Nabolo
La « J-8. »
On est à mi-parcours.
Et les paroles d’Ashrame résonnent aux oreilles de Nabolo : « On est dans le ventre mou du championnat, c’est maintenant que ton équipe doit prendre ses marques, qu’elle doit se préparer… à la grande bataille des play-offs ».
Le ventre mou, c’est vite dit : car les prochains adversaires des vaillants Maraboes ne sont autres que les Kommando Komodo Klub. Pas trop de mollesse là-dedans a priori, sauf peut-être sous 4cm d’écailles ? On peut le dire, cette fois, plus que toute autre, les étudiants de Marienburg s’apprêtent à affronter des monstres.
Pour autant les résultats des Komodos n’impressionnent pas. Alors comment appréhender ce match ? Nabolo sait que ses hommes ont besoin d’exploits et de beau jeu pour gagner en confiance et en expérience, alors que lui-même veut surtout les trois points de la victoire, quitte à restreindre le potentiel de l’équipe dans les limites de tactiques moins risquées…Un mystère plane autour de Yaouch, le coach adverse, dont Nabolo ne sait quasiment rien. Une rapide enquête ne lui apprend qu’une chose : ce serait un bon coach en déveine.
Nabolo se décide à communiquer directement avec lui, et le contact est excellent. Yaouch lui fait la faveur, très amicale, d’avancer leur match au maximum car Nabolo est appelé à s’éloigner des stades pendant un petit moment. C’est un sacrifice pour Yaouch, Nabolo le sait, de jouer deux rencontres deux jours d’affilés. Mais le coach des Komodos, noble avec bonhommie, bonhomme avec noblesse, ne s’en plaindra pas une fois. Il ne se plaindra que d’une chose : que Nabolo préfère le jus de mangue au jus de houblon.
Ainsi les deux coachs sympathisent tandis que le stade se remplit des 90.000 spectateurs venus assister à la rencontre, et des joueurs, venus assurer le spectacle. Nabolo a une pointe au c½ur en songeant qu’il va bientôt tout faire pour peiner celui à qui il doit de pouvoir partir à temps pour sa retraite annuelle… mais cette peine est atténuée en constatant que Yaouch a loué les services de Helmut Wulf, joueur réputé pour sa violence, avec la bourse à laquelle il a droit - compte tenu de la différence de budget entre leurs deux équipes. Un point de non-retour est atteint lorsque Yaouch, apercevant Marteen, s’exclaffe : « Oh mais il y a des halflins dans ton équipe. A quoi ça sert ? ». Une décharge électrique parcourt l’ensemble du stade ; Nabolo se fige : en croisant le regard de Marteen qui brille d’une lueur assassine.
Célèbre pour son double arrachage de couilles en début de saison, Marteen n’a plus connu la gloire depuis un certain nombre de matchs. Les testicules, vaillamment glanés, qu’il arborait autour du cou, se sont flétries avec le temps. Oui, même un testicule peut flétrir, et ceux du minotaure des Gens bons de pays, et de l’ogre des burgers, ne sont plus que deux petites poches de cuir rabougries : à l’image de l’estime de soi de Marteen, depuis qu’il est raillé par les fans qui jadis l’adulaient. Mais les paroles de Yaouch ont ranimé sa rage. Dans les yeux de Marteen ? Il y a le feu.
« Je crains que tu n’aies réveillé le géant qui dormait » lâche Nabolo à Yaouch avant de rejoindre son banc… Bon il l’a pas exactement dit comme ça mais toutes les grandes citations sont sujettes à amélioration. Finies les accolades, la partie va commencer.
Les M’boes bottent le ballon au centre du camp adverse où il est récupéré sans difficulté par le seul skink non titulaire des Komodos, et ce malgré un soleil aveuglant qui tape déjà fort sans être au zénith.
Les Komodos allongent les beignes, les Maraboes les encaissent. Tout à coup, Helmut, qu’on aperçoit à peine parmi ses coéquipiers géants, dégaine une tronçonneuse qu’il avait très mal dissimulé sous son maillot… Il tente de la dégainer du moins, car la tronçonneuse s’emballe et manque de le déchirer en deux !! Plus de peur que de mal, même s’il ne se relèvera pas tout de suite. Nabolo crie au scandale ! Les armes étant strictement interdites dans le règlement. Hélas peu de joueurs savent lire et l’arbitre est introuvable. On n’a pas le temps de s’attarder sur ces détails car le match se poursuit… Or, dès les premiers instants, une chose est évidente : s’ils impressionnent par leur carrure, les hommes lézards sont beaucoup moins techniques que les M’boes. Leur coordination aussi laisse à désirer. Un joueur pourtant se distingue du lot, ce n’est pas le plus gros mais il sait où taper et il sait le faire fort… Ce qu’il ne sait pas ? C’est qu’il a été pris en chasse. A quelques mètres en retrait de la LOS, un halflin suit chacun de ses mouvements… Marteen attend son heure. Déséquilibré par l’effort conjoint de deux blitzers et un trois-quart, le champion lézard trébuche, et Marteen bondit ! Jaillissant de l’herbe telle une puce assoiffée de sang, il se faufile entre les jambes de ses partenaires, puis celles de sa victime : à la recherche d’un troisième trophée ! Mais là, stupeur : Marteen le constate, sa proie est dépourvue de testicules.
« Ils n’ont pas de couilles ! » s’exclame le halflin, au comble de la surprise. Et le mot de se répandre comme une trainée de poudre dans le rang de ses coéquipiers : « Ils n’ont pas de couilles ?! » « Non, ils n’ont pas de couilles !! » « Marteen dit qu’ils n’ont pas de couilles ! » « Comment ça mardi y aura pas de rouille ? Et pour ma bouillabaisse je fais comment moi ?! ».
Une fois la nouvelle connue (et comprise) de tous, un gigantesque élan de force collective s’empare des Maraboes. Leurs adversaires n’ont pas de couilles ? Les humains ne peuvent plus perdre ! Les Komodos reculent et Marteen, dont la cible ne s’est pas relevée, termine ce qu’il a commencé. Il se jette sur la queue du dinosaure dont il engouffre une grosse part dans sa large bouche aux mâchoires puissantes, aux dents de fer. Certes il est petit, insignifiant, « inutile », pour reprendre les mots de Yaouch, mais sa mâchoire broie un poulet entier en moins de 5 secondes alors faut pas laisser trainer des trucs dedans. Un sang vert et épais gicle comme de la purée de brocoli sur le terrain. L’arbitre n’est toujours pas de retour, tant mieux, il aurait pu sévir car la violence déployée ici a de quoi pousser un orque à trois années de psychothérapie. Le lézard siffle, s’effondre, et ne se relève plus. Un apothicaire intervient. Marteen mâchouille : c’est plutôt bon - passé les écailles. Mais pour ceux que le sort du ballon intéresse, la partie continue et les deux équipes se font front : deux murs qui s’entrechoquent sur la partie gauche du terrain où les Komodos ont déporté le porteur du ballon… En sous-estimant la vitesse des Maraboes ! Rémy contourne l’aile droite et après une course folle démarrée sur une esquive, tamponne le skink qui laisse échapper le ballon. Les Komodos pourraient réagir mais un gros nigaud de lézard se prend les pieds dans sa propre queue. « Tu vois je te l’avais dit » plaisante Yaouch avec détachement, et Nabolo de constater que, effectivement, la chance n’est pas de son côté !! Les Maraboes en profitent évidemment et le Capitaine Rein Godding s’échappe avec le ballon. 1-0 pour les M’boes.
L’arbitre est de retour (c’était la grosse commission) et sévit immédiatement à l’instar d’Helmut que Nabolo a dénoncé. Les Komodos récupèrent néanmoins leur meilleur joueur, que l’apothicaire est parvenu à rafistoler… les yeux de Marteen s’éclairent : il a encore faim. Il ne reste que quelques minutes avant que la première mi-temps se termine… ce qui donne davantage lieu à des échanges de coups plutôt qu’à de vraies tentatives. Hein a vu Marteen et sait ce qu’il attend. Il rallie ses camardes et, ensemble, parviennent tant bien que mal, à faire trébucher le champion des lézards… L’apothicaire a utilisé tout son matériel, il n’aura pas de deuxième chance ! Marteen se lèche les babines… et bondit ! Pour retomber, la bouche pleine. Difficile de lire les émotions d’un homme-lézard. On n’entend à peine qu’un sifflement à vrai dire… Mais Justin Leenders, l’ancien capitaine, qui assiste Nabolo depuis sa blessure et qui a grandi en Lustrianie traduit : « Il a sifflé : « ssethfoissassufi ». En effet il sort, peut-être atteint dans sa dignité (bien qu’il n’ait pas de couilles) et ne reviendra plus.
C’est la fin de la première mi-temps et le soleil, décidément, ne fait que briller davantage. Certains joueurs s’évanouissent. Dans les deux camps certes mais les Komodos étant moins nombreux ils ne commencent la mi-temps qu’à sept ou huit joueurs. Tobi Fisher ose donc une passe, et les Maraboes s’envolent sur l’aile droite pour un TD rapide, non sans être mis en difficulté par la défense des Komodos. Ils sont toutefois suffisamment agiles pour porter le score à 2-0.
La deuxième mi-temps reprend après qu’on laisse à chaque équipe le temps de ranimer ses joueurs… Cependant que d’autres s’évanouissent !!! Il fait une chaleur de gros taré dans ce stade. Yaouch reprend une bière ; Nabolo, un jus de mangue. Cependant les Maraboes mettent la pression très vite, après avoir botté au ras de la LOS. Ils récupèrent le ballon suite à une nouvelle maladresse que Yaouch commente avec flegme… On dirait bien qu’il a offensé Nuffle, et qu’il est résolu à faire pénitence. La cohésion des M’boes leur permet d’ouvrir un couloir vers un troisième TD, là-aussi non sans une âpre bataille avec l’arrière-garde des Komodos, et c’est Jérôme, la dernière recrue des Maraboes venue de Bretonnie, qui marque le troisième TD tandis que le gros des forces Komodos paye de nouveau son manque d’habileté et de chance dans des entre-chocs violents mais éloignés du ballon. 3-0
Arian Nijborg, le receveur, aura droit aux honneurs du JPV. Son seul mérite : avoir encaissé une beigne de premier ordre… qu’à vrai dire les supporters des M’boes lui souhaitaient depuis longtemps compte tenu de son inutilité flagrante durant toute la première partie de la saison.
Cette beigne, c’est la réconciliation du joueur avec le public.
Le TD de Jérôme marque l’intégration du dernier arrivant.
Marteen Dent-de-fer est devenu Marteen Dents-d’acier.
L’équipe encaisse la coquette somme de 75.000 pièces d’or, et repart avec trois points et trois TD marqués.
Le public est aux anges, l’équipe est au complet. Elle regarde vers l’avenir et son prochain match, contre SSB et ses orques que Nabolo a déjà affronté cette saison, en tant que mercenaire pour l’équipe des Inguiz Titi. Un adversaire bien connu cette fois, un acharné. Nabolo l’est aussi. Et les Maraboes sont prêts. MA-RA-BOES !!!