliste à la mine sévère, coiffée d’un chignon austère et vêtue d’un tailleur gris qui soulignait à merveille sa taille de guêpe. – Nous souhaiterons avoir des précisions du capitaine de l’équipe sur cette action ratée en fin de première mi-temps. L’erreur catastrophique de Calben Drupoil vous coûte le match, me semble-t-il.
Les regards se tournèrent vers Tholot qui, affalé sur sa chaise, le visage enfui dans ses mains, se redressa soudain et jeta aux journalistes un regard plein de reproches et d’animosité. Il s’exprima alors d’une voix exaltée, visiblement emporté par les émotions.
-    Le problème c’est pas Calben ! Le problème c’est pas notre niveau de jeu. Le problème c’est la taupe. Parce qu’il faut le dire. Comment cette chose à pu sortir. La question qu’il faut se poser c’est cette taupe traitresse qu’il faut éliminer. Le problème du Real Boitar c’est pas les joueurs, c’est la taupe !
Les journalistes demeurèrent ébahis, totalement sidérés par les propos somme toute incohérents du capitaine de l’équipe.
-    Mais, mais de quelle taupe vous parlez ? – demanda la journaliste, quelque peu perturbée par la tirade de Tholot.
-    Mais la taupe ! –le halfling déchaina ses émotions. – C’est pas une petite souris, c’est pas quelqu’un qui s’est transformé ! C’est bien une taupe ! C’est sorti de la terre et c’est quelqu’un qui veut du mal à l’équipe du Real Boitar ! Je suis persuadé qu’il y’en avait une de taupe. Parce que c’est pas possible !
-    Pardon, nous ne comprenons pas très bien. – intervint de nouveau le jeunot en costume, également interloqué par les propos perturbants de Tholot.
-    Mais la taupe bordel ! – hurla ce dernier. – Vous avez pas vu la taupe, vous les journaleux !
-    Calme toi, Tholot. – Eggon tenta d’apaiser la situation en tapotant le bras de son ami et compère. – Ca sert à rien de s’emporter.
-    On s’en fout, Eggon. – protesta le capitaine. – Z’ont qu’à comprendre que c’est pas la faute des joueurs, ce match. Vont pas tout nous foutre sur le dos, ces saletés de gratte-papiers !
-    Euh, pardonnez-moi, mais dans ces circonstances, pouvez-vous affirmer que votre groupe est sain ? – la journaliste acariâtre ne s’en laissa visiblement pas compter, et demeura imperturbable face à la verve véhémente de Tholot.
-    De quoi vous parlez, bon sang ?! – le halfling continuait son acerbe diatribe. – Depuis le début, bien sûr que notre groupe est sain ! Mais quand tu te rends compte qu’il y en a une de saloperie, et je sais pas qui c’est parce que j’suis pas magicien, tu peux plus dire ça ! Si ce soir je dois parler du groupe, je dis qu’il n’est pas sain, parce qu’il y a une taupe qui fout la merde ! Mais après, bien sûr que nous sommes unis, bien sûr que depuis le début du championnat je n’aurais imaginé qu’on serait dans cette situation-là ! Avec des affaires comme ça, comme votre prétendue grève, et cette défaite contre les Past Guys 40. Mais je maintiens ce que je dis ! Maintenant je ne peux plus me permettre de dire ça !
-    Pardon, pardon. – le journaliste gominé reprit la parole d’une voix gênée et embarrassée. – Nous ne comprenons pas où vous voulez en venir. Vos propos sont légèrement… incohérents…
-    Ca suffit ! – intervint l’entraineur avec vigueur. – La conférence est close ! Nous n’avons plus rien à ajouter !
Sur ce, il se leva vivement et, accompagné de ses deux acolytes, il quitta la salle de presse sans un regard en arrière pour la foule de journalistes, alors qu’un brouhaha infernal mêlant crépitements des flashs aux questions emportées des reporters insatisfaits emplissait les lieux. Nul doute que la conférence du soir allait faire la une des journaux de demain et déchainerait les passions pendant des longues semaines à venir, mais pour le moment, Duda et son équipe donnaient visiblement l’impression de s’en moquer allégrement.

Il ne leur restait qu’une poignée de matchs à tenir, afin d’exécuter le plan infernal qui naissait doucement mais sûrement dans l’esprit retors et perfide de leur entraineur.

cool


Pourquoi les Nains ont la bière et les Elfes la magie ?
Parce que les Nains ont choisi en premier...

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#189 01-11-2019 21:07:55

Scarabee
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[TMNT] Croâ ? Croâcoubeh !

Re: ANNONCE

Félicitations Dudamenech cool
Vivement la fin !


Scarabee, sinon, j'ai une nouvelle fois rien compris à ton intervention — Duda®2023

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#190 02-11-2019 20:27:38

Manu
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Zinzins

Re: ANNONCE

Un régal à lire !!!

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